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13/09/2018 | FRANCE | N°18DA00136

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3 (bis), 13 septembre 2018, 18DA00136


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 octobre 2016 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1705599 du 14 décembre 2017, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 6 octobre 2016 et a enjoint au préfet du Nord de procéder au réexamen de la situatio

n de M. A....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 janvier...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 octobre 2016 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1705599 du 14 décembre 2017, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 6 octobre 2016 et a enjoint au préfet du Nord de procéder au réexamen de la situation de M. A....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 janvier 2018, le préfet du Nord demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M.A....

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michel Richard, président-assesseur ;

- et les observations de Me F...D..., représentant M.A....

Considérant ce qui suit :

Sur la fin de non-recevoir opposée par M.A... :

1. Il ressort des pièces du dossier que le jugement du tribunal administratif de Lille a été notifié aux parties le 18 décembre 2017. La requête d'appel du préfet du Nord a été enregistrée par le greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 18 janvier 2018, soit dans le délai d'appel. Elle ne présente ainsi pas un caractère tardif. M. A... n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que la requête d'appel du préfet du Nord serait irrecevable.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

2. Aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention "salarié" ou la mention "travailleur temporaire" peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé ".

3. Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".

En ce qui concerne le motif tiré de la fraude :

4. M. A..., ressortissant malien, déclare être né le 15 juillet 1998 et être entré en France le 17 novembre 2014. En tant que mineur, il a été confié tout d'abord à l'aide sociale à l'enfance par une décision du juge des enfants du tribunal de grande instance de Lille du 9 janvier 2015, puis à la tutelle du président du conseil départemental du département du Nord par une ordonnance du juge des tutelles des mineurs du même tribunal du 12 octobre 2015 et, enfin, il a bénéficié d'un contrat d'accueil provisoire jeune majeur jusqu'en janvier 2017. Pour établir son identité et son âge, il a produit un acte de naissance, un jugement supplétif du tribunal civil de Diema, un passeport et une carte nationale d'identité, au nom de M. B... A..., né le 15 juillet 1998 à Fatao. La cellule " fraude documentaire " de la police aux frontières de Lille, qui les a analysés, a conclu que ces documents ne présentaient aucun élément de falsification ou de contrefaçon mais que le jugement supplétif était dépourvu de sécurité documentaire. Le préfet fait également valoir qu'il ressortait de la consultation du système informatique Visabio que M. A...avait déclaré, lors d'une précédente demande de visa, être né le 30 juin 1980. Ce résultat ne permet toutefois pas de corroborer le fait que le demandeur du titre de séjour serait âgé comme il a été dit, de trente-huit ans et non de dix-neuf ans, alors par ailleurs, que, depuis son arrivée en France, et bien qu'il ait reconnu avoir tenté d'obtenir un visa de manière frauduleuse, M. A... n'a jamais varié dans ses déclarations relatives à son identité ou à son âge. En outre, la procédure d'infraction de fausse déclaration dont il a fait l'objet a été classée sans suite pour absence d'infraction. L'autorité préfectorale ne remet ainsi pas efficacement en cause la présomption de véracité des documents d'état civil et d'identité présentés par l'intéressé. Par suite, le préfet du Nord ne pouvait régulièrement se fonder sur le motif tiré de ce que M. A...était âgé de plus de dix-huit ans lorsqu'il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance.

En ce qui concerne le motif de refus tiré du non-respect des autres conditions prévues par l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

5. L'arrêté attaqué repose sur un second motif tiré de ce que M. A... ne remplit pas une autre des conditions prévues par l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif au titre de séjour délivré aux mineurs isolés ayant atteint leur majorité, dès lors notamment qu'il déclare avoir quitté le Mali pour aider sa mère financièrement. Il ressort des pièces du dossier que la mère, les soeurs et l'oncle de M. A... résident toujours au Mali. Selon ses propres déclarations lors de sa demande de titre de séjour, l'intéressé est venu en France, à l'issue d'un voyage financé par son oncle, pour trouver du travail et aider sa mère. Il n'établit, ni même n'allègue que les liens avec sa famille se seraient distendus ou dégradés. Il ne résulte pas de l'instruction que l'autorité préfectorale aurait pris la même décision si elle ne s'était fondée que sur le second motif tiré du maintien de liens avec des membres de sa famille d'origine au Mali. Par suite, le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a retenu une erreur de droit pour annuler son arrêté.

6. Il appartient, toutefois, à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant la juridiction administrative.

Sur le moyen commun à toutes les décisions :

7. Par un arrêté du 8 septembre 2016, régulièrement publié au recueil administratif spécial du même jour, le préfet du Nord a donné délégation à Mme E...C..., cheffe du bureau de lutte contre l'immigration irrégulière, signataire des décisions contestées, à l'effet notamment de signer les décisions en litige. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions contestées doit être écarté.

Sur le moyen propre à la décision de refus d'un titre de séjour :

8. M. A... est présent en France depuis moins de deux ans à la date de l'arrêté attaqué. Il n'établit pas avoir noué en France des liens d'une particulière intensité. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne pourrait pas exercer d'activité professionnelle au Mali. Sa mère et ses soeurs y résident et il y a lui-même vécu jusqu'à l'âge de quinze ans. Dès lors, compte tenu des conditions et de la durée du séjour en France de l'intéressé et en dépit des efforts d'intégration qu'il a fournis, le préfet du Nord n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant un titre de séjour est entachée d'illégalité.

Sur les moyens propres à la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Il résulte de ce qui a été dit au point 9 que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

11. Pour les motifs mentionnés au point 8, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Nord aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'il aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.

12. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité.

Sur les moyens propres à la décision fixant le pays de destination :

13. Il résulte de ce qui a été dit au point 12 que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.

14. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 6 octobre 2016. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. A... aux fins d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 14 décembre 2017 du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Lille ainsi que ses conclusions présentées en appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. B...A...et à Me F...D....

Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.

N°18DA00136 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 18DA00136
Date de la décision : 13/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Michel Richard
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : LEQUIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 25/09/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-09-13;18da00136 ?
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