La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/03/2014 | FRANCE | N°12MA03453

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 11 mars 2014, 12MA03453


Vu la requête, enregistrée le 1er août 2012, présentée pour la SA Electricité de France (EDF), dont le siège social est 22-30 avenue de Wagram à Paris (75 008), par la SCP A...Guerot Jolly ;

La SA EDF demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903336, en date du 11 mai 2012, par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé les décisions du 31 mars 2009 et 6 avril 2009 par lesquelles le préfet des Hautes-Alpes a refusé de reconnaître à l'association syndicale autorisée du Canal de Ventavon l'existence d'un droit d'usage des eaux attaché au moul

in de la Saulce ;

2°) de rejeter la demande de l'association syndicale autor...

Vu la requête, enregistrée le 1er août 2012, présentée pour la SA Electricité de France (EDF), dont le siège social est 22-30 avenue de Wagram à Paris (75 008), par la SCP A...Guerot Jolly ;

La SA EDF demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903336, en date du 11 mai 2012, par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé les décisions du 31 mars 2009 et 6 avril 2009 par lesquelles le préfet des Hautes-Alpes a refusé de reconnaître à l'association syndicale autorisée du Canal de Ventavon l'existence d'un droit d'usage des eaux attaché au moulin de la Saulce ;

2°) de rejeter la demande de l'association syndicale autorisée du Canal de Ventavon ;

3°) subsidiairement de poser au tribunal de grande instance de Marseille la question préjudicielle de savoir si le droit d'usage de l'eau peut être cédé indépendamment du droit de propriété auquel il est attaché et dont il constitue l'accessoire ;

4°) de mettre à la charge de l'association syndicale autorisée du Canal de Ventavon la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'énergie ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi du 16 octobre 1919 relative à l'énergie hydroélectrique ;

Vu le décret du 11 octobre 1972 relatif à l'aménagement et l'exploitation de la chute de Sisteron, sur la Durance, dans les départements des Hautes-Alpes et des Alpes-de-Haute-Provence ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 février 2014:

- le rapport de Mme Paix, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

- et les observations de MeA..., pour la SA Electricité de France et de M.B..., représentant l'association syndicale autorisée (ASA) du Canal de Ventavon ;

1. Considérant que, par jugement en date du 11 mai 2012, le tribunal administratif de Marseille a annulé les décisions des 31 mars 2009 et 6 avril 2009 par lesquelles le préfet des Hautes-Alpes a refusé de reconnaître à l'association syndicale autorisée du Canal de Ventavon l'existence d'un droit d'usage des eaux attaché au moulin de la Saulce et a déclaré l'association titulaire d'un droit fondé en titre à l'usage des eaux attaché au canal du moulin de la Saulce d'une consistance équivalent à 1 mètre cube par seconde ; que la SA Electricité de France (EDF) interjette appel de ce jugement ;

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête :

2 .Considérant qu'il appartient au juge de plein contentieux de se prononcer tant sur l'existence du droit d'usage de l'eau fondé en titre attaché au moulin de la Saulce, que sur le maintien de ce droit ;

En ce qui concerne l'existence d'un droit fondé en titre :

3. Considérant qu'il n'est pas contesté que l'existence du canal et du moulin de la Saulce sont attestées depuis 1664, antérieurement au classement de la Durance comme cours d'eau domanial, le 10 juillet 1835 ; que le moulin et le canal de la Saulce ont été vendus en tant que biens nationaux le 25 Thermidor an IV, puis le premier Germinal an V et enfin le 8 Thermidor an V ; que par suite, et ainsi que l'a relevé le tribunal administratif de Marseille, les ouvrages du canal et du moulin de la Saulce doivent être regardés comme fondés en titre ; que l'association syndicale autorisée du Canal de Ventavon ayant acquis par deux actes notariés du 31 août 2005 et du 1er février 2011, d'abord le droit de prise d'eau d'un mètre cube par seconde d'eau à la Durance et les parcelles constituant l'assiette du canal acheminant les eaux vers le moulin de la Saulce, puis, le droit d'usage de la force motrice de l'eau attaché au moulin de la Saulce, l'association doit être regardée comme ayant régulièrement acquis le droit d'usage de l'eau dont elle se prévaut ;

En ce qui concerne l'extinction du droit fondé en titre :

4. Considérant, en premier lieu, que le droit à l'usage de l'eau constitue un droit réel immobilier qui peut être cédé indépendamment de l'immeuble riverain auquel il est attaché ; que, par suite, la circonstance que l'association syndicale autorisée du canal de Ventavon n'est pas propriétaire du moulin de la Saulce est sans incidence sur le droit d'usage dont elle bénéficie ; que dès lors et sans qu'il soit besoin de poser une question préjudicielle au tribunal de grande instance de Marseille, le moyen, tiré par la SA EDF, de ce que le droit d'usage n'aurait pu être cédé seul sans la propriété du moulin doit être rejeté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que la SA EDF soutient que le droit d'usage de l'eau aurait été évincé par l'effet du décret de concession du 11 octobre 1972 dont elle a bénéficié et que l'association syndicale autorisée du Canal de Ventavon ne pourrait se prévaloir que d'une créance indemnitaire ; que, toutefois, ainsi que le reconnaît l'appelante, aucune procédure d'éviction n'a été engagée conformément aux dispositions de l'article 6 de la loi du 16 octobre 1919 alors applicable ; que les propriétaires successifs sont intervenus à plusieurs reprises, comme en attestent notamment le procès-verbal du 3 mars 1973 effectué à titre préventif par le propriétaire du Canal et du moulin de la Saulce et la lettre du 11 juin 1975 au chef d'aménagement EDF de Sisteron, pour conserver le débit auquel ils avaient droit ; que le moyen tiré par la SA EDF de l'éviction dont aurait fait l'objet l'association syndicale autorisée du Canal de Ventavon a donc été à bon droit écarté par le tribunal administratif de Marseille ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'un droit fondé en titre se perd lorsque la force motrice du cours d'eau n'est plus susceptible d'être utilisée par son détenteur, du fait de la ruine ou du changement d'affectation des ouvrages essentiels destinés à utiliser la pente et le volume de ce cours d'eau ; qu'en revanche, ni la circonstance que ces ouvrages n'aient pas été utilisés en tant que tels au cours d'une longue période de temps ni le délabrement du bâtiment auquel le droit d'eau fondé en titre est attaché, ne sont de nature, à eux seuls, à remettre en cause la pérennité de ce droit ;

7. Considérant que l'absence d'utilisation du moulin de la Saulce et son état de délabrement partiel ne suffisent pas à remettre en cause, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que la force motrice du moulin de la Saulce aurait disparu, la pérennité du droit fondé en titre ; que la seule circonstance que l'association syndicale autorisée du Canal de Ventavon envisage d'implanter son projet de micro-centrale en aval n'implique pas, contrairement à ce que soutient la SA EDF, un changement d'affectation et n'est pas de nature à faire disparaître le droit fondé en titre dont elle bénéficie ;

8. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SA EDF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé les décisions des 31 mars 2009 et 6 avril 2009 par lesquelles le préfet des Hautes-Alpes a refusé de reconnaître à l'association syndicale autorisée du Canal de Ventavon l'existence d'un droit d'usage des eaux attaché au moulin de la Saulce et a déclaré l'association titulaire d'un droit fondé en titre à l'usage des eaux attaché au canal du moulin de la Saulce d'une consistance équivalent à 1 mètre cube par seconde ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ; que ces dispositions s'opposent à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par la SA EDF ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SA EDF la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'association syndicale autorisée du Canal de Ventavon et non compris dans les dépens, en application des mêmes dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SA EDF est rejetée.

Article 2 : La SA EDF versera à l'association syndicale autorisée du Canal de Ventavon la somme de 2 000 (deux mille) euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Electricité de France, à l'association syndicale autorisée du Canal de Ventavon et au ministre de l'écologie du développement durable et de l'énergie.

''

''

''

''

N° 12MA034532

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA03453
Date de la décision : 11/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

27-02-01-01 Eaux. Ouvrages. Établissement des ouvrages. Prises d'eau.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP SIMON GUEROT JOLLY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-03-11;12ma03453 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award