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20/10/2022 | FRANCE | N°21LY03408

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 20 octobre 2022, 21LY03408


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... ou Kalmikyan a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 22 février 2021 par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2101432 du 14 avril 2021, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 18 octobre 2021, et des mémoires complémentaires,

enregistrés les 12 et 15 juin 2022, M. B... ou Kalmikyan, représenté par Me Dachary, demande à la co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... ou Kalmikyan a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 22 février 2021 par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2101432 du 14 avril 2021, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 18 octobre 2021, et des mémoires complémentaires, enregistrés les 12 et 15 juin 2022, M. B... ou Kalmikyan, représenté par Me Dachary, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) à titre principal, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Lyon ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté du 22 février 2021 du préfet du Rhône ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- le jugement est irrégulier pour avoir omis de répondre au moyen soulevé lors de l'audience du 7 avril 2021 tiré de ce que la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ne lui a pas été notifiée ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision méconnaît le 6° de l'article L. 511-1 et l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ne lui a pas été notifiée ; la date de présentation de l'avis de réception postal n'est pas renseignée ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

- la décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas présenté d'observations.

M. A... B... ou Kalmikyan a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Caraës, première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., qui a pour nom d'usage Kalmikyan né en Russie le 7 février 2000, est entré en France irrégulièrement le 31 mai 2013 selon ses déclarations. Le 4 septembre 2018, il a sollicité le bénéfice de l'asile. Sa demande, traitée selon la procédure accélérée, a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 7 décembre 2020. Par un arrêté du 22 février 2021, le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a accordé un délai de départ volontaire de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 14 avril 2021 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si M. B... soutient avoir soulevé à l'audience un moyen tiré de ce que la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 7 décembre 2020 ne lui a pas été notifiée et qu'il disposait toujours du droit de se maintenir sur le territoire français auquel le premier juge n'a pas répondu, il ne l'établit pas à défaut de procès-verbal d'audience et de mention du moyen dans les visas du jugement qui fait foi jusqu'à preuve du contraire. Dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

3. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ".

4. Aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction résultant de la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci (...) ". Aux termes de l'article L. 743-2 de ce code : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) 7° L'office a pris une décision de rejet dans les cas prévus au I et au 5° du III de l'article L. 723-2 (...) ".

5. Aux termes de l'article L. 723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " I. - L'office statue en procédure accélérée lorsque : / 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr en application de l'article L. 722-1 ; / (...) V. - Dans tous les cas, l'office procède à un examen individuel de chaque demande dans le respect des garanties procédurales prévues au présent chapitre. Il peut décider de ne pas statuer en procédure accélérée, sauf si le demandeur est dans la situation mentionnée au 5° du III du présent article, lorsque cela lui paraît nécessaire pour assurer un examen approprié de la demande, en particulier si le demandeur provenant d'un pays inscrit sur la liste mentionnée au cinquième alinéa de l'article L. 722-1 invoque des raisons sérieuses de penser que son pays d'origine ne peut pas être considéré comme sûr en raison de sa situation personnelle et au regard des motifs de sa demande (...) "

6. Par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 7 décembre 2020, notifiée par lettre recommandée avec avis de réception, la demande d'asile de M. B... a été rejetée. Il ressort des pièces du dossier que le pli recommandé contenant cette décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a été retourné avec une étiquette adhésive intitulée " restitution de l'information à l'expéditeur " indiquant " pli avisé et non réclamé ". Dans ces conditions, ce pli, qui n'a pas été retiré par M. B... au bureau de poste, lui a été régulièrement notifié. Il s'ensuit que le requérant ne peut faire valoir que l'arrêté en litige méconnaît l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir une ingérence dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire (...) à la protection de la santé, de la morale ou de la protection des droits et liberté d'autrui ".

8. Si M. B... soutient qu'il n'a pas la nationalité arménienne, il ressort des pièces du dossier qu'il a présenté une demande d'asile en faisant état de cette nationalité et il n'apporte aucun élément permettant de retenir qu'il serait apatride. M. B... fait également valoir qu'il est entré en France le 31 mai 2013 avec sa mère et son beau-père, qu'il y a été scolarisé depuis 2013 ainsi que sa sœur. Toutefois, M. B..., célibataire et sans enfant, n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales en Arménie. En outre, sa mère et son beau-père ne bénéficient pas d'un droit au séjour en France. Il ne justifie d'aucune intégration socioprofessionnelle. Par suite, la décision en litige n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport à ses motifs et n'a ainsi par méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la décision en litige n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

9. Si M. B... fait valoir que son renvoi en Arménie l'exposerait à un risque de traitements inhumains et dégradants compte tenu des risques de persécutions, il n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité de ces allégations alors qu'il est constant que sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 7 décembre 2020 de l'Office français des réfugiés et apatrides. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... ou Kalmikyan est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... (nom d'usage Kalmikyan) et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

Mme Caraës, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 octobre 2022.

La rapporteure,

R. Caraës

Le président,

D. PruvostLa greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY03408


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY03408
Date de la décision : 20/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : DACHARY

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-10-20;21ly03408 ?
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