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04/06/2013 | FRANCE | N°12DA01003

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (bis), 04 juin 2013, 12DA01003


Vu la requête sommaire, enregistrée le 6 juillet 2012 et le mémoire complémentaire, enregistré le 17 août 2012 au greffe de la cour, présentés pour Mme A...D..., demeurant..., par Me C...B... ; Mme D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201586 du 12 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 9 février 2012, par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de procéder à la régular...

Vu la requête sommaire, enregistrée le 6 juillet 2012 et le mémoire complémentaire, enregistré le 17 août 2012 au greffe de la cour, présentés pour Mme A...D..., demeurant..., par Me C...B... ; Mme D...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201586 du 12 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 9 février 2012, par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de procéder à la régularisation administrative de sa situation dans le délai d'un mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifiés ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Gaspon, premier conseiller,

- et les observations de Me C...B..., pour Mme D...;

1. Considérant que Mme A...D..., ressortissante algérienne née en 1971, est entrée en France le 25 mai 2010 sous couvert d'un visa de 30 jours délivré par les autorités françaises et a épousé, le 20 novembre 2010 à Roubaix, M.D..., un compatriote titulaire d'une carte de résident ; que le préfet du Nord a refusé son admission au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination vers lequel elle doit être reconduite par un arrêté en date du 9 février 2012 ; que Mme D...relève appel du jugement du 12 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué :

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que, si Mme D...soutient, sur le fondement des articles 1er et 3 de la loi du 11 juillet 1979, que le refus de lui délivrer un titre de séjour est insuffisamment motivé, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué comporte la mention des motifs de droit et des circonstances de fait qui en constituent le fondement ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que, si la requérante a épousé le 20 novembre 2010 le père de trois enfants nés d'un précédent mariage, elle ne justifie d'aucun lien de particulière proximité avec ces enfants et n'établit pas que leur mère serait absente, rendant sa présence à leurs côtés indispensable ; que Mme D...n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté ce moyen ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5° au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme D..., épouse d'un résident algérien depuis le 20 novembre 2010, entre dans l'une des catégories pouvant ouvrir droit au regroupement familial ; que, par ailleurs, elle ne justifie pas d'une vie maritale antérieure au mariage ; qu'ainsi, eu égard à l'absence d'enfant issu de cette union, le préfet du Nord a pu, sans atteinte disproportionnée au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée, qui ne justifie pas d'une intégration sociale remarquable, prendre la décision de refus de séjour attaquée ;

5. Considérant, en dernier lieu, que, si MmeD..., en réponse aux observations en défense du préfet du Nord, a entendu soutenir que celui-ci a méconnu, par la décision attaquée, le 7° de l'article 6 de l'accord bilatéral franco-algérien et que son état de santé requiert son maintien en France alors qu'elle ne pourrait bénéficier de soins appropriés en Algérie, elle ne produit aucun élément ou certificat médical de nature à infirmer l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, en date du 26 octobre 2011, et à établir qu'elle ne pourrait bénéficier des soins appropriés dans son pays d'origine ou effectivement accéder aux soins nécessaires ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord bilatéral franco-algérien doit être écarté ; que, par ailleurs, le moyen d'appel tiré de la méconnaissance de l'article 7 de la directive 2008/115/CE susvisée est dépourvu de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

En ce qui concerne la décision faisant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 37 de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre ; 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé. / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) " ;

7. Considérant, en premier lieu, que, si Mme D...ne peut utilement invoquer les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 dès lors que les dispositions de l'article L. 511-1 précité prévoient une obligation particulière de motivation, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué comporte la mention des motifs de droit et des circonstances de fait qui en constituent le fondement, conformément aux exigences de l'article L. 511-1 précité ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que, pour les mêmes raisons qu'indiquées au point 3., le préfet du Nord n'a pas méconnu l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant susvisée en prenant à l'encontre de Mme D...la décision portant obligation pour cette dernière de quitter le territoire français ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'il appartient à l'autorité administrative qui envisage de procéder à l'éloignement d'un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; qu'il ressort des pièces du dossier que MmeD..., entrée en France en 2010 à l'âge de 39 ans, a épousé un compatriote, titulaire d'une carte de résident, le 20 novembre 2010 et que cette union est restée sans enfant ; qu'ainsi, eu égard à la brièveté du séjour et à l'absence d'enfant, le préfet du Nord n'a pas porté d'atteinte disproportionnée au respect de la vie privée et familiale de MmeD... ; que cette dernière n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen ;

10. Considérant, en dernier lieu, que, pour les mêmes raisons qu'indiquées au point 5., le préfet n'a pas méconnu les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord bilatéral franco-algérien ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

11. Considérant, en premier lieu, que, si Mme D...ne peut utilement invoquer les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 dès lors que les dispositions de l'article L. 511-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoient une obligation particulière de motivation, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué comporte la mention des motifs de droit et des circonstances de fait qui en constituent le fondement, conformément aux exigences de l'article L. 511-1 précité ;

12. Considérant, en deuxième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux retenus en ce qui concerne la décision de refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français, la décision fixant le pays de destination ne méconnaît pas les stipulations des articles 6-5 de l'accord bilatéral franco-algérien, 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

13. Considérant, en dernier lieu, que, pour les mêmes raisons qu'indiquées aux points 5. et 10., le préfet n'a pas méconnu les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord bilatéral franco-algérien ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

15. Considérant que le rejet des conclusions à fin d'annulation entraîne, par voie de conséquence, celui des conclusions à fin d'injonction ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

17. Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par Mme D...doivent, dès lors, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Nord.

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N°12DA01003


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 12DA01003
Date de la décision : 04/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Olivier Gaspon
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : INUNGU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2013-06-04;12da01003 ?
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