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19/06/2006 | FRANCE | N°05MA00488

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5eme chambre - formation a 3, 19 juin 2006, 05MA00488


Vu la requête, enregistrée le 25 février 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 05MA00488, présentée par Me Mourgues, avocat, pour l'ASSOCIATION POUR MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS, dont le siège est BP 12 à Lavastide d'Anjou (11320), représentée par sa présidente en exercice, et Mme Josiane X, élisant domicile ... ;

L'ASSOCIATION POUR MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0203331 et 0203332 du 30 novembre 2004 du Tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a

rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération en date du 24...

Vu la requête, enregistrée le 25 février 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 05MA00488, présentée par Me Mourgues, avocat, pour l'ASSOCIATION POUR MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS, dont le siège est BP 12 à Lavastide d'Anjou (11320), représentée par sa présidente en exercice, et Mme Josiane X, élisant domicile ... ;

L'ASSOCIATION POUR MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS et Mme X demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0203331 et 0203332 du 30 novembre 2004 du Tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération en date du 24 mai 2002 par laquelle le conseil municipal de Ricaud a refusé d'aménager une aire de stationnement sécurisée et d'inscrire au budget communal les sommes correspondant à ces travaux, à la condamnation de la commune de Ricaud à leur verser la somme de 6 377,95 euros en réparation du préjudice qu'elles ont subi, et la somme de 300 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite délibération ;

3°) de condamner la commune de Ricaud à leur verser la somme de 6 377,95 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 octobre 2004 en réparation du préjudice qu'elles ont subi ;

4°) de condamner la commune de Ricaud à leur verser une somme de 750 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et notamment son protocole additionnel n° 1 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code pénal ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mai 2006 :

- le rapport de M. Pocheron, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte des conclusions et des moyens de la requête que Mme X et l'ASSOCIATION MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS ont entendu demander l'annulation du jugement en date du 30 novembre 2004 du Tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de la délibération en date du 24 mai 2002 par laquelle le conseil municipal de Ricaud (Aude) a refusé d'aménager en urgence une aire de stationnement gratuite et sécurisée et d'inscrire les sommes nécessaires au budget de la commune, à ce que la commune soit condamnée à leur verser la somme de 6 377,95 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 octobre 2004 au titre du préjudice qu'elles ont subi et la somme de 750 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Sur la qualité pour agir du maire de Ricaud :

Considérant que par délibération en date du 18 juillet 2005, dont copie a été produite au dossier, le conseil municipal de Ricaud a mandaté le maire en exercice aux fins de défendre la commune dans la présente instance ; que, par suite, les associations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que celui-ci serait dépourvu de qualité pour agir ; que le moyen tiré de ce qu'il existerait un conflit d'intérêts entre le cabinet d'avocats conseil de la commune et Mme X en violation de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est assorti en appel d'aucune précision permettant d'en apprécier la portée ou le bien-fondé ;

Sur la recevabilité des conclusions d'appel et de première instance aux fins d'indemnité :

Considérant que la circonstance que les conclusions sus-analysées ont été présentées pour la première fois devant le tribunal administratif le 9 novembre 2004 alors que la demande introductive d'instance se bornait à exposer des conclusions en excès de pouvoir n'est pas de nature à les rendre irrecevables ; que Mme X ne justifie devant le juge administratif ni en son nom propre ni même au titre d'un mandat que son concubin lui aurait confié, d'un droit à la réparation du préjudice causé par l'incendie volontaire du véhicule de M. Y ;qu'elle est toutefois recevable à présenter des conclusions aux fins d'indemnité du chef du caractère éventuellement fautif de la délibération litigieuse du 24 mai 2002 ; qu'en revanche, l'ASSOCIATION MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS, qui n'a pas présenté de demande préalable de réparation de son préjudice à la commune de Ricaud, ne démontre pas sa qualité à présenter devant le juge administratif des conclusions aux fins d'indemnité ; que celles-ci ne sont donc pas recevables ;

Au fond :

Considérant qu'il ressort des motifs du jugement en date du 30 novembre 2004 que le tribunal a omis de statuer sur le moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de ce que la délibération du 24 mai 2002 constituait une discrimination tombant sous le coup des articles 225-1 et 225-2 du code pénal ; qu'ainsi, le jugement du Tribunal administratif de Montpellier en date du 30 novembre 2004 doit être annulé en tant qu'il a rejeté la demande de Mme X et de l'ASSOCIATION MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS tendant à l'annulation de la délibération du 24 mai 2002 du conseil municipal et à la condamnation de la commune à leur verser la somme de 500 euros au titre de l'article L.741-1 du code de justice administrative, et de Mme X aux fins d'indemnité ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes sus analysées présentées par Mme X et l'ASSOCIATION MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS devant le Tribunal administratif de Montpellier ;

Sur la légalité de la délibération du 24 mai 2002 :

Considérant que par la délibération en cause, le conseil municipal de Ricaud, a donné un avis défavorable à l'unanimité à une demande d'un Collectif des administrés de Ricaud lui demandant de décider l'aménagement d'urgence d'une aire de stationnement gratuite et sécurisée et d'inscrire la dépense afférente au budget de la commune ; qu'il doit être regardé comme ayant rejeté cette demande ;

Considérant, en premier lieu, que la délibération attaquée n'est pas au nombre des décisions qui doivent être motivées au sens de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de ladite délibération ne peut qu'être rejeté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L.2121-29 du code général des collectivités territoriales : Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune… ; que la délibération litigieuse, par laquelle le conseil municipal de Ricaud a refusé de créer une aire de stationnement gratuite et sécurisée sur le territoire de la commune à la demande de certains de ses habitants, porte sur un objet d'intérêt communal ; qu'ainsi, le conseil municipal doit être regardé comme ayant nécessairement fondé cette délibération sur l'article L.2121-29 du code général des collectivités territoriales précité ; que, par suite, les moyens tirés du défaut de base légale de ladite délibération et de compétence du conseil municipal à voter une telle délibération, qui ne ressortit pas aux pouvoirs de police de maire, doivent être rejetés ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aucun texte législatif ou réglementaire ni aucun principe général du droit n'imposent à une commune de mettre à disposition de ceux de ses habitants qui seraient, du fait d'une interdiction de stationner sur la voie publique, dans l'impossibilité de garer leurs véhicules à proximité de leur immeuble, une aire de stationnement, de surcroît gratuite et sécurisée ; qu'ainsi les demanderesses ne sont pas fondées à soutenir que la commune aurait méconnu en l'espèce le principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques, l'article 4 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, l'article 1er du protocole n° 1 additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou le droit au respect de la propriété privée ; qu'il en résulte également que les moyens tirés de ce que la commune pouvait inscrire la dépense en cause à son budget alors que celui-ci était déjà voté, de ce qu'elle aurait dû procéder à une étude juridique, technique et financière avant de réglementer le stationnement, de ce que la délibération en date du 1er février 2002 par laquelle le conseil municipal a décidé du principe de cette réglementation du stationnement était illégale, de ce que ce même conseil municipal savait que certaines des habitations concernées ne disposaient pas de garage, et de ce que la commune n'apportait pas la preuve qu'il existait cent places de stationnement à proximité des lieux concernés par l'interdiction de stationner, à les supposer même établis, sont sans incidence sur la légalité de la délibération litigieuse ; que Mme X et l'ASSOCIATION MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS ne sont pas, compte tenu de ce qui précède et des pièces du dossier, fondées à soutenir que cette délibération serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. André Z et Mme Yolande A, respectivement maire de la commune et conseillère municipale à la date de la délibération attaquée, auraient eu un intérêt personnel à l'affaire distinct de l'intérêt général de la commune et devraient par suite être regardés comme intéressés à ladite affaire au sens de l'article L.2131-11 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la délibération querellée aurait été votée en violation de ces dispositions de l'article L.2131-11 du code général des collectivités territoriales doit être rejeté ;

Considérant, en cinquième lieu, que le moyen tiré de ce que le maire aurait commis une faute en s'abstenant d'exercer les pouvoirs de police qu'il détient en application des articles L.2211-1, L.2212-1 et L.2212-2 du code général des collectivités territoriales est sans incidence sur la légalité d'une délibération prise par son conseil municipal ; que, par suite, ce moyen ne peut qu'être rejeté ;

Considérant enfin qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en votant la délibération litigieuse, le conseil municipal aurait opéré une discrimination entre personnes physiques ou morales à raison de leurs opinions politiques ; que, par suite, le moyen tiré de ce que ladite délibération aurait constitué une discrimination au sens des articles 225-1 et 225-2 du code pénal doit être rejeté ;

Considérant que les conclusions tendant à l'annulation de la délibération en date du 24 mai 2002 du conseil municipal de Ricaud, doivent être rejetées ;

Sur les conclusions aux fins d'indemnité de Mme X :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que la commune n'a commis aucune faute en refusant de décider l'aménagement d'une aire de stationnement gratuite et sécurisée demandée notamment par Mme X ; que le principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques n'a notamment pas été en l'espèce méconnu ; qu'il ne résulte ainsi pas de l'instruction que les sujétions qui étaient imposées à l'intéressée alors que le stationnement était interdit sur la portion de la rue des Platanes où elle résidait, et que le conseil municipal avait voté la délibération litigieuse, excédaient celles qu'un riverain peut normalement être appelé à supporter ; que Mme X n'établit dés lors pas avoir subi un préjudice présentant un caractère anormal et spécial dont la réparation incomberait à la commune ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions précitées de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner Mme X et l'ASSOCIATION MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS à payer à la commune de Ricaud une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font en revanche obstacle que la commune de Ricaud, qui n'est pas en l'espèce la partie perdante, soit condamnée à payer à Mme X et à l'ASSOCIATION MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS la somme qu'elles demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Montpellier en date du 30 novembre 2004 est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de Mme X et de l'ASSOCIATION MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS tendant à l'annulation de la délibération du 24 mai 2002 du conseil municipal de Ricaud et à la condamnation de la commune de Ricaud à leur verser la somme de 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, et la demande de Mme X tendant à la condamnation de la commune de Ricaud à lui verser la somme de 6 377,95 euros.

Article 2 : La demande de Mme X et de l'ASSOCIATION MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS tendant à l'annulation de la délibération du 24 mai 2002 du conseil municipal de Ricaud et à la condamnation de la commune de Ricaud à leur verser la somme de 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, et celle de Mme X tendant à la condamnation de la commune de Ricaud à lui verser la somme de 6 377,95 euros, présentées devant le Tribunal administratif de Montpellier, ainsi que le surplus des conclusions de leur requête sont rejetées.

Article 3 : L'ASSOCIATION POUR MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS et Mme Josiane X verseront à la commune de Ricaud, une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la commune de Ricaud est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION POUR MIEUX VIVRE A RICAUD ET EN LAURAGAIS, à Mme Josiane X et à la commune de Ricaud.

N° 05MA00488 4

mp


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 05MA00488
Date de la décision : 19/06/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONMATI
Rapporteur ?: M. Michel POCHERON
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : MOURGUES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-06-19;05ma00488 ?
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