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04/04/2013 | FRANCE | N°12DA01403

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 04 avril 2013, 12DA01403


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 14 septembre 2012 et régularisée par la production de l'original le 17 septembre 2012, présentée pour M. B...D..., demeurant..., par MeA... ; M. D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200792-1200795 du 29 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 8 novembre 2011 du préfet de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoi

re français dans un délai de 30 jours et fixant le pays de destination ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai par télécopie le 14 septembre 2012 et régularisée par la production de l'original le 17 septembre 2012, présentée pour M. B...D..., demeurant..., par MeA... ; M. D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200792-1200795 du 29 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 8 novembre 2011 du préfet de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixant le pays de destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à la SELARL A...-Inquimbert dans les conditions prévues par l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller ;

1. Considérant que par une décision du 21 mars 2006 de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 14 février 2007 de la Cour nationale du droit d'asile, la demande de M. D...d'admission au séjour au titre de l'asile a été rejetée ; que par un jugement du 12 juillet 2011, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 octobre 2010 de l'office français de protection des réfugiés et apatrides refusant de lui reconnaître la qualité d'apatride ; que M. D... a sollicité, le 19 juillet 2011, son admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que M. D... relève appel du jugement du 29 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 novembre 2011 du préfet de la Seine-Maritime refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et fixant le pays de destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée, qui comporte les considérations de droit sur lesquelles elle se fonde, mentionne également les considérations de fait relatives à la situation personnelle et familiale de M.D..., au regard notamment de son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que si M.D..., qui est né à Aïguestan ancienne république socialiste soviétique d'Azerbaïdjan devenue république d'Azerbaïdjan, de parents d'origine arménienne, soutient que la décision attaquée est entachée d'une erreur de fait en ce qu'elle mentionne qu'il est de nationalité arménienne, il ressort toutefois de l'examen de la décision en litige que celle-ci précise que l'intéressé est d'origine arménienne ; que par suite, le moyen de M. D...tiré de l'erreur de fait commise par le préfet manque en fait ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française, ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. D...est entré irrégulièrement sur le territoire français en août 2005 ; que si l'intéressé fait valoir qu'il entretient une relation amoureuse avec Mme C..., avec laquelle il a eu un enfant né le 7 décembre 2010 sur le territoire français et qui est enceinte d'un deuxième enfant, il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme C..., de nationalité arménienne, est également en situation irrégulière et fait l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français, par un arrêté du 8 novembre 2011 du préfet de la Seine-Maritime ; que M. D...n'établit pas de l'impossibilité de poursuivre sa vie familiale hors de France avec la mère de son enfant et sa fille ; que ses liens personnels en France ne peuvent être regardés comme intenses, anciens et stables alors qu'il a vécu jusqu'à l'âge de 29 ans au sein de la fédération de Russie puis en Arménie où il n'établit pas être isolé ; que la seule circonstance qu'il soit titulaire d'une promesse d'embauche en qualité d'installateur de cuisine n'est pas de nature à établir la réalité de l'insertion professionnelle et sociale dont il se prévaut ; que dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour de M. D... en France, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour par sa décision contestée, porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. D...;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des autorités administratives ou des juridictions, l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale " ; qu'eu égard au jeune âge de la fille de M.D..., à la durée et aux conditions de séjour en France de ses parents et à la circonstance que, par elle-même, la décision de refus de séjour n'implique ni la séparation de M. D...de sa fille ni l'éclatement de la cellule familiale, dont il n'est pas établi qu'elle ne puisse se reconstituer dans un autre pays, la décision en litige ne peut être regardée comme méconnaissant les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

6. Considérant, enfin, que les stipulations de l'article 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant créent seulement des obligations entre États sans ouvrir de droits aux particuliers ; que par suite, M. D...ne peut utilement s'en prévaloir ;

Sur la décision faisant obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du sixième considérant de la directive 2008/115/CE susvisée : " Les États membres devraient veiller à ce que, en mettant fin au séjour irrégulier de ressortissants de pays tiers, ils respectent une procédure équitable et transparente. Conformément aux principes généraux du droit de l'Union européenne, les décisions prises en vertu de la présente directive devraient l'être au cas par cas et tenir compte de critères objectifs, ce qui implique que l'on prenne en considération d'autres facteurs que le simple fait du séjour irrégulier " ; qu'aux termes de l'article 1er de ladite directive : " La présente directive fixe les normes et procédures communes à appliquer dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, conformément aux droits fondamentaux en tant que principes généraux du droit communautaire ainsi qu'au droit international, y compris aux obligations en matière de protection des réfugiés et de droits de l'homme " ; qu'aux termes de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / 2. Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) " ;

8. Considérant qu'à l'appui de son moyen tiré de l'absence de procédure contradictoire préalable à la décision d'éloignement, M. D...se prévaut de la directive 2008/115/CE et notamment de son article 1er en tant qu'il fait référence aux sources dont s'inspirent les normes et procédures communes applicables aux Etats et de son 6ème considérant concernant la mise en place d'une " procédure équitable et transparente " ; que s'il soutient que la transposition de la directive 2008/115/CE en droit interne n'est pas correcte dès lors qu'elle ne s'inspire pas de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne comme " standard ", cette circonstance ne révèle toutefois pas, par elle-même, un défaut de transposition ; que, par ailleurs, compte tenu de cette transposition, il ne saurait utilement se prévaloir directement des dispositions de la directive à l'encontre de la décision attaquée ; qu'il résulte de ce qui précède que le moyen, tel qu'articulé, doit être écarté, sans qu'il soit nécessaire de saisir la cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles ;

9. Considérant, en second lieu, que pour les mêmes motifs que ceux retenus aux points 4, 5 et 6, la décision d'obligation de quitter le territoire français ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles des articles 3-1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée le 26 janvier 1990 et n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. D...;

Sur la décision fixant le pays de destination :

10. Considérant, en premier lieu, que la décision attaquée, qui prévoit que M. D... pourra être reconduit d'office à la frontière à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays pour lequel il établit être légalement admissible et qui précise qu'il est d'origine arménienne, est suffisamment motivée en fait ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime n'a pas procédé à un examen complet de la situation de M.D... ;

11. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

12. Considérant que M. D...ne produit aucun élément de nature à établir la réalité des risques personnels qu'il encourt en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'au demeurant, il ressort des pièces du dossier que sa demande d'asile a été rejetée par l'office français de protection des réfugiés et apatrides, par une décision du 21 mars 2006, confirmée par une décision du 14 février 2007 de la Cour nationale du droit d'asile ; qu'ainsi, le préfet, qui ne s'est pas senti en compétence liée, n'a ni méconnu les dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

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N°12DA01403

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N° "Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12DA01403
Date de la décision : 04/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. Nowak
Rapporteur ?: Mme Muriel Milard
Rapporteur public ?: Mme Baes Honoré
Avocat(s) : SELARL MARY INQUIMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2013-04-04;12da01403 ?
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