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23/10/2014 | FRANCE | N°14LY00880

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 23 octobre 2014, 14LY00880


Vu la requête, enregistrée le 24 mars 2014, présentée pour M. A...B..., domicilié ... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1307895 du 25 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant :

- d'une part, à l'annulation des décisions du 7 octobre 2013 du préfet du Rhône portant refus de délivrance d'un titre de séjour, assorti de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et prescrivant qu'à l'expiration de ce délai il serait reconduit d'office à destination du p

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Vu la requête, enregistrée le 24 mars 2014, présentée pour M. A...B..., domicilié ... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1307895 du 25 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant :

- d'une part, à l'annulation des décisions du 7 octobre 2013 du préfet du Rhône portant refus de délivrance d'un titre de séjour, assorti de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et prescrivant qu'à l'expiration de ce délai il serait reconduit d'office à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays où il établirait être légalement admissible ;

- d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de réexaminer sa situation et de lui délivrer un certificat de résidence algérien portant la mention " commerçant ", dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le préfet a commis une erreur sur l'exactitude matérielle de faits qui constituent pourtant l'unique fondement de rejet de sa décision, dès lors qu'il s'est fondé, pour rejeter la demande de titre, sur la décision rejetant l'autorisation de travail en faveur de M. B... prise par la DIRECCTE, le 27 mars 2013, au motif de l'absence de document unique finalisé pour l'évaluation des risques et de l'absence de vérification périodique des installations électriques, alors qu'il a sollicité postérieurement à la décision de rejet de l'autorisation de travail en sa faveur, et après avoir démissionné de la société Tim Lehen, un certificat de résidence algérien mention " commerçant " en sa qualité de gérant de ladite société, cette dernière respectant parfaitement la législation du travail, de la protection sociale, et les règles de sécurité, et disposant d'un document unique finalisé pour l'évaluation des risques, reçu par le contrôleur du travail le 9 avril 2013, ainsi qu'il ressort d'une attestation du 4 mars 2014, et ayant fait procédé à la vérification périodique des installations électriques le 18 mars 2013 ;

- le refus de titre méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il vit de manière ininterrompue sur le territoire français depuis plus de trois ans, qu'il est assidu dans le travail, a respecté le contrat d'accueil et d'intégration et est depuis le 5 avril 2013, associé au sein de la société Tim Lehen et unique gérant ; il a créé des liens personnels forts en France et ses intérêts, tant personnels que professionnels, sont aujourd'hui en France ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 septembre 2014, présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que M. B...ne justifie pas que l'activité de l'entreprise exploitée par la société dont il possède des parts serait viable ni d'une qualification professionnelle, pour l'application de l'article 5 de l'accord franco-algérien, et qu'il ne justifie pas non plus de l'intensité de ses liens privés et familiaux en France ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'accord du 27 décembre 1968 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leur famille ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 octobre 2014 le rapport de M. Seillet, président-assesseur ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant algérien né le 20 novembre 1984, entré en France le 3 juin 2010 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour, a obtenu, en sa qualité de conjoint d'une ressortissante française, un certificat de résidence algérien valable du 30 août 2011 au 29 août 2012 ; qu'après la rupture de la communauté de vie des époux, survenue au cours du mois d'août 2012, il a sollicité, en décembre 2012, un changement de statut, afin d'obtenir un certificat de résidence algérien portant la mention " salarié ", puis, après le rejet de sa demande d'autorisation de travail par une décision du 27 mars 2013, et à la suite du rachat de la moitié des parts sociales de la société qui l'employait, le 5 avril 2013, et de sa nomination en qualité de gérant, il a ensuite sollicité la délivrance d'un certificat de résidence algérien portant la mention " commerçant " sur le fondement des stipulations des articles 5 et 7 c) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que le préfet du Rhône, par un arrêté du 7 octobre 2013, a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que M. B... fait appel du jugement du 25 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation desdites décisions préfectorales ;

Sur la légalité des décisions en litige :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé, modifié par l'avenant du 22 décembre 1985 : " Les ressortissants algériens s'établissant en France à un autre titre que celui de travailleurs salariés reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur justification (...) de leur inscription au registre du commerce (...) un certificat de résidence dans les conditions fixées aux articles 7 et 7 bis " ; que l'article 7c stipule que " les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent, s'ils justifient l'avoir obtenue, un certificat de résidence valable un an renouvelable et portant la mention de cette activité " ;

3. Considérant que, pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par M. B..., sur le fondement des stipulations précitées de l'article 5 de l'accord franco-algérien, le préfet du Rhône s'est fondé sur le motif tiré de ce que dès lors que, lors d'un contrôle par le service du travail, un certain nombre de manquements avaient été constatés au sein de la SARL Tim Lehen, telle que l'absence de document unique finalisé pour l'évaluation des risques et l'absence de vérification périodique des installations électriques, ladite société ne pouvait être considérée comme respectant la législation du travail, la protection sociale et les règles de sécurité et, par suite M. B..., en qualité de gérant de cette société, ne pouvait se voir délivrer un certificat de résidence mention " commerçant " ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier, en premier lieu, que la société a fait établir, postérieurement au contrôle intervenu en février 2013, un rapport de vérification des installations électriques le 26 avril 2013, ainsi que l'avaient relevé les premiers juges ; qu'il en ressort également, en second lieu, et en particulier d'une lettre, du 4 mars 2014, du contrôleur du travail de la section 1 de l'inspection du travail du Rhône, produite en appel, que ledit contrôleur avait été destinataire, le 9 avril 2013, outre du registre de sécurité et du certificat d'adhésion de la société Tim Lehen au service de santé au travail, du document unique d'évaluation des risques ; qu'ainsi, à la date de la décision de refus de titre de séjour en litige, le préfet du Rhône ne pouvait, sans entacher sa décision d'une erreur de fait, se fonder, pour rejeter la demande présentée par M. B..., sur le non-respect, par la société dont il était le gérant, de dispositions de la réglementation du travail prévoyant une vérification des installations électriques et la production d'un document unique d'évaluation des risques ;

4. Considérant que le préfet du Rhône ne peut utilement invoquer d'autres motifs que ceux retenus dans la décision en litige, tirés de l'absence de justification de la viabilité de l'activité de l'entreprise exploitée par la société dont M. B...possède des parts ni d'une qualification professionnelle, pour l'application des stipulations de l'article 5 de l'accord franco-algérien, sans demander au juge administratif de procéder à une substitution de motifs ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 octobre 2013 du préfet du Rhône portant refus de délivrance d'un titre de séjour et, par voie de conséquence, des décisions du même jour par lesquelles ledit préfet a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination pour l'exécution d'une mesure d'éloignement ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure, assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ; que l'article L. 911-3 de ce code dispose que : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. " ;

7. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la situation de M. B... justifie actuellement que lui soit délivré le titre de séjour prévu par l'article 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, dès lors, l'annulation prononcée par le présent arrêt implique seulement que le préfet délivre à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour et réexamine sa situation dans les délais de, respectivement, quinze jours et deux mois suivant la notification de cet arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés à l'occasion de la présente instance par M. B... et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 25 février 2014 et les décisions du préfet du Rhône du 7 octobre 2013 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de munir M. B... d'une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa demande de titre de séjour, dans les délais de, respectivement, quinze jours et deux mois suivant la date de notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône et au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Lyon.

Délibéré après l'audience du 2 octobre 2014 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 octobre 2014.

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N° 14LY00880


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00880
Date de la décision : 23/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : BOYER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-10-23;14ly00880 ?
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