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23/03/2015 | FRANCE | N°14DA00604

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 5, 23 mars 2015, 14DA00604


Vu la requête, enregistrée le 7 avril 2014, présentée pour la société PM3C, société à responsabilité limitée, dont le siège est 25 rue de Ponthieu à Paris (75008), représentée par son gérant en exercice, par Me Francis Carbonnel ;

La société PM3C demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003347 du 11 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé, sur la demande de l'association France nature environnement, l'arrêté du 24 mars 2010 par lequel le préfet du Pas-de-Calais lui a accordé l'autorisation de défricher une surface

de 5 hectares 30 ares sur les parcelles cadastrées OC 274 et OC 410 appartenant à la co...

Vu la requête, enregistrée le 7 avril 2014, présentée pour la société PM3C, société à responsabilité limitée, dont le siège est 25 rue de Ponthieu à Paris (75008), représentée par son gérant en exercice, par Me Francis Carbonnel ;

La société PM3C demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003347 du 11 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé, sur la demande de l'association France nature environnement, l'arrêté du 24 mars 2010 par lequel le préfet du Pas-de-Calais lui a accordé l'autorisation de défricher une surface de 5 hectares 30 ares sur les parcelles cadastrées OC 274 et OC 410 appartenant à la commune de Saint-Etienne-au-Mont ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'association France nature environnement ;

3°) de mettre à la charge de l'association la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 19 mars 2015, présentée pour la société PM3C ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code forestier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu l'arrêté du 1er avril 1991 relatif à la liste des espèces végétales protégées en région Nord-Pas-de-Calais complétant la liste nationale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-Michel Riou, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Perrine Hamon, rapporteur public,

- et les observations de Me Francis Carbonnel, avocat de la société PM3C ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

1. Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 142-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à la date de l'introduction de la demande : " Toute association de protection de l'environnement agréée au titre de l'article L. 141-1 justifie d'un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec son objet et ses activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l'environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elle bénéficie de l'agrément dès lors que cette décision est intervenue après la date de son agrément. " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 141-1 du même code : " Lorsqu'elles exercent leurs activités depuis au moins trois ans, les associations régulièrement déclarées et exerçant leurs activités statutaires dans le domaine de la protection de la nature et de la gestion de la faune sauvage, de l'amélioration du cadre de vie, de la protection de l'eau, de l'air, des sols, des sites et paysages, de l'urbanisme, ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions et les nuisances et, d'une manière générale, oeuvrant principalement pour la protection de l'environnement, peuvent faire l'objet d'un agrément motivé de l'autorité administrative. " ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article premier de ses statuts, l'association France nature environnement a notamment pour objet de " conserver et de restaurer les espaces, ressources, milieux et habitats naturels, terrestres et marins, les espèces animales et végétales, la diversité et les équilibres fondamentaux de la biosphère, l'eau, l'air, le sol, le sous-sol, les sites et paysages (...) " ; que l'article premier des statuts stipule que l'objet de l'association est " également d'agir pour (...) la défense en justice de l'ensemble de ses membres, y compris la défense de tous leurs intérêts notamment ceux résultant de l'objet de chaque association fédérée ou définis par l'agrément délivré au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement " ; que cette association bénéficiait, à la date de la décision attaquée, d'un agrément ministériel du 29 mai 1978, publié au Journal officiel le 1er juillet 1978, au titre des dispositions précitées de l'article L. 142-1 du code de l'environnement et pour un cadre géographique national ; que la décision attaquée, susceptible d'affecter la conservation d'espèces végétales éventuellement nécessaires à l'équilibre biologique du territoire concerné, voire de la région Nord-Pas-de-Calais, selon l'étude produite au cours de son instruction, a un rapport direct avec l'objet de cette association et porte sur une partie du territoire pour lequel elle bénéficie de l'agrément ; que, dès lors, l'association France nature environnement avait un intérêt à agir contre cette décision, alors même que l'une des associations fédérées aurait également eu cet intérêt ; que, par suite, la société PM3C n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a écarté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de l'association ;

Sur les autres moyens relatifs au bien-fondé du jugement :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 431-2 du code forestier dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée : " Sur les dunes côtières fixées par des plantes aréneuses (...), à l'exclusion des terrains relevant du régime d'autorisation de défrichement prévue au titre Ier du livre III du présent code, aucune coupe de ces végétaux ne peut être réalisée sans autorisation préalable et spéciale de l'autorité administrative. L'autorisation de coupe de plantes aréneuses peut être refusée lorsque la conservation de ces végétaux est reconnue nécessaire au titre d'un ou plusieurs des motifs visés aux 1°, 2°, 4°, 8° et 9° de l'article L. 311-3. / L'autorité administrative peut subordonner son autorisation au respect d'une ou plusieurs des prescriptions suivantes : 1° La cession à l'Etat, à une collectivité locale ou à un établissement public de dunes côtières fixées par des plantes aréneuses d'une surface au moins égale à celle faisant l'objet de l'autorisation ; / 2° L'exécution de travaux de restauration dans un secteur de dunes comparables du point de vue de l'intérêt de l'environnement et du public, pour une surface correspondant à la surface faisant l'objet de coupes. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 311-3 du code forestier : " L'autorisation de défrichement peut être refusée lorsque la conservation des bois ou des massifs qu'ils complètent, ou le maintien de la destination forestière des sols, est reconnu nécessaire : (...) / 8° A l'équilibre biologique d'une région ou d'un territoire présentant un intérêt remarquable et motivé du point de vue de la préservation des espèces animales ou végétales et de l'écosystème ou au bien-être de la population / (...) " ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de l'environnement : " Les listes des espèces animales non domestiques et des espèces végétales non cultivées faisant l'objet des interdictions définies par les articles L. 411-1 et L. 411-3 sont établies par arrêté conjoint du ministre chargé de la protection de la nature et (...) du ministre chargé de l'agriculture (...). / (...) " ;

5. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que les parcelles, d'une superficie globale d'environ 12 hectares, pour lesquelles la société PM3C avait obtenu une autorisation de coupe de plantes aréneuses sur une surface de 5 hectares 30 ares, sont constituées en majorité de dunes décalcifiées, d'une grande rareté en France ; que si le procès-verbal de reconnaissance établi par l'administration le 23 juin 2009 n'a pas relevé d'espèces végétales protégées, l'étude réalisée en avril 2009 pour l'instruction de la demande a constaté, notamment, la présence sur le site de plusieurs espèces protégées par l'arrêté ministériel du 1er avril 1991 complétant la liste nationale prévue à l'article R. 411-1 du code de l'environnement précité ; que cette étude a également relevé la présence de cinq autres espèces d'une rareté exceptionnelle dans la région ; que, par suite, le territoire concerné par l'autorisation de coupe de plantes aréneuses présente un intérêt remarquable au sens des dispositions du 8° de l'article L. 311-3 du code forestier ;

6. Considérant, d'autre part, que l'autorisation de coupe de plantes aréneuses porte sur les emplacements d'une centaine d'habitations légères de loisirs et des équipements du parc résidentiel de loisirs ayant fait l'objet d'un permis d'aménager du 2 août 2008, tels que le bâtiment central d'accueil et les emplacements de stationnement ; qu'il ressort des pièces du dossier que, malgré la modification, antérieurement au dépôt de la demande par la société PM3C, de l'emplacement d'une trentaine d'habitations et la réduction des emplacements de stationnement, la coupe de plantes aréneuses empiète sur des secteurs de très grand intérêt écologique, ainsi que sur des secteurs comportant des espèces protégées ; qu'alors même que la société PM3C a rempli la condition de restauration d'autres parcelles dunaires pour une superficie équivalente à celle de la coupe autorisée, à laquelle cette autorisation était subordonnée, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette restauration garantisse la conservation des espèces végétales recensées sur le site de défrichement de dunes, nécessaires à l'équilibre biologique de la région ; que, par suite, la décision du 24 mars 2010 par laquelle le préfet du Pas-de-Calais avait accordé l'autorisation de coupe de plantes aréneuses à la société PM3C était entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la nécessité de la conservation des plantes aréneuses en cause ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société PM3C n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du préfet du Pas-de-Calais du 24 mars 2010 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société PM3C une somme de 1 500 euros à verser à l'association France nature environnement au titre de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société PM3C est rejetée.

Article 2 : La société PM3C versera une somme de 1 500 euros à l'association France nature environnement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société PM3C, au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt et à l'association France nature environnement.

Copie en sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais.

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N°14DA00604 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 14DA00604
Date de la décision : 23/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-042-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses. Autorisations relatives aux espaces boisés. Autorisation de défrichement.


Composition du Tribunal
Président : Mme Erstein
Rapporteur ?: M. Jean-Michel Riou
Rapporteur public ?: Mme Hamon
Avocat(s) : CARBONNEL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-03-23;14da00604 ?
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