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11/03/2014 | FRANCE | N°12MA04968

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 11 mars 2014, 12MA04968


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 26 décembre 2012, sous le n° 12MA04968, présentée pour la SAS Entreprise Trivella dont le siège social est chemin de Severin à Arles (13 200) représentée par Me E...B..., liquidateur judiciaire, par Me D...;

La SAS Entreprise Trivella demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1108083 du 13 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, sur demande de M. F...H...G..., annulé la décision de l'inspecteur du travail de la quinzième section des Bouches du R

hône en date du 28 octobre 2011 ayant autorisé son licenciement pour motif ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 26 décembre 2012, sous le n° 12MA04968, présentée pour la SAS Entreprise Trivella dont le siège social est chemin de Severin à Arles (13 200) représentée par Me E...B..., liquidateur judiciaire, par Me D...;

La SAS Entreprise Trivella demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1108083 du 13 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, sur demande de M. F...H...G..., annulé la décision de l'inspecteur du travail de la quinzième section des Bouches du Rhône en date du 28 octobre 2011 ayant autorisé son licenciement pour motif économique ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. G...devant le tribunal ;

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu que la recherche de reclassement de M. G... avait été insuffisante ; en effet, si la SAS Entreprise Trivella fait partie d'un groupe, les possibilités de reclassement ne doivent être faites que dans le cadre des sociétés ayant la même activité ; à cet égard la SARL Brandizi Gestion Finance et la SARL Brandizi Promotion n'ont pas la même activité que la société Trivella ; les recherches de reclassement n'avaient pas à être effectuées dans ces entreprises ;

- le liquidateur a exploré toutes les tentatives de reclassement au sein du groupe ;

- il a également engagé une recherche externe au groupe et a adressé 65 lettres aux entreprises exerçant dans le même secteur d'activité ; le rapport établi par le cabinet Anthéa établit ces recherches ;

- les dispositions de l'article L. 1233-61 du code du travail n'étaient pas applicables à la société, qui ne comportait pas 50 salariés ; le plan de sauvegarde pour l'emploi établi dans le cadre du redressement judiciaire, distinct de celui de celui présenté le 29 juillet 2011 au comité d'entreprise, a été présenté le 29 septembre 2011 et a recueilli l'avis favorable de l'ensemble des membres du comité d'entreprise ; la clause concernant l'indemnité de licenciement fixée à 1/10ème de salaire par année d'ancienneté n'est pas applicable ;

- contrairement à ce qui est soutenu, le plan de sauvegarde pour l'emploi établi dans le cadre de la liquidation a respecté les exigences de reclassement interne des salariés ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 février 2013, présenté pour M. G...par Me C... ; M. G...demande à la Cour de rejeter la requête, de confirmer le jugement attaqué et de mettre à la charge de Me B...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le mandataire a visé un plan de sauvegarde pour l'emploi dans sa lettre du 23 septembre 2011 qui ne peut être que celui de juillet établi pendant la phase de redressement judiciaire ;

- le plan de sauvegarde pour l'emploi rédigé dans le cadre du redressement judicaire est nul en ce qu'il prévoit des indemnités de licenciement moindres que lés dispositions légales et en ce qu'il ne définit pas suffisamment les offres de reclassement qu'il propose ;

- c'est à tort que le mandataire indique qu'il n'était pas tenu de mettre en place un plan de sauvegarde pour l'emploi lors de la liquidation dès lors, d'une part, qu'il n'établit pas que 19 emplois auraient été supprimés depuis le mois de juillet 2011, où le précédent plan de sauvegarde pour l'emploi mentionnait que l'effectif de l'entreprise était de 60 salariés, et, d'autre part, que dès lors qu'il a choisi d'appliquer cette procédure, il est tenu de s'y soumettre ;

- le liquidateur doit nonobstant le délai bref qui lui est imparti, initier des démarches réelles et sérieuses de reclassement, lesquelles doivent figurer dans la première présentation du plan ;

- l'obligation de reclassement personnalisée n'a pas été respectée ; le mandataire judicaire s'est contenté d'interroger la holding, qui a répondu 2 jours seulement après avoir reçu sa lettre ; le registre des personnels des sociétés du groupe ne lui a pas été transmis ; il ne résulte pas des pièces du dossier que le contrôle de l'inspection du travail ait porté sur la totalité des entreprises du groupe ; aucun salarié n'a reçu de proposition de reclassement ;

- les contours du groupe sont particulièrement imprécis ;

Vu la lettre adressée aux parties le 30 août 2013, sur le fondement de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les informant que l'affaire était susceptible d'être audiencée dans le courant des mois de novembre ou décembre 2013 et invitant les parties à produire avant le 1er octobre 2013 ;

Vu, enregistré le 12 février 2014, le mémoire présenté en qualité d'observateur par le ministre du travail, de l'emploi de la formation professionnelle et du dialogue social ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 février 2014 :

- le rapport de Mme Paix, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

- et les observations de Me A...pour M.G... ;

1. Considérant que la SAS Trivella TP, représentée par MeB..., liquidateur judicaire, interjette régulièrement appel du jugement en date du 13 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a, sur demande de M.G..., annulé la décision de l'inspecteur du travail de la quinzième section des Bouches du Rhône en date du 28 octobre 2011 ayant autorisé le licenciement de l'intéressé pour motif économique ;

2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que le licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte, notamment, de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière y compris lorsque l'entreprise fait l'objet d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ; que, au cas où la cessation totale de l'activité est prononcée à la suite d'une mise en liquidation des biens sans autorisation de poursuite d'activité, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant au ministre, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de vérifier si la possibilité d'assurer le cas échéant le reclassement du salarié dans les sociétés du groupe auquel appartient la société dont la cessation totale d'activité a été prononcée a été examinée ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. / Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. / Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises. " ; que, pour apprécier les possibilités de reclassement offertes au salarié, l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique par une société appartenant à un groupe, est tenue de faire porter son examen sur les entreprises du groupe dont les activités ou l'organisation offrent à l'intéressé la possibilité d'exercer des fonctions comparables ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le liquidateur a par lettre du 23 septembre 2011, jour de la liquidation judiciaire prononcée par le tribunal de commerce de Tarascon, saisi la SARL Brandizi Gestion Finance, en sa qualité de holding du groupe auquel appartenait la SAS Entreprise Trivella, pour l'informer de la liquidation judiciaire prononcée, lui demander s'il existait des possibilités de reclassement à l'intérieur du groupe, et lui a transmis la liste des emplois concernés ; que, par lettre du 29 septembre suivant, la SARL Brandizi Gestion Finance a répondu avoir relancé les recherches déjà entreprises lors de la mise en place du plan de sauvegarde, en les élargissant, mais qu'aucune possibilité ne pouvait être envisagée au sein des sociétés Brandizi Gestion Finance, Terraco, Betag et Brandizi Promotion ; qu'à supposer même que les sociétés Brandizi Gestion Finance et Brandizi Promotion, qui n'appartiennent pas au même secteur d'activité que la SAS Entreprise Trivella, n'aient pu être sollicitées, il ne résulte pas des pièces du dossier qu'un examen réel des possibilités de reclassement sur des fonctions comparables ait été effectué auprès des sociétés Terraco et Betag dont il n'est pas contesté qu'elles comptaient respectivement 124 salariés et 45 salariés ; que, par suite, en l'absence de toute relance effectuée par Me B...notamment auprès des directions des sociétés Terraco et Betag qui n'ont pas été sollicitées directement, il ne saurait être considéré, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Marseille, qu'un examen individualisé des possibilités de reclassement de M. G..., qui possédait une qualification de chef d'équipe, a été effectué ; que, si la procédure doit nécessairement être conduite assez rapidement, le délai de quinze jours suivant le jugement de liquidation, prévu par l'article L. 3253-8 du code du travail pour l'assurance des créances résultant de la rupture des contrats de travail, ne fait pas obstacle au respect intégral de l'obligation de reclassement d'un salarié protégé dès lors qu'il résulte des termes mêmes des dispositions de l'article L. 3253-9 du même code que seule l'intention de licencier un tel salarié doit être manifestée dans les quinze jours et non pas que l'ensemble de la procédure doit être menée à son terme dans ce délai ; que, dans ces conditions, Me B...ne peut être regardé comme ayant procédé à une recherche suffisante en vue du reclassement de M. G...et, par suite, comme ayant exécuté son obligation en la matière ; qu'il en résulte que, sans qu'il soit besoin de s'interroger sur la validité du plan de sauvegarde pour l'emploi dont il n'appartenait pas au juge administratif d'apprécier le caractère suffisant, Me B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 28 octobre 2011 par laquelle l'inspectrice du travail de la 15ème section des Bouches du Rhône a autorisé le licenciement de M.G... ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de MeB..., liquidateur judiciaire, la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M.G... et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS Entreprise Trivella est rejetée.

Article 2 : La SAS Entreprise Trivella versera à M. G...la somme de 1 000 (mille) euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 3 : La présente décision sera notifiée à MeB..., liquidateur judicaire de la SAS Entreprise Trivella, à M. F...G...et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Délibéré après l'audience du 18 février 2014, où siégeaient :

- M. Bédier président de chambre,

- Mme Paix, président-assesseur,

- M. Chanon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 mars 2014.

Le rapporteur,

E. PAIXLe président,

J.L BEDIER

Le greffier,

V. DUPOUY

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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N° 12MA049686

FSL


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA04968
Date de la décision : 11/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique. Obligation de reclassement.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : MARTINE NIQUET ET VERONIQUE TOURNAIRE-CHAILAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-03-11;12ma04968 ?
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