La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/05/2023 | FRANCE | N°22LY03220

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 11 mai 2023, 22LY03220


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 25 février 2022 par lequel le préfet de l'Ardèche l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et l'a astreinte à se présenter une fois par semaine auprès des services du commissariat de police de Privas (Ardèche).

Par un jugement n° 2202074 du 20 juin 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure de

vant la cour

Par une requête, enregistrée le 27 octobre 2022, Mme B..., représentée par Me Gu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 25 février 2022 par lequel le préfet de l'Ardèche l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et l'a astreinte à se présenter une fois par semaine auprès des services du commissariat de police de Privas (Ardèche).

Par un jugement n° 2202074 du 20 juin 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 27 octobre 2022, Mme B..., représentée par Me Guerault, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Ardèche de mettre fin à toute mesure de contrôle et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant a été méconnu.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, la requête a été dispensée d'instruction.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Pin, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Selon ses déclarations, Mme B..., ressortissante bangladaise née en 1980, est entrée en France le 29 juillet 2020 pour y solliciter le bénéfice du statut de réfugié. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 26 mai 2021 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 6 décembre 2021 de la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 25 février 2022, le préfet de l'Ardèche l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et l'a astreinte à se présenter, une fois par semaine, dans les services du commissariat de police de Privas. Mme B... relève appel du jugement du 20 juin 2022 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, et contrairement à ce que soutient Mme B..., la circonstance que la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui comporte l'énoncé des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement, ne contienne pas de développements explicites relatifs à l'appréciation portée sur l'intérêt supérieur de ses enfants, dont l'arrêté litigieux fait d'ailleurs dûment mention, ne révèle, par elle-même, ni qu'elle serait insuffisamment motivée, ni que le préfet n'aurait pas tenu compte de l'intérêt supérieur de ces enfants. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la mesure d'éloignement doit être écarté.

3. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., entrée en France moins de deux ans avant l'édiction de l'arrêté attaqué, n'a été autorisée à séjourner sur le territoire français que le temps de l'instruction de sa demande d'asile. Si la requérante fait valoir qu'elle a fourni des efforts d'intégration, notamment par l'apprentissage de la langue française, elle ne justifie toutefois pas d'une intégration particulière, notamment professionnelle, dans la société française. Elle ne démontre pas davantage être dépourvue d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante ans. En outre, Mme B... n'établit pas, ni même ne soutient, qu'elle seraient empêchée de reconstituer sa cellule familiale, avec ses deux enfants, nés en 2004 et 2006, hors de France, et notamment dans son pays d'origine. Si ses enfants sont scolarisés en France, respectivement en classe de première année du certificat d'aptitude professionnelle d'électricité et en classe de troisième, et obtiennent de bons résultats scolaires, il ressort cependant des pièces du dossier que, compte tenu de la brièveté de leur séjour et de ce qu'ils ont passé la majeure partie de leur vie au Bengladesh, leur scolarisation ne fait pas obstacle à la poursuite de la vie familiale et de leur scolarité hors de France. Dans ces conditions, eu égard notamment à la faible durée et aux conditions du séjour de l'intéressée, la mesure d'éloignement en litige n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts qu'elle poursuit. Par suite, le préfet de l'Ardèche n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante. La décision contestée, qui n'a ni pour objet ni pour effet de séparer Mme B... de ses enfants mineurs, n'a pas davantage méconnu le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, sous astreinte, ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C.... Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de l'Ardèche.

Délibéré après l'audience du 20 avril 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Courbon, présidente de la formation de jugement,

Mme Caraës, première conseillère,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mai 2023.

Le rapporteur,

F.-X. Pin

La présidente,

A. CourbonLa greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY03220


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY03220
Date de la décision : 11/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme COURBON
Rapporteur ?: M. François-Xavier PIN
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : GUERAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-05-11;22ly03220 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award