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15/12/2010 | FRANCE | N°09MA02660

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 15 décembre 2010, 09MA02660


Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2009, présentée pour M. Didier A, demeurant ...), par Me Gruwez ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803720 en date du 3 juillet 2009 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 23 juin 2005 portant invalidation de son permis de conduire pour solde de points nul, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux formé le 14 octobre 2008 contre cette décision ainsi que les décisions successives de

retrait de points prises à son encontre et d'autre part, à ce qu'il s...

Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2009, présentée pour M. Didier A, demeurant ...), par Me Gruwez ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803720 en date du 3 juillet 2009 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision en date du 23 juin 2005 portant invalidation de son permis de conduire pour solde de points nul, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux formé le 14 octobre 2008 contre cette décision ainsi que les décisions successives de retrait de points prises à son encontre et d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de lui restituer douze points sur son permis de conduire ;

2°) d'annuler la décision en date du 23 juin 2005 portant invalidation de son permis de conduire pour solde de points nul, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux formé le 14 octobre 2008 contre cette décision ainsi que les décisions successives de retrait de points prises à son encontre ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de lui restituer douze points sur son permis de conduire ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code pénal et le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative et l'arrêté d'expérimentation du Vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 novembre 2010,

- le rapport de Mme Fernandez, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Guidal, rapporteur public ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes de l'article R.421-1 du code de justice administrative : Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification (...) de la décision attaquée. ... ;

Considérant qu'aucun principe général, ni aucune disposition législative ou réglementaire, ne fait obligation au titulaire d'un permis de conduire de déclarer à l'autorité administrative sa nouvelle adresse en cas de changement de domicile ; qu'il en résulte qu'alors même qu'il n'aurait pas signalé ce changement aux services compétents, la présentation à une adresse où il ne réside plus du pli notifiant une décision relative à son permis de conduire et prise à l'initiative de l'administration n'est pas de nature à faire courir le délai de recours contentieux ; que la circonstance qu'il serait également titulaire du certificat d'immatriculation d'un véhicule, et soumis en cette qualité, par les dispositions de l'article R.322-7 du code de la route, à l'obligation de signaler ses changements de domicile aux services compétents en la matière, est à cet égard sans incidence ;

Considérant que s'il résulte de l'instruction que la décision 48 S du ministre de l'intérieur prononçant la perte de points du permis de conduire de M. A à la suite de l'infraction constatée le 15 janvier 2005, rappelant les quatre pertes de points résultant de précédentes infractions constatées les 22 janvier 2003, 1er juillet 2003, 1er juillet 2003 et 24 avril 2004 et constatant l'invalidité de ce titre de conduite du fait du solde nul des points, a été notifiée à l'intéressé par l'envoi le 20 juin 2005 d'une lettre recommandée avec avis de réception, laquelle a été présentée le 23 juin suivant à l'adresse 7 rue du Moulin de la Roche à Gentilly (94250) ; que le pli a été retourné à l'envoyeur sans avoir été distribué comme pli non réclamé ; que, toutefois, il n'est pas contesté que M. A n'habitait plus à cette adresse mais avait déménagé à Bessège dans le département du Gard au 73 rue de la République ; que, dans ces conditions, à supposer même qu'un avis de passage ait été laissé à son ancienne adresse dans le département du Val de Marne, la présentation du pli recommandé relatif à la décision 48 S prise à l'initiative des services du ministère de l'intérieur compétents à une adresse où M. A n'habitait plus, n'a pas été de nature à faire courir à son encontre le délai de recours contentieux ; que, dès lors, en faisant droit à la fin de non recevoir tirée de la tardiveté du recours de M. A, opposée par le ministre de l'intérieur, le premier juge a entaché d'irrégularité son jugement ; qu'ainsi, le jugement en date du 3 juillet 2009 du Tribunal administratif de Nîmes doit être annulé de ce chef ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Nîmes ;

Sur les fins de non recevoir opposées par le ministre de l'intérieur :

Considérant qu'ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, il ne résulte pas de l'instruction que les conclusions de M. A tendant à l'annulation de la décision en date du 23 juin 2005 du ministre de l'intérieur portant invalidation de son permis de conduire ; que dès lors qu'il n'est pas établi que les décisions de cette même autorité ayant retiré des points de son permis de conduire auraient fait l'objet individuellement d'une notification à M. A, les conclusions de ce dernier tendant à leur annulation ne peuvent être regardées comme tardives ; que le délai de recours n'ayant pas couru à son encontre, le recours gracieux formulé le 14 octobre 2008 par M. A n'était pas tardif et les conclusions de ce dernier contre la décision implicite née sur ce recours gracieux étaient recevables ;

Sur la légalité des décisions attaquées :

En ce qui concerne les décisions retirant des points du permis de conduire de M. A :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de M. A :

Considérant d'une part, qu'aux termes de l'article L.223-1 du code de la route : Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue (...)/ lorsque le nombre de points est nul, le permis perd sa validité./ La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive ; que l'article L.223-2 du même code prévoit que I.- Pour les délits, le retrait de points est égal à la moitié du nombre maximal de points. / II. - Pour les contraventions, le retrait de points est, au plus égal à la moitié du nombre maximal de points. / III. - Dans le cas où plusieurs infractions entraînant retrait de points sont commises simultanément, les retraits de point se cumulent dans la limite des deux tiers du nombre maximal de points. ; qu'aux termes de l'article L.223-3 du même code : Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions des l'article L.223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L.225-1 à L.225-9. ... ; qu'enfin l'article R.223-3 dudit code dispose I. - Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L.223-1. / II. - Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. Le droit d'accès aux informations ci-dessus mentionnées s'exerce dans les conditions fixées par les articles L.225-1 à L.225-9. / III.- Lorsque le ministre de l'intérieur constate que la réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie dans les conditions prévues par le quatrième alinéa de l'article L.223-1, il réduit en conséquence le nombre de points affecté au permis de conduire de l'auteur de cette infraction et en informe ce dernier par lettre simple. Le ministre de l'intérieur constate et notifie à l'intéressé, dans les mêmes conditions, les restitutions de points obtenues en application des alinéas 1 et 3 de l'article L.223-6. / IV.- Lorsque le nombre de points est nul, le préfet du département (...) enjoint à l'intéressé, par lettre recommandée, de restituer son titre de conduite dans un délai d'une semaine à compter de la réception de cette lettre. ; qu'il résulte de ces dispositions précitées que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues par les articles précités L.223-3 et R.223-3 du code de la route, sur d'une part, l'existence d'un traitement automatisé des points et la possibilité d'exercer son droit d'accès aux informations y afférentes conformément aux articles L.225-1 à L.225-9 du code de la route et d'autre part, sur le fait que l'amende forfaitaire notamment établit la réalité de l'infraction, dont la qualification est précisée, et entraîne un retrait de points correspondant à cette infraction ; que ces informations constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information en délivrant un tel document ; que cependant il incombe à l'intéressé lorsqu'il entend faire valoir que les mentions figurant dans le document qui lui a été remis sont inexactes ou incomplètes, de mettre le juge en mesure de se prononcer, en produisant notamment le document dont il conteste l'exactitude ; que ni l'article L.223-3, ni l'article R.223-3 du code de la route n'exigent que le conducteur soit informé du nombre exact de points susceptibles de lui être retirés dès lors que la qualification de l'infraction qui lui est reprochée est dûment portée à sa connaissance ;

Considérant que le ministre à qui incombe la charge de la preuve, se borne a demander à la Cour de confirmer le jugement par adoption des motifs retenus par le premier juge, sans produire le moindre élément de nature à établir que lors des infractions relevées à l'encontre de M. A qui ont donné lieu aux différents retraits de points de son permis de conduire, le contrevenant a reçu l'information préalable exigée par les dispositions précitées des articles L.223-1 et R.233-1 du code de la route ; que, par suite, M. A est fondé à demander l'annulation de cinq décisions retirant respectivement un point, deux points, trois points, deux points et quatre points de son permis de conduire résultant des infractions relevées à son encontre les 22 janvier 2003, 1er juillet 2003, 1er juillet 2003, 24 avril 2004 et 15 janvier 2005 ;

En ce qui concerne les autres décisions attaquées :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de M. A :

Considérant qu'en conséquence de l'annulation des décisions du ministre de l'intérieur retirant des points au permis de conduire, le solde du capital de points de ce titre de conduite n'était pas nul ; que, par suite, M. A est fondé à demander l'annulation de la décision par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté l'invalidité de son permis de conduire ainsi que de la décision implicite née sur le recours gracieux qu'il a formulé le 14 octobre 2008 ;

Sur les conclusions de M. A à fin d'injonction :

Considérant que l'exécution du présent arrêt, eu égard à ses motifs, implique nécessairement, en application des dispositions de l'article L.911-1 du code de justice administrative, que le ministre chargé de l'intérieur restitue, dans un délai d'un mois à compter du présent arrêt, à M. A son titre de conduite affecté d'un crédit de douze points, qui seront rétablis dans le traitement automatisé mentionné à l'article L.223-3 du code de la route, sauf si l'intéressé a obtenu un nouveau permis de conduire et sans préjudice des décisions de retrait de points à raison d'autres infractions commises postérieurement par l'intéressé ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant qu'il y a lieu de condamner l'Etat à verser, dans les circonstances de l'espèce, à M. A la somme de 1 500 euros qu'il demande au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nîmes en date du 3 juillet 2009 est annulé.

Article 2 : Les décisions du ministre chargé de l'intérieur retirant respectivement un point, deux points, trois points, deux points et quatre points du permis de conduire de M. A résultant des infractions relevées à son encontre les 22 janvier 2003, 1er juillet 2003, 1er juillet 2003, 24 avril 2004 et 15 janvier 2005, la décision de la même autorité constatant en juin 2005 l'invalidité du permis de conduire de M. A et la décision implicite de rejet née sur le recours gracieux formulé par ce dernier le 14 octobre 2008 contre la décision d'invalidation de son permis de conduire sont annulées.

Article 3 : Sous réserve que l'intéressé ait obtenu un nouveau permis de conduire et sans préjudice des décisions de retrait de points à raison d'autres infractions commises postérieurement par celui-ci, il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de procéder, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, à la restitution à M. A de son permis de conduire affecté d'un crédit de douze points, rétablis dans le traitement automatisé mentionné à l'article L.223-3 du code de la route.

Article 4 : L'Etat est condamné à verser à M. A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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N° 09MA02660 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA02660
Date de la décision : 15/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Elydia FERNANDEZ
Rapporteur public ?: M. GUIDAL
Avocat(s) : SAINT GEORGES CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-12-15;09ma02660 ?
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