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14/10/2014 | FRANCE | N°13DA01206

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 14 octobre 2014, 13DA01206


Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2013, présentée par le préfet du Nord ; le préfet du Nord demande à la cour d'annuler le jugement nos 1207215-1300371 du 25 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Lille, d'une part, a annulé les décisions du 21 novembre 2012 par lesquelles il a obligé M.G... H... à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à M. H... une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement et de procéder au réexamen de sa situa

tion et, enfin, a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euro...

Vu la requête, enregistrée le 19 juillet 2013, présentée par le préfet du Nord ; le préfet du Nord demande à la cour d'annuler le jugement nos 1207215-1300371 du 25 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Lille, d'une part, a annulé les décisions du 21 novembre 2012 par lesquelles il a obligé M.G... H... à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à M. H... une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement et de procéder au réexamen de sa situation et, enfin, a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me C... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- les observations de Me Olivier Cardon, avocat de M.H... ;

1. Considérant que, par arrêté du 21 novembre 2012, le préfet du Nord a rejeté la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par M. H..., ressortissant tunisien né le 13 août 1983, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que le préfet du Nord relève appel du jugement 25 juin 2013 du tribunal administratif de Lille en tant que, par ce jugement, il a annulé ses décisions du 21 novembre 2012 par lesquelles il a obligé M. H... à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que M. H...demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation du même jugement en tant qu'il concerne les décisions du 21 novembre 2012 du préfet du Nord ayant refusé de renouveler son titre de séjour, l'ayant obligé à quitter le territoire français et ayant fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement ;

Sur les conclusions de l'appel incident de M. H... :

2. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté en date du 20 juillet 2011, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Nord a donné délégation à M. E...F..., attaché d'administration, à l'effet de signer, notamment en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général, du secrétaire général adjoint et de M. B... A..., directeur de l'immigration et de l'intégration de la préfecture du Nord, les décisions portant obligation de quitter le territoire français avec fixation du pays de destination ; que, par cette délégation, M. F... était compétent pour prendre la décision attaquée ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait propres à la situation personnelle de M. H... ; que, par suite, elle est suffisamment motivée ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le renouvellement de la carte de séjour portant la mention " étudiant " est subordonné, notamment, à la justification par son titulaire de la réalité et du sérieux de ses études ; que M. H... ne conteste pas, qu'après avoir obtenu une maîtrise à l'issue de l'année universitaire 2006-2007 puis un master à l'issue de l'année universitaire 2007-2008, il s'est successivement inscrit à trois masters différents les quatre années universitaires suivantes sans jamais réussir un seul semestre d'études ; que M. H...ne saurait se prévaloir des dispositions de la circulaire du 26 mars 2002, laquelle est dépourvue de caractère impératif ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Lille a estimé que le préfet du Nord n'avait pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que M. H... ne justifiait pas du caractère effectif et sérieux de ses études ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de l'appel incident de M.H..., ce dernier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions d'annulation de la décision lui refusant le renouvellement de son titre de séjour ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Sur les conclusions d'appel du préfet du Nord :

6. Considérant que M. H...a demandé le renouvellement d'un titre de séjour " étudiant " ; qu'il a donc été mis à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté qui lui a refusé le renouvellement de ce titre de séjour et l'a également obligé à quitter le territoire français, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de ces mesures ; que, par suite, la garantie consistant dans le droit à être entendu préalablement à la mesure d'éloignement, telle qu'elle est notamment consacrée par le droit de l'Union, n'a pas été méconnue ; que, par suite, le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a retenu un tel moyen pour annuler l'arrêté du 21 novembre 2012 en tant qu'il obligeait M. H...à quitter le territoire français et fixait le pays de destination de cette mesure ;

7. Considérant qu'il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. H...devant le tribunal administratif de Lille à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination de cette mesure ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant, en premier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 5 du présent arrêt, que M. H... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour pour soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est privée de base légale ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que, par un arrêté du 20 juillet 2011, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Nord a donné délégation à M. E...F..., attaché d'administration, à l'effet de signer, notamment en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général, du secrétaire général adjoint et de M. B... A..., directeur de l'immigration et de l'intégration de la préfecture du Nord, les décisions portant obligation de quitter le territoire français avec fixation du pays de destination ; que, par cette délégation, M. F... était compétent pour prendre la décision attaquée ;

10. Considérant, en troisième lieu, que la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait propres à la situation personnelle de M. H... ; que, par suite, elle est suffisamment motivée ;

11. Considérant, en quatrième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 6 du présent arrêt, la garantie consistant dans le droit à être entendu préalablement à la mesure d'éloignement, telle qu'elle est notamment consacrée par le droit de l'Union, n'a pas été méconnue ; que, par suite, ce moyen doit être rejeté ;

12. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; (...) " ;

13. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, dès lors qu'elle dispose d'éléments d'information suffisamment précis permettant d'établir qu'un étranger, résidant habituellement en France, présente un état de santé susceptible de le faire entrer dans la catégorie qu'elle prévoit des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire, l'autorité préfectorale doit, lorsqu'elle envisage de prendre une telle mesure à son égard, et alors même que l'intéressé n'a pas sollicité le bénéfice d'une prise en charge médicale en France, recueillir préalablement l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;

14. Considérant, en sixième lieu, que, si M.H..., qui n'a sollicité à aucun moment la délivrance d'un certificat de résidence en raison de son état de santé, produit un certificat médical du 7 mars 2013 émanant du Dr D...exerçant à Rosny sous Bois, celui-ci se borne à affirmer que l'état de santé de l'intéressé ne permet pas la poursuite de ses études ; qu'aucun élément précis ne pouvait permettre au préfet de penser, d'une part, que l'état de santé de M. H... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et, d'autre part, qu'aucun traitement approprié n'existait en Tunisie ; que, par suite, le préfet du Nord n'a pas commis d'irrégularité de procédure en ne demandant pas au médecin de l'agence régionale de santé de se prononcer sur l'état de santé de M.H..., ni méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

15. Considérant, enfin, que, si M H...soutient n'avoir fait l'objet d'aucune condamnation judiciaire, que sa présence sur le territoire n'entrave ni l'économie ni l'exercice des libertés et qu'il prouve son intégration par la production de fiches de paye, il résulte toutefois de l'instruction qu'il n'a été titulaire que d'un contrat de travail d'intérim, qu'il est célibataire sans enfant à charge et qu'il dispose d'attaches dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur le pays de destination :

16. Considérant, ainsi qu'il a été dit aux points 5 et 8 du présent arrêt, que M. H...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour pour soutenir que la décision fixant le pays de destination est privée de base légale ;

17. Considérant, ainsi qu'il a été dit aux points 2 et 9 du présent arrêt, que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée manque en fait ;

18. Considérant que la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait propres à la situation personnelle de M. H... ; que, par suite, elle est suffisamment motivée ;

19. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, d'une part, le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé ses décisions du 21 novembre 2012 obligeant M. H... à quitter le territoire français et fixant le pays de destination de cette mesure et lui a enjoint de délivrer à M. H... une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement et de procéder au réexamen de sa situation, d'autre part, doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de M. H...à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement nos 1207215-1300371 du 25 juin 2013 du tribunal administratif de Lille sont annulés.

Article 2 : Les conclusions incidentes présentées par M. H...devant la cour et le surplus de sa demande présentée devant le tribunal administratif de Lille sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. G... H....

Copie sera adressée au préfet du Nord.

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N°13DA01206


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13DA01206
Date de la décision : 14/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Mortelecq
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Marjanovic
Avocat(s) : AVOCATS DU 37

Origine de la décision
Date de l'import : 26/08/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2014-10-14;13da01206 ?
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