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27/01/2011 | FRANCE | N°10DA00013

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 27 janvier 2011, 10DA00013


Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Pascal A, demeurant ..., par Me Michallon, avocat ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801219 du 15 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 ainsi que des pénalités et frais de poursuites y afférents ;

2°) de prononcer la décharge

demandée ;

Ils soutiennent que l'article 24-1 de la convention franco-luxembo...

Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Pascal A, demeurant ..., par Me Michallon, avocat ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801219 du 15 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 ainsi que des pénalités et frais de poursuites y afférents ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

Ils soutiennent que l'article 24-1 de la convention franco-luxembourgeoise a été méconnu et qu'ils sont installés depuis de nombreuses années au Luxembourg ; que l'administration ne leur a communiqué aucun document en rapport avec la demande d'assistance internationale faite auprès des autorités luxembourgeoises et ne les a pas informés de l'origine et de la teneur de tels documents ; que le jugement a omis de répondre à ce moyen ; que les avances en compte courant perçues de la SARL AB Laser ne sont pas des revenus mais le remboursement d'une créance ; que la mauvaise foi n'est pas établie et que la pénalité la sanctionnant n'est pas régulièrement motivée ; que les paragraphes 1 et 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 avril 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que les autorités luxembourgeoises n'ont pas répondu à la demande d'assistance administrative internationale, en sorte qu'aucun redressement n'est fondé sur des renseignements qu'elles auraient communiqués ; que la charge de la preuve pèse en l'espèce sur le contribuable ; que M. A était imposable en France ; que les bénéfices non commerciaux ne sont imposables que dans l'Etat de la source ; que les sommes reçues de la SARL AB Laser sont également imposables en France ; que le moyen tiré de l'article 24-1 de la convention franco-luxembourgeoise est inopérant ; que la majoration de 40 % pour manquement délibéré est régulièrement motivée et que le caractère délibéré du manquement est établi ; que l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'a pas été méconnu ; que la demande en décharge d'éventuels frais de poursuite est prématurée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention fiscale conclue entre la France et le Grand Duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles d'assistance administrative réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune, signée le 1er avril 1958, modifiée par l'avenant du 8 septembre 1970 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes mêmes du jugement attaqué qu'il a répondu, de façon suffisamment motivée, tant au moyen tiré de ce que l'administration s'est abstenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine de renseignements obtenus de tiers qu'à celui tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 24-1 de la convention franco-luxembourgeoise susvisée du 1er avril 1958 ; que, dès lors, les requérants ne sont pas fondés à prétendre que les premiers juges auraient omis de répondre à ces moyens ;

Considérant, en second lieu, que le jugement attaqué a rejeté la demande dont M. et Mme A avaient saisi le Tribunal administratif d'Amiens et, dès lors, a rejeté l'ensemble des conclusions de cette demande ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce qu'il aurait été omis de statuer sur certaines conclusions de cette demande manque en fait et ne peut qu'être écarté ;

Sur la recevabilité des conclusions relatives à des frais de poursuite :

Considérant que, si M. et Mme A demandent à la cour administrative d'appel de prononcer la décharge de frais de poursuites, le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat est fondé à faire valoir que ces conclusions, qui sont nouvelles en appel, sont irrecevables ;

Sur les conclusions en décharge :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont M. et Mme A ont fait l'objet au titre des années 2003 et 2004, l'administration a, par courrier du 20 mars 2006 reçu le 22 mars 2006 et sur le fondement des stipulations de l'article 22 de la convention susvisée du 1er avril 1958, adressé une demande d'assistance administrative aux autorités luxembourgeoises concernant M. et Mme A ; que, toutefois et au 31 mai 2007, date de mise en recouvrement des suppléments d'imposition dont M. et Mme A demandent la décharge, ces autorités n'avaient pas répondu à cette demande, à laquelle elles n'ont répondu que le 19 novembre 2007, postérieurement à la mise en recouvrement ; qu'ainsi, l'administration n'ayant pas fondé ces suppléments sur des renseignements obtenus des autorités luxembourgeoises, elle n'a commis aucune irrégularité en n'informant pas M. et Mme A de la teneur et de l'origine de tels renseignements ; que le moyen tiré d'une instruction du 19 juillet 2007 publiée au bulletin d'officiel des impôts sous la référence 13 L-5-07, instruction relative à la procédure d'imposition et postérieure à la mise en recouvrement susmentionnée, ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré ; qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme A ont accusé réception, le 10 janvier 2007, de la proposition de rectification du 20 décembre 2006, concernant l'année 2003, qui leur a été adressée à leur domicile d'Esch-sur-Alzette ; qu'ils se sont abstenus de répondre, dans le délai de trente jours rappelé par cette proposition, à cette dernière ; que les plis recommandés avec demande d'avis de réception contenant la proposition de rectification du 16 mars 2007, concernant l'année 2004, ont été présentés à leur domicile de Tergnier le 17 mars 2007 et à celui d'Esch-sur-Alzette le 21 mars 2007 et qu'ils ont été avisés de la mise en instance des plis auprès des bureaux de poste distributeur, lesquels, à défaut pour ces plis d'avoir été réclamés à l'issue des délais de garde, les ont retournés au service les 6 avril et 25 avril 2007 ; qu'ainsi, ces plis doivent être regardés comme ayant été régulièrement notifiés à M. et Mme A les 17 et 21 mars 2007 ; que, dans le délai de trente jours suivant ces dates, ils se sont abstenus de répondre à cette seconde proposition de rectification ; que, dès lors, il leur incombe de démontrer le caractère exagéré des impositions dont ils demandent la décharge ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 4 bis du code général des impôts : Sont également passibles de l'impôt sur le revenu : / (...) / 2° Les personnes de nationalité française ou étrangère, ayant ou non leur domicile fiscal en France, qui recueillent des bénéfices ou revenus dont l'imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions ; qu'aux termes des stipulations de l'article 14 de la convention franco-luxembourgeoise susvisée du 1er avril 1958 : 1. Sous réserve des dispositions de l'article 12 ci-dessus, les traitements, salaires et autres rémunérations analogues ne sont imposables que dans l'Etat sur le territoire duquel s'exerce l'activité personnelle source de ces revenus (...) ; qu'aux termes de celles de l'article 15 de la même convention : 1. Les revenus provenant de l'exercice d'une profession libérale et, d'une manière générale, tous revenus du travail autres que ceux qui sont visés aux articles 11, 12, 13 et 14 de la présente convention, sont imposables seulement dans l'Etat où s'exerce l'activité personnelle. / 2. Pour l'application du paragraphe précédent, l'activité personnelle n'est considérée comme s'exerçant dans l'un des deux Etats que si elle a un point d'attache fixe dans cet Etat. / 3. Sont considérées comme professions libérales, au sens du présent article, notamment l'activité scientifique, artistique, littéraire, enseignante ou pédagogique ainsi que celles des médecins, avocats, architectes ou ingénieurs (...) ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté que les rehaussements effectués dans la catégorie des bénéfices non commerciaux au titre de l'année 2003 résultent de l'exercice par M. A, à compter du 1er octobre 2003, d'une activité de médecin généraliste à son cabinet de Tergnier, dans le département de l'Aisne, ainsi que de la perception par M. A d'honoraires, non déclarés, à l'occasion de remplacements de confrères exerçant en France ; que c'est à bon droit que, conformément aux prévisions des articles 4 bis et 15 précités, ces bénéfices non commerciaux ont été soumis à l'impôt sur le revenu en France ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des années 2003 et 2004, M. A a exercé, à son domicile situé 16 rue de Vaucanson à Tergnier, une activité de gérant technique ou de responsable de société de la SARL AB Laser, dont le siège est situé au Luxembourg ; que cette activité consistait notamment à assurer la comptabilité de cette société, dont Mme A assurait la gestion commerciale ; que la SARL AB Laser a établi des fiches de paie en 2003 et 2004 au nom de M. A, pris en cette qualité de gérant technique ou responsable de société et que M. A a, lors des opérations de contrôle, déclaré être salarié de cette société ; que, si les requérants soutiennent que les sommes que M. A a perçues en 2003 et 2004 de cette société au moyen de virements constitueraient, non des revenus, mais des remboursements d'avances en compte courant, ils n'apportent, au soutien de cette allégation, pas le moindre commencement de preuve ; que, dès lors, c'est à bon droit, que, conformément aux prévisions des articles 4 bis et 14 précités, les sommes ainsi perçues de la SARL AB Laser ont été soumises à l'impôt sur le revenu en France entre les mains de M. et Mme A ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 24-1 de la convention susvisée du 1er avril 1958 : Tout contribuable qui prouve que les mesures prises par les autorités fiscales des deux Etats contractants ont entraîné pour lui une double imposition en ce qui concerne les impôts visés par la présente convention, peut adresser une demande soit aux autorités compétentes de l'Etat sur le territoire duquel il a son domicile fiscal, soit à celles de l'autre Etat. Si le bien fondé de cette demande est reconnu, les autorités compétentes des deux Etats s'entendent pour éviter de façon équitable la double imposition ; qu'aux termes de l'article L. 189 A du livre des procédures fiscales : Lorsqu'à la suite d'une proposition de rectification, une procédure amiable en vue d'éliminer la double imposition est ouverte sur le fondement d'une convention fiscale bilatérale ou de la convention européenne 90/436/CEE relative à l'élimination des doubles impositions en cas de correction des bénéfices d'entreprises associées du 23 juillet 1990, le cours du délai d'établissement de l'imposition correspondante est suspendu de la date d'ouverture de la procédure amiable au terme du troisième mois qui suit la date de la notification au contribuable de l'accord ou du constat de désaccord intervenu entre les autorités compétentes ; qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par leurs travaux préparatoires, qu'en prévoyant que le cours du délai d'établissement de l'imposition est suspendu de la date d'ouverture de la procédure amiable jusqu'au terme du troisième mois qui suit la date de notification au contribuable de l'accord ou du constat de désaccord intervenu entre les autorités compétentes, le législateur a entendu prévenir les cas de double imposition d'un contribuable sur les bénéfices et prévoir également à cette fin que, sauf lorsque l'administration fait état d'éléments justifiant d'une mise en recouvrement immédiate de l'imposition, la mise en recouvrement des sommes litigieuses soit suspendue jusqu'à l'issue de cette procédure ;

Considérant, d'une part, qu'en l'absence de tout élément produit par les requérants propres à établir l'origine des revenus à raison desquels M. A a été assujetti au Luxembourg à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2004, et alors qu'aucun des documents qu'ils produisent ne fait état d'un assujettissement dans cet Etat à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2003, les requérants n'établissent pas que les suppléments d'imposition dont ils demandent la décharge procèderaient, en tout ou partie, d'une double imposition contraire aux stipulations de la convention franco-luxembourgeoise du 1er avril 1958 susvisée ;

Considérant, d'autre part, qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'avant la mise en recouvrement, le 31 mai 2007, des suppléments d'imposition en litige, M. et Mme A auraient présenté aux autorités françaises ou luxembourgeoises une demande sur le fondement de l'article 24-1 précité de la convention franco-luxembourgeoise du 1er avril 1958 ; que la demande en ce sens dont ils font état est en date du 12 décembre 2007, donc postérieure à cette mise en recouvrement ; que, dès lors, cette demande n'a pu faire obstacle à ladite mise en recouvrement ;

Considérant, enfin, que les énonciations des paragraphes 207 et 208 de l'instruction du 23 février 2006 publiée au bulletin officiel des impôts sous la référence 14 F-1-06 ne renferment aucune interprétation du texte fiscal susceptible d'être invoquée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...). / 2. Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie (...) ; qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 p. 100 s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droits au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; qu'aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. / Les sanctions fiscales ne peuvent être prononcées avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du même livre : En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ;

Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les raisons de fait comme de droit pour lesquelles l'administration a entendu assortir d'une majoration de 40 %, du fait de la mauvaise foi du contribuable, les suppléments d'impôt sur le revenu procédant de la rectification des bénéfices non commerciaux de M. A des années 2003 et 2004 ont été, de manière complète et précise, exposées dans les propositions de rectification susmentionnées des 20 décembre 2006 et 16 mars 2007 ; que le moyen tiré du défaut ou de l'insuffisante motivation de cette majoration doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que, contrairement à ce qui est soutenu, les stipulations précitées de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne font pas, par elles-mêmes, obstacle à ce que la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts soit infligée par l'administration fiscale ;

Considérant, en troisième lieu, que les dispositions précitées du 1 de l'article 1729 du code général des impôts proportionnent les pénalités selon la nature des agissements commis par le contribuable et prévoient des taux de majoration différents selon la qualification qui peut être donnée au comportement de celui-ci ; que le juge de l'impôt, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, décide, dans chaque cas, selon les résultats de ce contrôle, soit de maintenir ou d'appliquer la majoration effectivement encourue au taux prévu par la loi, sans pouvoir moduler celui-ci pour tenir compte de la gravité de la faute commise par le contribuable, soit, s'il estime que l'administration n'établit, ni que celui-ci se serait rendu coupable de manoeuvres frauduleuses, ni qu'il aurait agi de mauvaise foi, de ne laisser à sa charge que des intérêts de retard ; que les stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne l'obligent pas à procéder différemment ; qu'il en résulte que le moyen tiré de l'incompatibilité de ces dispositions avec les stipulations dudit paragraphe 1 doit être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit, les motifs pour lesquels a été infligée la majoration susmentionnée de 40 % ont été préalablement portés à la connaissance de M. et Mme A par des propositions de rectification dont l'une leur a été régulièrement notifiée et dont l'autre doit être regardée comme leur ayant été régulièrement notifiée plus de trente jours avant la mise en recouvrement de cette majoration ; que ces propositions leur rappelaient la faculté de présenter des observations dans ce délai de trente jours, notamment sur cette majoration, faculté dont ils n'ont pas fait usage ; qu'elles leur rappelaient également la possibilité pour eux de se faire assister du conseil de leur choix ; qu'ainsi, les conditions dans lesquelles cette sanction a été infligée à M. et Mme A n'ont pas porté atteinte à la possibilité, qu'ils ont cette fois exercée, de contester cette majoration devant le juge de l'impôt ; qu'il en résulte que le moyen tiré d'une méconnaissance, à l'occasion de la phase administrative d'établissement de la majoration dont s'agit, du principe général des droits de la défense et du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne saurait être accueilli ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte des termes mêmes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales que la preuve de la mauvaise foi, qui n'est pas présumée, incombe à l'administration, à laquelle il appartient, dès la procédure de redressement, d'indiquer au contribuable les motifs pour lesquelles elle se propose de lui infliger une majoration telle que celle en l'espèce contestée ; que cette majoration ne peut être infligée qu'en fonction d'une appréciation du comportement du contribuable et ne présente aucun caractère automatique ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du paragraphe 2 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant, en sixième et dernier lieu, qu'il résulte de l'instruction que seuls ont été assortis d'une majoration de 40 % en raison de la mauvaise foi du contribuable les suppléments d'imposition procédant, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, de la remise en cause de la déduction par M. A des sommes de 7 250 euros en 2003 et 17 400 euros en 2004 correspondant à une indemnité dite de patientèle versée par M. A à un autre médecin dont, par contrat du 15 septembre 2003, il a racheté la clientèle ; que le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat établit, sans d'ailleurs être contesté sur ce point, que, par lettre du 29 mars 2004, l'association de gestion agréée dont M. A était adhérent l'avait, de manière exacte et avant la souscription de la déclaration des bénéfices non commerciaux de l'année 2003, informé que l'acquisition de patientèle ne constitue pas une charge déductible ; que M. A, qui procédait lui-même à l'établissement de la comptabilité et à la souscription de la déclaration de ses bénéfices non commerciaux, a toutefois déduit ces sommes ; que l'intéressé, qui n'a pas contesté le bien-fondé de ce chef de redressement, n'a apporté aucune réponse aux propositions de rectification des 22 juin et 18 décembre 2006 qui lui ont été adressées à la suite de la vérification de comptabilité dont il a fait l'objet, M. et Mme A n'ayant pas non plus apporté de réponse aux propositions de rectification à eux adressées et déjà mentionnées ; qu'ainsi, M. A n'a apporté aucune explication ou justification sur les raisons pour lesquelles il a déduit des sommes dont il avait été informé du caractère non déductible, sommes qui n'avaient pas été comptabilisées sous une forme explicite, mais parmi les autres frais divers de gestion en 2003 et les honoraires rétrocédés en 2004 ; qu'au regard de ces éléments, l'administration rapporte la preuve d'une volonté délibérée d'éluder l'impôt, constitutive de la mauvaise foi au sens de l'article 1729 du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Pascal A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Copie sera adressée au directeur de contrôle fiscal Nord.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 10DA00013
Date de la décision : 27/01/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Appeche-Otani
Rapporteur ?: M. Antoine Durup de Baleine
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : MICHALLON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2011-01-27;10da00013 ?
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