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15/06/2022 | FRANCE | N°21LY01302

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 15 juin 2022, 21LY01302


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 7 juillet 2020 par lesquelles le préfet de l'Yonne a procédé au retrait de sa carte de résident et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2002256 du 2 avril 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 22 avril 2021 et deux mémoires enregistrés le 22 juin 2

021 et le 3 décembre 2021, M. B..., représenté par Me Goba puis par Me Jaidane, avocats, demand...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 7 juillet 2020 par lesquelles le préfet de l'Yonne a procédé au retrait de sa carte de résident et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2002256 du 2 avril 2021, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 22 avril 2021 et deux mémoires enregistrés le 22 juin 2021 et le 3 décembre 2021, M. B..., représenté par Me Goba puis par Me Jaidane, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 2 avril 2021 du tribunal administratif de Dijon ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Yonne du 7 juillet 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer une carte de résident dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, sa demande de première instance n'était pas tardive ;

En ce qui concerne la décision de retrait de sa carte de résident :

- cette décision n'est pas suffisamment motivée en droit ;

- elle est dépourvue de base légale, l'article 10-1 a. de l'accord franco-tunisien ne permettant pas un tel retrait ;

- cette décision méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet de l'Yonne a commis une erreur d'appréciation, en remettant en cause la réalité et la sincérité de son mariage ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision n'est pas suffisamment motivée ;

- le préfet de l'Yonne s'est, à tort, abstenu d'examiner son droit au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 novembre 2021, le préfet de l'Yonne, représenté par Me Claisse (SELARL Centaure Avocats), avocat, conclut au rejet de la requête.

Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 3 janvier 2022, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 21 janvier 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 ;

- l'ordonnance n° 2020-558 du 13 mai 2020 ;

- l'ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 ;

- la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère,

- et les observations de Me d'Ovidio, avocate, pour le préfet de l'Yonne ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., de nationalité tunisienne, relève appel du jugement du 2 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Yonne du 7 juillet 2020 procédant au retrait de la carte de résident dont il était titulaire et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. ' L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° (...) si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) ". L'article L. 512-1 du même code dispose que : " I. ' L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 3° (...) du I de l'article L. 511-1 (...) et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 (...) peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination (...) qui l'accompagnent le cas échéant (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " I. - Conformément aux dispositions du I de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification d'une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire, prise en application des 3° (...) du I de l'article L. 511-1 (...), fait courir un délai de trente jours pour contester cette obligation ainsi que les décisions relatives au séjour, au délai de départ volontaire, au pays de renvoi (...) notifiées simultanément. (...) ". L'article R. 421-5 du même code prévoit en outre que : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. "

4. Enfin, aux termes de l'article 15 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 13 mai 2020 : " I.- Les dispositions de l'article 2 de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 susvisée relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période sont applicables aux procédures devant les juridictions de l'ordre administratif. / II. ' Par dérogation au I : 1° Le point de départ du délai des demandes et recours suivants est reporté au 24 mai 2020 : a) Recours prévus à l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à l'exception de ceux prévus au premier alinéa du III de cet article (...) ". L'article 2 de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 prévoyait que : " Tout acte, recours, action en justice (...) qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l'article 1er sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois ". L'article 1er de cette ordonnance, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2020-560 du 13 juin 2020, visait alors les " délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus ". Enfin, l'article 1er de la loi n° 2020-546 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions a en outre prévu que : " I. L'état d'urgence sanitaire déclaré par l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 est prorogé jusqu'au 10 juillet 2020 inclus (...) ".

5. Il est constant que M. B... a reçu notification, le 10 juillet 2020, de l'arrêté du préfet de l'Yonne du 7 juillet 2020 qu'il conteste et que son recours, formé par pli postal déposé dans un bureau de poste le 10 août 2020 à 16 h 58, n'a été enregistré au greffe du tribunal administratif de Dijon que le 14 août 2020, postérieurement au délai d'un mois imparti par les dispositions précitées.

6. En premier lieu, la mention figurant dans l'arrêté litigieux, selon laquelle un recours devant la juridiction administrative pouvait être formé " dans un délai de trente jours à compter du lendemain de la cessation de l'état d'urgence sanitaire ", ne comportait aucune ambiguïté, propre à induire l'intéressé en erreur, quant au point de départ du délai ainsi imparti, quand bien même aucune date n'y était expressément précisée. Plus particulièrement, une telle ambiguïté ne pouvait résulter de la prétendue circonstance que l'état d'urgence sanitaire avait alors cessé, celui-ci n'ayant pas encore pris fin à la date d'édiction de l'arrêté en litige. Ainsi, et contrairement à ce que prétend M. B..., il n'existait aucune ambiguïté de nature à obstacle à ce que le délai de recours d'un mois, ainsi mentionné dans l'arrêté litigieux, lui soit opposable.

7. En second lieu, les dispositions de l'article L. 112-1 du code des relations entre le public et l'administration, qui prévoient que toute personne tenue de respecter une date limite ou un délai pour présenter une demande auprès d'une administration peut satisfaire à cette obligation au plus tard à la date prescrite au moyen d'un envoi postal, le cachet de la poste faisant foi, sont sans incidence sur l'application des règles relatives à la recevabilité des recours contentieux. En tout état de cause, et contrairement à ce que prétend M. B..., l'exigence que la requête soit enregistrée au greffe du tribunal compétent dans le délai imparti ressortait de la mention des voies et délais de recours figurant dans l'arrêté en litige. En l'espèce, en déposant son recours auprès d'un bureau de poste en fin de journée la veille de l'échéance du délai qui lui était imparti, M. B... n'a pas effectué les diligences nécessaires pour que son pli parvienne en temps utile au tribunal compétent, compte tenu du délai normal d'acheminement du courrier. Par suite, il n'est pas fondé à se prévaloir de la date à laquelle son recours a été déposé auprès des services postaux.

8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande comme étant tardive et par suite irrecevable.

9. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2022, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2022.

La rapporteure,

Sophie CorvellecLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N°21LY01302


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01302
Date de la décision : 15/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-01-07 Procédure. - Introduction de l'instance. - Délais.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : JAIDANE RIADH

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-06-15;21ly01302 ?
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