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20/11/2012 | FRANCE | N°12DA00542

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 20 novembre 2012, 12DA00542


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 6 avril 2012 et régularisée par la production de l'original le 27 avril 2012 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Asje A née B, demeurant ..., par Me Thieffry, avocate ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106212 du 24 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 25 janvier 2011, par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a notifié l'obligation de quitte

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Vu la requête, enregistrée par télécopie le 6 avril 2012 et régularisée par la production de l'original le 27 avril 2012 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Asje A née B, demeurant ..., par Me Thieffry, avocate ; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106212 du 24 janvier 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 25 janvier 2011, par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a notifié l'obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et, à défaut pour elle d'y satisfaire, a fixé le pays dont elle a la nationalité ou tout autre pays dans lequel elle serait légalement admissible comme destination de sa reconduite d'office à la frontière ;

2°) d'annuler l'arrêté, en date du 25 janvier 2011, par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a notifié l'obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et, à défaut pour elle d'y satisfaire, a fixé le pays dont elle a la nationalité ou tout autre pays dans lequel elle serait légalement admissible comme destination de sa reconduite d'office à la frontière ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire, ou à défaut, de procéder à un réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 2 891,93 euros, sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifiés ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Gaspon, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

1. Considérant, en premier lieu, que, si Mme A soutient, sur le fondement de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 susvisée, que la motivation de la décision attaquée est insuffisante, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué comporte la mention des motifs de droit et des circonstances de fait qui en constituent le fondement ;

2. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier et complet de la situation de la requérante ;

3. Considérant, en troisième lieu, que, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que Mme A a présenté sa demande de titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le préfet n'était pas tenu de saisir, pour avis, le médecin de l'agence régionale de santé avant de prendre la décision de refus de séjour dont l'annulation est demandée ; qu'il ne ressort, par ailleurs, d'aucune pièce du dossier que le préfet, à qui il appartenait toutefois en application des dispositions expresses de l'article L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile d'apprécier si l'intéressée pouvait se voir délivrer un titre de séjour sur un autre fondement, n'aurait pas tenu compte des documents médicaux transmis par Mme A avant de prendre la décision de refus de séjour attaquée ;

4. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7°A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; que Mme A, née en 1965, est entrée en France en 2005 en compagnie de son époux et de trois de leurs enfants, nés en 1989, 1992 et 1994, afin d'y solliciter l'asile politique ; qu'elle n'est pas isolée dans son pays d'origine où résident deux de ses filles ; que son époux et ses autres enfants font également l'objet d'un refus de séjour en France ; qu'elle ne justifie pas avoir constitué des liens privés d'une intensité propre à faire regarder la France comme le centre de ses intérêts privés ou professionnels, ni que son état de santé requière son maintien en France ; qu'il ressort également des pièces du dossier que la scolarité en France des trois enfants est interrompue ou présente des difficultés d'intégration ;

5. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, par la décision attaquée, le préfet du Nord a commis une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de Mme A ;

6. Considérant, en sixième lieu, que, s'il appartenait au préfet, en application des dispositions expresses de l'article L. 742-7 du code précité, d'apprécier si l'intéressée pouvait se voir délivrer un titre de séjour en raison de son état de santé, Mme A n'établit pas, par le seul certificat médical produit et établi le 21 mars 2012, que le syndrome de stress post-traumatique dont elle est atteinte pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;

7. Considérant, en septième lieu, que s'il appartenait au préfet, en application des dispositions expresses de l'article L. 742-7 du code précité, d'apprécier si l'intéressée pouvait se voir délivrer un titre de séjour pour des motifs humanitaires, Mme A n'établit pas devoir bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour pour de tels motifs alors qu'elle ne justifie pas de son intégration en France ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

8. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation " ; qu'aux termes de l'article L. 311-4 du 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La détention d'un récépissé d'une demande de délivrance ou de renouvellement d'un titre de séjour, d'un récépissé d'une demande d'asile ou d'une autorisation provisoire de séjour autorise la présence de l'étranger en France sans préjuger de la décision définitive qui sera prise au regard de son droit au séjour. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 311-4 du même code : " Il est remis à tout étranger admis à souscrire une demande de première délivrance ou de renouvellement de titre de séjour un récépissé qui autorise la présence de l'intéressé sur le territoire pour la durée qu'il précise(...) " ; que, contrairement à ce que soutient la requérante et ainsi qu'il a été précédemment dit, la décision du préfet du Nord refusant de l'admettre au séjour après avoir examiné de manière complète sa demande n'est pas entachée d'illégalité ; que, dès lors, la décision portant obligation de quitter le territoire français, prise en application des dispositions de l'article L. 511-1 précité, n'est pas dépourvue de base légale ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que, pour les raisons indiquées précédemment, Mme A ne pouvant prétendre à la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " le préfet a pu, sans erreur de droit, prononcer la mesure d'éloignement attaquée ;

10. Considérant, en troisième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux retenus en ce qui concerne le refus de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante ;

11. Considérant, en dernier lieu, que, si Mme A soutient que l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elle ne justifie pas des menaces directes et personnelles encourues en cas de retour au Kosovo, qu'elle a quitté en 1999, alors que sa situation a déjà été examinée à deux reprises par l'office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la cour nationale du droit d'asile ; que le préfet a sommairement, mais suffisamment, motivé sa décision sur ce point en rappelant les conditions du rejet de sa demande d'asile politique ; que, par ailleurs, la requérante n'établit pas que le syndrome post-traumatique dont elle souffre résulterait de persécutions subies personnellement au Kosovo avant 1999 ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

12. Considérant que les décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français opposées à Mme A par le préfet du Nord ne sont entachées d'aucune illégalité ; que, par suite, Mme A n'est pas fondée à exciper de leur illégalité à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;

13. Considérant que, pour les raisons précédemment développées, Mme A n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

14. Considérant que Mme A a indiqué, dans la demande de titre de séjour déposée à la préfecture du Nord, qu'elle était de nationalité " Serbie-Montenegro-Kosovarde " ; que, cette déclaration lui étant opposable, le préfet a rappelé cette nationalité dans sa décision puis a ordonné l'éloignement de l'intéressée à destination du pays de sa nationalité ou de tout autre où elle établirait être légalement admissible ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif a jugé que la décision du préfet désigne avec une précision suffisante le pays à destination duquel Mme A doit être reconduite ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 24 janvier 2012, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

16. Considérant qu'aux termes de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée : " Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. " ;

17. Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par Mme A en faveur de son avocat doivent, dès lors, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Asje A née B et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Nord.

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N°12DA00542


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 12DA00542
Date de la décision : 20/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Olivier Gaspon
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : AVOCATS DU 37

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2012-11-20;12da00542 ?
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