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07/07/2011 | FRANCE | N°09DA01018

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 07 juillet 2011, 09DA01018


Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2009 par télécopie et régularisée par la production de l'original le 13 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE, représentée par son président-directeur général en exercice et dont le siège est Quai Johannès Couvert, Hangar 17 au Havre (76600), par Me Hubert, avocat ; la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801249 du 7 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande

tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 25 avril 2008 par...

Vu la requête, enregistrée le 10 juillet 2009 par télécopie et régularisée par la production de l'original le 13 juillet 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE, représentée par son président-directeur général en exercice et dont le siège est Quai Johannès Couvert, Hangar 17 au Havre (76600), par Me Hubert, avocat ; la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801249 du 7 mai 2009 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 25 avril 2008 par laquelle le directeur d'exploitation du port autonome du Havre a validé son dossier de conformité avec les dispositions de l'arrêté du 8 octobre 2007 en conditionnant cette validation à certaines modalités dont le retour à une organisation du travail par périodes de sept jours (en 7/7), l'obligation faite aux marins de descendre à terre après quinze heures de présence à bord et l'obligation de transmettre par télécopie à l'administration, à chaque changement d'équipage, le détail des marins présents et, d'autre part, à ce que le port autonome du Havre lui paye la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler la décision du président du grand port maritime du Havre du 25 avril 2008 en ce qu'elle conditionne son dossier de conformité avec les dispositions de l'arrêté du 8 octobre 2007 en conditionnant cette validation à certaines modalités dont le retour à une organisation du travail par périodes de sept jours (en 7/7), l'obligation faite aux marins de descendre à terre après quinze heures de présence à bord et l'obligation de transmettre par télécopie à l'administration, à chaque changement d'équipage, le détail des marins présents ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 25 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ;

Vu le décret n° 77-884 du 22 juillet 1977 portant règlement général de police des ports maritimes de commerce et de pêche ;

Vu le décret n° 2005-305 du 31 mars 2005 relatif à la durée du travail des gens de mer ;

Vu l'arrêté du 6 janvier 2006 portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la convention collective nationale des personnels navigants d'exécution des entreprises de remorquage maritime, ensemble l'accord-cadre du 2 décembre 2005 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail des personnels navigants d'exécution des entreprises de remorquage maritime ;

Vu l'arrêté du 6 janvier 2006 portant extension d'un accord conclu dans le cadre de la convention collective nationale des personnels navigants officiers des entreprises de remorquage maritime, ensemble l'accord-cadre du 2 décembre 2005 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail des personnels navigants officiers des entreprises de remorquage maritime ;

Vu l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime du 8 octobre 2007 définissant les conditions de l'agrément et de l'exercice du remorquage portuaire dans les ports du Havre et du Havre-Antifer ;

Vu le code du travail maritime ;

Vu le code des ports maritimes ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;

Sur les interventions du Syndicat maritime de Normandie CFDT et de M. B :

Considérant, d'une part, que l'intervention du Syndicat maritime de Normandie CFDT n'est pas motivée ; qu'elle n'est, par suite, pas recevable ;

Considérant, d'autre part, que M. B, salarié de la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE et représentant du Syndicat maritime de Normandie CFDT au sein de cette entreprise, a intérêt au maintien du jugement et de la décision attaqués ; qu'ainsi, son intervention est recevable ;

Sur les conclusions en annulation :

Considérant que, par une décision du 25 juillet 2005, le directeur général du port autonome du Havre, sur le fondement alors applicable d'un arrêté du préfet de la Seine-Maritime du 25 août 1981 portant réglementation de l'exercice du remorquage maritime dans le port du Havre-Antifer, a, pour une durée de cinq ans, agréé la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE pour l'exercice du remorquage dans ce port maritime ; que, par arrêté du 8 octobre 2007, pris sur le fondement des dispositions de l'article R. 351-2 du code des ports maritimes alors applicable et se substituant à celui susmentionné du 25 août 1981, le préfet de la Seine-Maritime a défini les conditions de l'agrément et de l'exercice du remorquage portuaire dans les ports du Havre et du Havre-Antifer ; que le deuxième alinéa de l'article 4 de cet arrêté prévoit que les entreprises bénéficiant d'un agrément pour l'exercice du remorquage à la date d'entrée en vigueur du présent arrêté disposent d'un délai de 3 mois, terme de rigueur, pour se mettre en conformité avec les dispositions du présent arrêté et déposer un dossier justifiant de cette conformité ; que, le 7 janvier 2008, la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE a déposé auprès du Port autonome du Havre, devenu le grand port maritime du Havre, le dossier prévu par les dispositions précitées, tendant à ce qu'il soit constaté que les conditions d'exercice de son activité par cette société dans ce port sont conformes aux exigences de l'arrêté du 8 octobre 2007 ; que, par une décision du 25 avril 2008, le directeur général du port autonome du Havre a attesté de cette conformité mais toutefois subordonné cette dernière, d'une part, à la condition qu'il soit mis fin à compter du 24 avril 2008 à l'organisation du travail prévoyant quatorze jours d'embarquement et quatorze jours à terre initialement prévue par le dossier présenté par la société et à laquelle cette dernière, par lettre du 23 avril 2008, avait indiqué renoncer pour revenir à un système d'organisation du travail par cycles de sept jours d'embarquement et de sept jours à terre, d'autre part, à la condition que la relève d'équipage à l'issue d'une journée de travail de quinze heures se traduise par la montée à bord d'un nouvel équipage et le débarquement physique de l'équipage ayant achevé cette journée de travail et, enfin, à la condition que la société transmette par télécopie à l'administration des affaires maritimes et au port autonome, à l'occasion de chaque relève physique d'équipage sur chacun des remorqueurs, la liste nominative de l'équipage prenant son service et de celui le quittant ; que la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande dirigée contre cette décision du 25 avril 2008, en ce qu'elle conditionne la validation du dossier présenté par la société à ces conditions ;

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) - subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000 : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de la présentation, le 7 janvier 2008, de son dossier de conformité, la société requérante a été avisée du sens d'un avis rendu par l'inspecteur du travail maritime le 11 février 2008 et qu'elle a présenté des observations écrites par lettre du 15 février 2008, ayant pour objet de réfuter les critiques émises par cet avis sur la compatibilité de l'organisation du travail de l'entreprise avec les dispositions de l'arrêté préfectoral du 8 octobre 2007 ainsi que sur le respect par la société des dispositions conventionnelles relatives à la durée du travail résultant des accords cadres susvisés du 2 décembre 2005 ; que ces observations ont été complétées par lettre du 19 février 2008 ; qu'à la suite d'une réunion du 29 février 2008 en présence de représentants du port autonome du Havre, la société requérante a présenté de nouvelles observations écrites par lettre du 5 mars 2008 ; qu'à l'occasion d'une réunion s'étant tenue le 22 avril 2008, la société a été informée de l'avis émis le 18 avril 2008 par le directeur interdépartemental des affaires maritimes Seine-Maritime et Eure, à la suite duquel elle a présenté de nouvelles observations écrites par lettre du 23 avril 2008, ayant notamment pour propos d'établir le mal fondé des conditions mises par cet avis à la validation du dossier de conformité présenté et qui sont celles ensuite reprises par la décision du 25 avril 2008, dont il ressort des énonciations que son auteur avait pris connaissance de cette lettre du 23 avril 2008 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'au cours de l'instruction du dossier dont s'agit, la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE a été mise à même, à plusieurs reprises, de présenter des observations tant écrites qu'orales ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut de caractère contradictoire de cette instruction, qui doit être regardé comme tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000, doit être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

S'agissant de la condition tenant à l'abandon d'une organisation du travail sous la forme de cycles de quatre semaines :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 351-1, alors applicable, du code des ports maritimes : Sans préjudice de l'application des dispositions des titres Ier, II et III du présent livre, la police des ports qui relèvent de la compétence de l'Etat ou des ports départementaux est régie, à l'intérieur des limites des ports définies dans les conditions prévues à l'article R. 151-1, par le règlement général de police des ports maritimes de commerce et de pêche reproduit en annexe au présent code ; qu'aux termes de l'article R. 351-2, alors applicable, du même code : Indépendamment des dispositions du règlement général, des règlements particuliers peuvent être établis pour chaque port en tant que de besoin. / Les règlements particuliers sont pris par le préfet pour les ports relevant de la compétence de l'Etat, après avis du conseil d'administration du port en ce qui concerne les ports autonomes, du ou des concessionnaires en ce qui concerne les autres ports. Ils sont pris par le président du conseil général, après du ou des concessionnaires, pour les ports départementaux. Ils sont pris par le préfet maritime, pour la navigation dans les chenaux d'accès ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 10 du règlement général de police des ports maritimes de commerce et de pêche : L'exercice du remorquage et du lamanage des bâtiments est subordonné à l'agrément du directeur du port, tant en ce qui concerne le personnel que le matériel. Les conditions en sont fixées par les règlements particuliers ; que, selon l'article 2 de l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime du 8 octobre 2007 définissant les conditions de l'agrément et de l'exercice du remorquage portuaire dans les ports du Havre et du Havre-Antifer : Sans préjudice des réglementations en vigueur, l'obtention et le maintien de l'agrément, prévu à l'article 10 du règlement général de police, pour l'exercice du remorquage dans les ports du Havre et du Havre-Antifer, par le directeur du port sont subordonnés aux conditions suivantes : / (...) / les effectifs et l'organisation du travail doivent permettre de satisfaire aux besoins de veille permanente et du service minimum de sécurité définis en annexe au présent arrêté ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées qu'il appartient au directeur général du port autonome du Havre, dans l'exercice de ses prérogatives relatives à l'obtention et au maintien de l'agrément pour l'exercice du remorquage portuaire dans les ports du Havre et du Havre-Antifer, notamment en ce qui concerne le personnel, de s'assurer du respect, par les entreprises de remorquage, des conditions d'effectifs et d'organisation du travail permettant, au regard et dans le respect des exigences du droit du travail maritime, de satisfaire aux besoins de veille permanente et du service minimum de sécurité ; qu'il en résulte qu'en subordonnant le maintien de l'agrément délivré en 2005 à la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE à l'adoption par cette entreprise ou au retour de cette dernière à des modalités d'organisation du travail propres à assurer le respect du droit du travail maritime et notamment des règles relatives à la durée hebdomadaire maximale de travail effectif sur les remorqueurs portuaires, le directeur général du port autonome du Havre n'a pas méconnu l'étendue de la compétence qu'il tient de l'article 10 du règlement général de police des ports maritimes de commerce et de pêche, ni n'a méconnu l'arrêté précité du 8 octobre 2007 ;

Considérant, d'autre part et en premier lieu, qu'aux termes de l'article 24 du code du travail maritime : Les durées légales hebdomadaire et quotidienne du travail effectif des marins sont celles qui sont fixées par l'article L. 212-1 du code du travail (...) sauf dérogation à la durée quotidienne du travail dans les conditions fixées par décret ; que, selon l'article 25 du même code : Des décrets en conseil des ministres déterminent, le cas échéant, par genre de navigation ou catégorie de personnel les modalités d'application de l'article 24. Ils fixent notamment l'aménagement et la répartition des horaires de travail dans la semaine ou dans une période de temps autre que la semaine, pour tenir compte de la continuité de l'activité du navire, des contraintes portuaires et des nécessités de la sauvegarde de la sécurité des biens et des personnes en mer et aux ports. Ils fixent également les mesures de contrôle des heures de travail et de repos et de la durée du travail effectif ainsi que la procédure suivant laquelle les dérogations sont accordées ou utilisées. / (...) / Il peut être dérogé par convention ou accord collectif étendus ou par accord collectif d'entreprise ou d'établissement à celles des dispositions de ces décrets qui sont relatives à l'aménagement et à la répartition des horaires de travail pour tenir compte des contraintes propres aux diverses activités maritimes ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 31 mars 2005 relatif à la durée du travail des gens de mer : I. - Est considéré comme temps de travail effectif le temps pendant lequel le personnel embarqué est, par suite d'un ordre donné, à la disposition du capitaine, hors des locaux qui lui servent d'habitation à bord. / (...) / III. - A bord des remorqueurs (...), chaque heure de présence à bord, à la disposition du capitaine, est considérée comme une heure de travail effectif, des accords collectifs étendus déterminant dans quelles conditions des temps de pause ou de repos peuvent en être défalqués. / Toutefois, pour le calcul des repos compensateurs prévus par l'article 26-1 du code du travail maritime et pour l'application des dispositions du présent décret relatives aux durées maximales du travail, le temps de travail effectif est le temps pendant lequel le personnel est, par suite d'un ordre donné, à la disposition du capitaine, hors des locaux d'habitation à bord ; qu'aux termes de l'article 4 de ce décret : La durée maximale quotidienne de travail effectif à bord des navires autres que de pêche est de douze heures. / Lorsque le travail est organisé par cycles en application de l'article 13 et que la durée totale du cycle ne dépasse pas six semaines, la durée maximale quotidienne de travail est décomptée d'après le nombre d'heures moyen du cycle de travail, sans pouvoir dépasser quatorze heures pour une journée de travail donnée. / Cette durée moyenne peut dépasser douze heures et atteindre une limite maximale de quatorze heures en application d'un accord ou d'une convention collective (...) ; que, selon l'article 6 de ce même décret : I. - La durée maximale quotidienne de travail, fixée en application de l'article 24 du code du travail maritime ou résultant du présent décret, peut être dépassée et atteindre la limite maximale de quatorze heures, conformément à une convention ou un accord collectif, dans les cas suivants : / (...) / 2° A bord des remorqueurs et des chalands qui ne sortent pas des ports et des rades ou de la partie maritime des fleuves et des rivières ; / (...) / II. - Pour assurer la continuité du service de veille et de sécurité, dans les ports et les rades, à bord des remorqueurs qui ne sortent pas des ports et rivières ou de la partie maritime des fleuves et rivières, un accord national étendu ou une convention collective de branche étendue peuvent, dans le cadre d'une organisation du travail par cycles, porter cette limite à seize heures, sous réserve que la durée maximale quotidienne de travail fixée à l'article 4 soit respectée en moyenne sur une période de quarante-huit heures consécutives (...) ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 7 de ce décret du 31 mars 2005 : (...) la durée maximale de travail ne doit pas dépasser soixante-douze heures par période de sept jours. / Lorsque le travail à bord est organisé par cycles en application de l'article 13, la durée maximale de travail par période de sept jours peut être dépassée, dans la mesure où cette possibilité est prévue par convention ou accord collectif. Cette durée maximale doit être respectée en moyenne sur le cycle. Elle ne peut dépasser quatre-vingt heures par période de sept jours (...) ; que, selon l'article 13 dudit décret : Le travail peut être organisé sous forme de cycles alternant périodes d'embarquement et périodes à terre. / Dans ce cas, une convention ou accord collectif, ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir que la durée hebdomadaire du travail mentionnée à l'article 24 du code du travail maritime et le décompte des heures supplémentaires s'apprécient sur une période de deux semaines consécutives ou sur un cycle d'une durée maximale de six semaines ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article II-1, relatif aux cycles de travail, de chacun des accords-cadres susvisés du 2 décembre 2005 : A bord des remorqueurs relevant du présent accord la durée de travail peut être organisée sous forme de cycles de travail dès lors que sa répartition, à l'intérieur d'un cycle, se répète à l'identique d'un cycle à l'autre. / Les partenaires sociaux sont expressément convenus que : / - la durée maximum du cycle est de six semaines consécutives ; / - la durée moyenne maximale du travail est fixée à 44 heures : - la durée maximale journalière est fixée à 14 heures (sous réserve des dispositions particulières du présent accord qui permettent de porter cette durée à seize heures). / Lorsque sont organisés des cycles de travail, dans la limite des six semaines consécutives prévues par le présent accord collectif, seules sont considérées comme heures supplémentaires, celles de ces heures qui dépassent la durée moyenne de trente-cinq heures calculée sur la durée du cycle de travail ; qu'aux termes de l'article II-2, relatif aux durées maximales de travail, de chacun de ces accords-cadres : La durée normale de travail effectif est fixé à 8 heures par jour. / Elle peut être portée à 12 heures. Cependant par dérogations et pour certaines organisations du travail au port elle peut être portée à 14 heures voire à 16 heures conformément aux dispositions particulières concernant les remorqueurs portuaires visées aux articles 5 et 6, du décret n° 2005-305 du 31 mars 2005 et moyennant les mesures compensatoires minimales visées aux paragraphes III-2-1, III-2-2 et III-3-2 du présent accord ; / La durée hebdomadaire maximum de travail effectif sur les remorqueurs portuaires est fixée à 48 heures ; / la durée annuelle maximale de travail effectif est de 1 730 heures ;

Considérant qu'il résulte clairement des stipulations précitées qui, pour les personnels navigants des entreprises de remorquage maritime, sont plus favorables que celles résultant du décret précité du 31 mars 2005, que la durée hebdomadaire maximale de travail effectif sur les remorqueurs portuaires, plafonnée à soixante-douze heures par les dispositions précitées de l'article 7 de ce décret, est fixée à quarante-huit heures et que cette durée hebdomadaire maximale, en l'absence de stipulations contraires en prévoyant autrement, s'applique notamment en cas d'organisation du travail sous forme de cycles de travail ; que cette durée maximale de quarante-huit heures, qui n'est pas une durée moyenne, est distincte tant de la durée moyenne maximale de quarante-quatre heures prévue par l'article II.1 précité que de la durée, de trente-cinq heures, prévue à l'article 24 du code du travail maritime et reprise au deuxième alinéa de l'article 13 du décret du 31 mars 2005 ainsi qu'au dernier alinéa de l'article II-1 des accords-cadres du 2 décembre 2005, laquelle durée de trente-cinq heures n'est pas une durée maximale de travail ; que le respect de cette durée maximale hebdomadaire de quarante-huit heures doit alors s'apprécier sur chaque semaine du cycle de travail ; qu'en cas d'organisation du travail par cycles de travail, aucune des stipulations des accords-cadres du 2 décembre 2005 n'en prévoit autrement ; qu'ainsi, la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE n'est pas fondée à prétendre qu'en cas d'organisation du travail sous forme de cycles de travail, demeurerait applicable la durée hebdomadaire maximale de soixante-douze heures prévue par l'article 7 du décret du 31 mars 2005, mais serait inapplicable la durée maximale de quarante-huit heures prévue par les stipulations des articles II.2 des accords cadres du 2 décembre 2005 ;

Considérant, en cinquième lieu, que le titre III des accords cadres du 2 décembre 2005 fixe le cadre général de l'organisation du travail selon les modes d'organisation (...) du service en vigueur , dans les cas où il est dérogé aux règles générales relatives à la durée maximale quotidienne du travail ou aux règles relatives au fractionnement du repos quotidien exposés au titre II des accords ; que ce titre III distingue un service discontinu au port, applicable dans les ports dont l'activité nautique dépend des fluctuations de la marée ou de la discontinuité du trafic, et un service continu au port, prévalant dans les ports dont l'activité nautique ne dépend pas des fluctuations de la marée et qui requiert une mobilisation permanente des moyens de remorquage ; que ce service continu se caractérise par un service ininterrompu ou continu du remorqueur, impliquant la présence permanente d'un équipage à bord ; qu'il ressort des pièces du dossier que les ports du Havre et du Havre Antifer relèvent, s'agissant du remorquage, d'un service continu au port ; que l'arrêté susvisé du préfet de la Seine-Maritime du 8 octobre 2007 impose des obligations de veille permanente et un service minimum de sécurité ; que sont ainsi notamment applicables dans ce port l'article III-2.1 des accords du 2 décembre 2005, relatif à la modulation de l'amplitude journalière du travail en régime d'armement continu du remorqueur et qui conditionne le recours à une organisation cyclique du travail comportant des périodes de présence / travail à bord ou à proximité d'une durée quotidienne supérieure à douze heures à la conclusion d'accords d'entreprise ; qu'y sont également applicables les stipulations de l'article III-2.2, relatif à l'armement cyclique à un équipage à bord et qui couvre le cas où le service quotidien des remorqueurs portuaires est assuré de façon continue par un équipage, selon un aménagement cyclique du temps de travail faisant alterner, sur le cycle et pour chaque équipage tour à tour, une période de travail et une période de repos à terre ; que, dans ce cas, l'article III-2.2 impose le respect impératif de conditions, dont celle énoncée au quatrième alinéa, en ces termes : la durée hebdomadaire du travail effectif au cours d'une même semaine peut être portée à quarante-huit heures (48 h) dans le respect d'une durée moyenne de quarante-deux heures (42 h) sur une période quelconque de 6 semaines consécutives ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'organisation par cycles de travail présentée par la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE dans le dossier susmentionné du 7 janvier 2008 faisait se succéder des périodes d'embarquement d'une durée de quatorze jours et des périodes à terre de même durée ; que, s'agissant des périodes d'embarquement, cette organisation du travail présentait des durées effectives hebdomadaires de travail de soixante-dix heures ; qu'ainsi, ladite organisation, alors même qu'elle respectait la durée moyenne maximale de quarante-quatre heures, appréciée sur l'ensemble d'un cycle de quatre semaines, prévue par les stipulations de l'article II.1 des accords cadres du 2 décembre 2005, méconnaissait la durée hebdomadaire maximale de quarante-huit heures imposée par celles de l'article II.2 de ces mêmes accords ; qu'elle méconnaissait également les stipulations précitées du quatrième alinéa de l'article III-2.2 de ces accords, imposant en particulier le respect d'une durée hebdomadaire du travail effectif de quarante-huit heures en cas de service continu au port assuré par un équipage selon un aménagement cyclique du temps de travail faisant alterner, sur le cycle et pour chaque équipage tour à tour, une période de travail et une période de repos à terre ; que la société requérante n'est donc pas fondée à prétendre qu'en conditionnant la validation de ce dossier à l'abandon de l'organisation du travail ainsi présentée, le directeur général du port autonome du Havre a commis une erreur de droit ;

S'agissant de la condition tenant à l'obligation, à l'issue d'une période de travail de 15 heures à bord, de débarquer l'équipage ayant achevé cette période :

Considérant, en premier lieu, que, si la décision du 25 avril 2008 énonce que la relève d'équipage au bout de la journée de travail, quinze heures pour tous les équipages conformément à votre dossier, se traduit par la montée à bord d'un nouvel équipage et par le débarquement de l'équipage finissant ces 15 heures , de telles énonciations ont seulement pour objet d'imposer une obligation à la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE ; qu'en revanche, elles n'ont ni pour objet, ni pour effet d'interdire à un marin d'un remorqueur de cette société, après avoir achevé une telle période de travail d'une durée de quinze heures, de rester à bord s'il en exprime le souhait et ce, sans préjudice de la décision de son employeur sur le fait d'accéder, ou non, à un tel souhait, comme des contraintes inhérentes à l'espace disponible dans un remorqueur portuaire et propres à limiter les conditions d'exercice de la liberté des marins de choisir de rester à bord dont fait état la société requérante ; qu'il en résulte que le moyen tiré d'une méconnaissance de la liberté des marins de choisir de rester à bord après quinze heures d'embarquement doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en faisant état d'une journée de travail de quinze heures pour tous les équipages, la décision du 25 avril 2008 se borne, ainsi qu'elle l'indique elle-même, à mentionner ce qui résulte du dossier présenté par l'entreprise, sans remettre en cause cette durée ; qu'elle ne fait pas non plus obstacle à l'application des stipulations de l'article III-2.1 des accords du 2 décembre 2005, relatifs à la modulation de l'amplitude journalière en régime d'armement continu du remorqueur et qui prévoient que des accords d'entreprise pourront définir une organisation cyclique du temps de travail comportant des périodes de présence/travail à bord ou à proximité, au service de celui-ci, d'une durée quotidienne supérieure à douze heures ; que le moyen tiré d'une erreur de droit au regard de ces stipulations doit, dès lors, être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que les obligations de veille permanente et du service minimum de sécurité sont définies par l'article 3 de l'annexe à l'arrêté préfectoral du 8 octobre 2007 portant conditions d'agrément et d'exercice du remorquage portuaire dans les ports du Havre et du Havre-Antifer ; que la décision du 25 avril 2008, qui n'ajoute à cet égard rien à ce qui résulte de cet arrêté, constate que le dossier présenté par la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE est en conformité avec les exigences fixées par l'arrêté du 8 octobre 2007 ; que, si elle impose à la requérante, à l'issue d'une période de travail de quinze heures, de débarquer l'équipage et d'embarquer un équipage distinct, comme d'en justifier, cette condition, qui est nécessaire au respect effectif de ces obligations de veille permanente et du service minimum de sécurité, n'a eu pour objet que de s'assurer de ce respect et ne procède pas d'une inexacte interprétation de ces exigences ; que, par suite, le moyen tiré, sur ce point, d'une erreur de droit au regard de l'arrêté préfectoral du 8 octobre 2007 doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que, par suite, les conclusions présentées à ce titre par la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE, conclusions d'ailleurs dirigées contre l'Etat lequel n'est pas partie à l'instance, ne peuvent être accueillies ;

Considérant, d'autre part, que M. B, qui n'est qu'intervenant, n'a pas la qualité de partie à la présente instance ; que, dès lors, ses conclusions tendant à ce que la société requérante lui verse une somme au titre des frais non compris dans les dépens ne peuvent davantage être accueillies ;

Considérant, enfin, qu'il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE la somme que demande le Grand port maritime du Havre au même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention du Syndicat maritime de Normandie CFDT n'est pas admise.

Article 2 : L'intervention de M. B est admise.

Article 3 : La requête de la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE est rejetée.

Article 4 : Les conclusions présentées par le grand port maritime du Havre au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Les conclusions présentées par M. B au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE, à Me Béatrice A, es qualité de liquidateur judiciaire de la SOCIETE NOUVELLE DE REMORQUAGE DU HAVRE, au grand port maritime du Havre, à M. Alain B et au Syndicat maritime de Normandie CFDT.

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N°09DA01018 9


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 09DA01018
Date de la décision : 07/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Police administrative - Polices spéciales - Polices des ports (voir Ports).

Ports - Police des ports.


Composition du Tribunal
Président : Mme Appeche-Otani
Rapporteur ?: M. Antoine Durup de Baleine
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : CABINET CLIFFORD CHANCE EUROPE LLP

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2011-07-07;09da01018 ?
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