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29/06/2006 | FRANCE | N°02MA01226

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 3, 29 juin 2006, 02MA01226


Vu la requête, enregistrée le 3 juillet 2002, présentée pour la COMMUNE DU THOLONET, représentée par son maire en exercice à ce dûment autorisé par une délibération du conseil municipal du 30 octobre 2001 par Me Z..., avocat ; La COMMUNE DU THOLONET demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 01-3351 / 01-3563/01-5956 en date du 25 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a annulé, à la demande des sociétés TIMLE et LIDL et sur déféré du Préfet des Bouches-du-Rhône, la délibération du conseil municipal du Tholonet en date du 10 avril 200

1 ainsi que l'arrêté en date du 13 mai 2001 du maire du Tholonet décidant de r...

Vu la requête, enregistrée le 3 juillet 2002, présentée pour la COMMUNE DU THOLONET, représentée par son maire en exercice à ce dûment autorisé par une délibération du conseil municipal du 30 octobre 2001 par Me Z..., avocat ; La COMMUNE DU THOLONET demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 01-3351 / 01-3563/01-5956 en date du 25 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a annulé, à la demande des sociétés TIMLE et LIDL et sur déféré du Préfet des Bouches-du-Rhône, la délibération du conseil municipal du Tholonet en date du 10 avril 2001 ainsi que l'arrêté en date du 13 mai 2001 du maire du Tholonet décidant de retirer le permis de construire délivré le 24 mai 2000 à la société TIMLE et l'arrêté du 21 novembre 2000 décidant du transfert dudit permis à la société LIDL ;

2°/ de rejeter les demandes de première instance ;

3°/ de condamner les sociétés TIMLE et LIDL à lui verser une somme de 2.000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de commerce ;

Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1993 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 juin 2006,

- le rapport de Mme Buccafurri, rapporteur ;

- les observations de M. X..., attaché administratif pour le préfet de la région Provence, Alpes, Côte d'Azur et de Me Himbaut substituant Me Y... pour la société foncière TIMLE et la société LIDL ;

- et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la COMMUNE DU THOLONET relève appel du jugement susvisé en date du 25 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a annulé, à la demande des sociétés TIMLE et LIDL et sur déféré du préfet des Bouches-du-Rhône, la délibération du conseil municipal du Tholonet en date du 10 avril 2001 ainsi que l'arrêté en date du 13 mai 2001 du maire du Tholonet décidant de retirer le permis de construire délivré le 24 mai 2000 à la société TIMLE et l'arrêté du 21 novembre 2000 décidant du transfert dudit permis à la société LIDL ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que, contrairement à ce que soutient la COMMUNE DU THOLONET, les premiers juges ont écarté expressément l'argumentation qu'elle invoquait, et tirée de ce que la société TIMLE ne justifiait pas d'un intérêt à agir à l'égard des décisions qu'elle contestait et plus particulièrement en tant que le retrait concernait le permis de construire du 24 mai 2000 ; qu'ainsi que l'ont à bon droit estimé les premiers juges, la société TIMLE justifiait d'un intérêt à contester les décisions en litige, notamment en ce qu'elles opéraient le retrait du permis de construire du 24 mai 2000, nonobstant l'arrêté du 21 novembre 2000, autorisant le transfert du permis de construire au bénéfice de la société LIDL, dès lors que les décisions contestées retiraient tant ledit permis de construire que l'arrêté de transfert ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'après avoir rappelé que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision, les premiers juges ont estimé que le comportement frauduleux, fondant les décisions de retrait contestées, n'était pas établi et qu'ainsi, alors qu'aucune autre illégalité n'était invoquée, le conseil municipal, qui, au demeurant n'était pas compétent pour ce faire, et le maire de la COMMUNE DU THOLONET ne pouvaient plus opérer le retrait des autorisations délivrées les 24 mai et 21 novembre 2000 ; que, ce faisant, contrairement à ce que soutient la COMMUNE DU THOLONET, le tribunal a implicitement mais nécessairement écarté l'argumentation qu'elle invoquait et tirée de ce que lesdites autorisations, dès lors qu'elles étaient entachées selon elle de fraude, pouvaient être retirées sans condition de délai ;

Considérant, en troisième lieu, que, compte tenu du motif d'annulation retenu par les premiers juges et de ce que les conditions de retrait des décisions individuelles expresses créatrices de droit sont indépendantes du délai de recours contentieux ouvert à leur encontre, les premiers juges ont pu s'abstenir de répondre à l'argumentation, qui était inopérante, selon laquelle, en l'absence d'affichage régulier sur le terrain du permis de construire du 24 mai 2000, le délai de recours contentieux ouvert à son encontre n'avait pas commencé à courir ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DU THOLONET n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité ;

Sur la légalité de la délibération du conseil municipal du 10 avril 2001 et de l'arrêté municipal du 13 avril 2001 susvisés :

Considérant, d'une part, que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ; que, toutefois, un acte administratif obtenu par fraude ne crée pas de droits et, par suite, peut être retiré ou abrogé par l'autorité compétente pour le prendre, alors même que le délai de retrait de droit commun serait expiré ; que, d'autre part, il résulte de l'article L.451-5 du code de l'urbanisme et des dispositions des articles 28, 29 et 32 de la loi susvisée n° 73-1193 du 27 décembre 1973, dans sa rédaction applicable au présent litige résultant de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996, reprises aux articles L.720-3, L.720-5 et L.720-10 du code de commerce, que lorsqu'un projet de création d'un magasin de commerce de détail est soumis à la délivrance d'une autorisation d'exploitation commerciale, celle-ci doit être préalable à l'octroi du permis de construire, l'article L.720-5 du code de commerce soumettant à autorisation d'exploitation commerciale «1º La création d'un magasin de commerce de détail d'une surface de vente supérieure à 300 m², résultant soit d'une construction nouvelle, soit de la transformation d'un immeuble existant » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, le 12 janvier 2000, la société TIMLE a déposé une demande de permis de construire concernant l'édification d'un bâtiment mixte de commerces et d'activités, sur des parcelles cadastrées Section BN n° 902,530 et 899 en partie, situées au lieu-dit «Le petit Cabriès Sud» sur le territoire de la COMMUNE DU THOLONET, ladite demande faisant état d'une surface de vente de 299,44 m², d'une surface d'activités de 208,85 m², de réserves d'une surface de 323,73 m² ainsi que des locaux sociaux pour une surface de 70,94 m² ; que le permis de construire sollicité lui a été délivré par le maire de la COMMUNE DU THOLONET le 24 mai 2000 ; que, le 31 août 2000, la société bénéficiaire a sollicité le transfert du permis en cause au profit de la société LIDL, le transfert étant autorisé par un arrêté municipal du 21 novembre 2000 ; que, les décisions de retrait susvisées en date des 10 avril 2001 et 13 avril 2001 ont été prises au motif que les autorisations des 24 mai et 21 novembre 2000 avaient été obtenues par fraude dès lors que les dossiers de demandes de permis avaient été présentées afin de faire apparaître une surface de vente inférieure au seuil de la saisine de la Commission Départementale d'Equipement Commercial (CDEC) ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'examen du plan de masse annexé à la demande de permis de construire ainsi que de la notice de sécurité que les locaux d'activités ne comportent pas d'accès sur la surface de vente dont ils sont séparés physiquement par des cloisons de type «placostyl coupe-feu 2 heures», dont la COMMUNE DU THOLONET n'établit pas qu'elles seraient aisément démontables ou amovibles ; qu'en outre, il résulte des mentions figurant dans la notice de sécurité que les locaux en cause, sont destinés à accueillir des activités de prestations de services n'accueillant pas du public ; qu'à cet égard, les intimées soutiennent, sans être ultérieurement contredites, que ces locaux accueilleront notamment des blanchisseries industrielles ou des ateliers de réparation de matériel électroménager intervenant comme sous-traitant de magasins de distribution et n'ont donc pas vocation à recevoir du public ; que, dans ces conditions, la COMMUNE DU THOLONET n'établit pas que les locaux en cause auraient dû être comptabilisées dans la surface de vente déclarée par la société pétitionnaire ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte également de l'examen du plan de masse annexé à la demande de permis de construire ainsi que de la notice de sécurité, que les surfaces affectées à un usage de réserve sont séparées de la surface de vente par le même type de cloisons, et comportent une seule ouverture, dite porte de distribution, servant, selon les déclarations non contestées des sociétés intimées, à l'approvisionnement des rayons ; que ces surfaces ouvrent sur l'extérieur sur un quai de déchargement et une rampe d'accès pour le dépôt des marchandises ; que, compte tenu de l'ensemble de leurs caractéristiques, la COMMUNE DU THOLONET n'établit pas que lesdites surfaces, nonobstant leur importance, ne constitueraient pas des réserves et auraient dû être comptabilisées dans les surfaces de vente ;

Considérant, en troisième lieu, que la COMMUNE DU THOLONET soutient, en versant aux débats un décompte des surfaces opéré par un géomètre-expert désigné par ses soins à partir des plans annexés à la demande de permis de construire, que la surface de vente ne serait pas de 299,44 m² mais de 300,21 m², compte tenu de la prise en compte des surfaces des seuils des portes de l'accès extérieur, des sanitaires ainsi que de l'accès à la réserve ci-dessus évoquée ; que, toutefois, de telles surfaces, eu égard à leur nature non directement liée à la vente, ne devaient pas être intégrées à la surface de vente ; qu'à supposer que l'on puisse prendre en compte les surfaces des seuils des portes, les surfaces se rattachant à l'accès aux sanitaires ou celui donnant sur la réserve, ne peuvent être regardées, eu égard à la nature des locaux auxquels elles donnent accès comme des surfaces de vente ; qu'en outre, ainsi que le soutiennent les sociétés intimées, le géomètre mandaté par la commune n'a pas déduit, comme il aurait dû le faire, l'épaisseur des murs et des portes des accès en cause ; que, dans ces conditions, la surface de vente était, en toute hypothèse, inférieure au seuil de 300 m² ;

Considérant, enfin, que la demande de permis de construire mentionnait l'ensemble des surfaces en cause et leur destination ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DU THOLONET n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la fraude qu'elle invoquait à l'encontre des autorisations des 24 mai et 21 novembre 2000 n'était pas établie ; que lesdites autorisations constituant, en l'absence de toute fraude, des décisions individuelles expresses créatrices de droit, le conseil municipal, qui, au demeurant n'était pas compétent pour prononcer ledit retrait, et le maire de la COMMUNE DU THOLONET ne pouvaient légalement procéder à leur retrait les 10 avril et 13 avril 2001, soit après l'expiration du délai de quatre mois courant de la date de leurs délivrances ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la circonstance, à la supposer établie, de l'absence d'affichage régulier sur le terrain du permis de construire du 24 mai 2000 est sans effet sur l'expiration du délai de retrait de droit commun qui était ouvert à l'autorité administrative compétente ;

Considérant, il est vrai que la COMMUNE DU THOLONET fait valoir, devant la Cour, que les autorisations délivrées étaient entachées d'illégalité au regard des dispositions de l'article NA-3 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) de la commune ;

Considérant que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, en l'absence de fraude, les autorisations en litige, alors même qu'elles auraient été entachées d'illégalité, ne pouvaient plus faire l'objet d'un retrait à la date des 10 et 13 avril 2001, du fait de l'expiration du délai de retrait de quatre mois ; que, par suite, le motif invoqué devant le juge par la COMMUNE DU THOLONET n'est pas de nature à justifier légalement les décisions de retrait contestées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la COMMUNE DU THOLONET n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 25 avril 2002, le Tribunal administratif de Marseille a annulé la délibération du conseil municipal de la COMMUNE DU THOLONET du 10 avril 2001 ainsi que l'arrêté municipal du 13 avril 2001 ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, il y a lieu, sur le fondement de ces dernières dispositions, de mettre à la charge de la COMMUNE DU THOLONET le paiement à la société TIMLE et à la société LIDL de la somme de 1.500 euros au titre des frais qu'elles ont exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DU THOLONET est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DU THOLONET versera à la société TIMLE et à la société LIDL une somme de 1.500 euros (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DU THOLONET, à la société TIMLE, à la société LIDL, au préfet des Bouches-du-Rhône et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

N° 02MA01226 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02MA01226
Date de la décision : 29/06/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: Mme Isabelle BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. CHERRIER
Avocat(s) : SITRI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-06-29;02ma01226 ?
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