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17/12/2019 | FRANCE | N°19LY01771

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 17 décembre 2019, 19LY01771


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La métropole de Lyon a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 20 avril 2017 fixant le montant individuel de la part départementale de sa dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) pour 2017 à 8 549 815 euros, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de prendre un nouvel arrêté, dans le délai de quinze jours, en ne tenant compte que des recettes réell

es de fonctionnement perçues par le département du Rhône sur le territoire de la métropole d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La métropole de Lyon a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 20 avril 2017 fixant le montant individuel de la part départementale de sa dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) pour 2017 à 8 549 815 euros, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de prendre un nouvel arrêté, dans le délai de quinze jours, en ne tenant compte que des recettes réelles de fonctionnement perçues par le département du Rhône sur le territoire de la métropole de Lyon en 2015.

Par un jugement n° 1707828 du 7 mars 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2019, la métropole de Lyon, représentée par Me Le Chatelier (SELAS ADAMAS), avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lyon du 7 mars 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 20 avril 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de prendre un nouvel arrêté, dans le délai de quinze jours, en ne tenant compte que des recettes réelles de fonctionnement perçues par le département du Rhône sur le territoire de la métropole de Lyon en 2015 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le VIII. de l'article 33 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 est contraire aux principes constitutionnels d'égalité devant la loi et devant les charges publiques, issus des articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, et aux principes constitutionnels de libre administration et de l'autonomie financière des collectivités territoriales, consacrés aux articles 72 et 72-2 de la Constitution, en ce qu'il ne prévoit pas un retraitement des dépenses réelles de fonctionnement de la métropole de Lyon permettant de ne prendre en compte que ses seules recettes liées à ses compétences départementales ;

- le préfet du Rhône a commis une erreur de droit et méconnu le principe d'égalité devant les charges publiques, en estimant que la répartition de la minoration de la part départementale de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP), prévue à l'article 33 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, doit être appliquée à l'ensemble des recettes réelles de fonctionnement de son budget principal, sans les limiter aux seules recettes perçues dans le cadre de ses compétences de nature départementale.

Par un mémoire enregistré le 27 mai 2019, la métropole de Lyon demande à la cour, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 20 avril 2017, de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du VIII. de l'article 33 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

Elle soutient que le VIII. de l'article 33 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 est contraire aux principes constitutionnels d'égalité devant la loi et devant les charges publiques, issus des articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, et aux principes constitutionnels de libre administration et de l'autonomie financière des collectivités territoriales, consacrés aux articles 72 et 72-2 de la Constitution, en ce qu'il ne prévoit pas un retraitement des dépenses réelles de fonctionnement de la métropole de Lyon afin de ne prendre en compte que ses seules recettes liées à ses compétences départementales.

Par ordonnance du 2 septembre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 octobre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 ;

- la décision n° 2016-744 DC du Conseil constitutionnel du 29 décembre 2016 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D..., première conseillère,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Petit, avocat, représentant la métropole de Lyon ;

Considérant ce qui suit :

1. La métropole de Lyon relève appel du jugement du 7 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 20 avril 2017 fixant sa part " département " de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) pour 2017 au montant de 8 549 815 euros.

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

2. Il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, que la juridiction saisie d'un moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux.

3. La métropole de Lyon conteste la constitutionnalité du VIII. de l'article 33 de la loi du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, en tant qu'il ne prévoit pas un retraitement de ses recettes réelles de fonctionnement, afin de ne prendre en compte que ses seules recettes liées à ses compétences départementales pour la répartition, entre les collectivités concernées, de la minoration de la DCRTP dont il fixe le taux.

4. Toutefois, cet article a été, dans son ensemble, déclaré conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans les motifs et le dispositif de sa décision n° 2016-744 DC du 29 décembre 2016. Par ailleurs, si, en posant une question prioritaire de constitutionnalité, tout justiciable a le droit de contester la constitutionnalité de la portée effective qu'une interprétation jurisprudentielle constante confère à cette disposition, le jugement du tribunal administratif de Lyon du 7 mars 2019, qui n'émane pas de la juridiction suprême de l'ordre juridictionnel administratif, ne constitue ni une jurisprudence administrative constante, ni, par suite, une circonstance nouvelle de nature à remettre en cause la constitutionnalité des dispositions contestées. Dans ces conditions, et alors même que le Conseil constitutionnel ne s'est pas explicitement prononcé sur l'ensemble des griefs précisément invoqués par la métropole de Lyon, il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité qu'elle soulève.

5. Ainsi, sans qu'il soit besoin de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que le VIII. de l'article 33 de la loi du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 susvisée porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

6. Aux termes du VIII de l'article 33 de la loi du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 susvisée : " Pour l'application des III et VI du présent article, la minoration cumulée des dotations de compensation mentionnées, d'une part, dans les dispositions modifiées au 1° du M du II du présent article et, d'autre part, au 1.2 du 1 de l'article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 précitée est répartie entre les départements, la métropole de Lyon, les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique et les collectivités mentionnées à l'article L. 3441-1 du code général des collectivités territoriales, à l'exception du Département de Mayotte. Le montant total de la minoration supportée par les collectivités d'outre-mer susmentionnées est déterminé en appliquant au montant total de la minoration le rapport, minoré de 33 %, entre la population de ces collectivités d'outre-mer, telle qu'elle résulte du dernier recensement, et la population de l'ensemble des départements, de la métropole de Lyon et desdites collectivités d'outre-mer. Cette minoration est répartie entre ces collectivités d'outre-mer au prorata des recettes réelles de fonctionnement de leur budget principal de l'année 2015. Après application de la minoration supportée par les collectivités d'outre-mer susmentionnées, la minoration est répartie entre les départements de métropole et la métropole de Lyon au prorata des recettes réelles de fonctionnement de leur budget principal de l'année 2015. Si, pour une de ces collectivités, la minoration ainsi calculée excède le montant cumulé des deux dotations susmentionnées, la différence est répartie entre les autres collectivités selon les mêmes modalités ".

7. Il résulte de ces dispositions qu'il appartenait au préfet du Rhône de répartir la minoration supportée par les départements de la métropole et la métropole de Lyon au prorata de l'ensemble des recettes réelles de fonctionnement de leur budget principal, sans pouvoir limiter celles de la métropole de Lyon aux seules recettes réelles de fonctionnement liées à ses compétences de nature départementale. Ces dispositions étant rédigées en des termes clairs, la métropole de Lyon ne peut ni utilement se prévaloir des travaux parlementaires et de l'intention du législateur, ni remettre en cause leur portée en invoquant la décision précitée du Conseil constitutionnel du 29 décembre 2016, laquelle a d'ailleurs reconnu la constitutionnalité de ces dispositions sans émettre de réserve d'interprétation. La métropole de Lyon n'est, en outre, pas fondée à invoquer la rupture du principe d'égalité pour faire échec à l'application de ces dispositions législatives et revendiquer un traitement différent de celui d'autres collectivités territoriales au motif qu'elle se trouverait dans une situation différente de celles-ci. Elle ne peut davantage se prévaloir du courrier du 23 janvier 2017 émanant des services du ministère de l'intérieur, lequel, au demeurant, rappelle qu'il est nécessaire qu'une base légale soit ultérieurement adoptée pour autoriser le retraitement des comptes de gestion métropolitain de l'exercice 2015.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la métropole de Lyon n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. La présente décision rejetant les conclusions à fin d'annulation présentées par la métropole de Lyon et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la métropole de Lyon.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la métropole de Lyon est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la métropole de Lyon et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2019 à laquelle siégeaient :

Mme C... A..., présidente de chambre,

Mme E..., présidente-assesseure,

Mme B... D..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 17 décembre 2019.

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N° 19LY01771


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01771
Date de la décision : 17/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Dispositions financières.

Procédure.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SELARL ADAMAS AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-12-17;19ly01771 ?
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