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19/02/2015 | FRANCE | N°14MA00513

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 19 février 2015, 14MA00513


Vu, enregistrée le 28 janvier 2014, la requête présentée pour M. A...B..., demeurant ...par Me Akdag, avocat ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1304810 du 10 décembre 2013 par laquelle le président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 mai 2013 par laquelle le préfet des Pyrénées-Orientales a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux née le 24 août 2013 du silence gard

é pendant deux mois par le préfet sur ce recours ;

2°) d'annuler, pour excès d...

Vu, enregistrée le 28 janvier 2014, la requête présentée pour M. A...B..., demeurant ...par Me Akdag, avocat ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1304810 du 10 décembre 2013 par laquelle le président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 mai 2013 par laquelle le préfet des Pyrénées-Orientales a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux née le 24 août 2013 du silence gardé pendant deux mois par le préfet sur ce recours ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 15 mai 2013 susmentionnée, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au préfet à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour "vie privée et familiale" dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui sera versée à Me Akdag en cas d'obtention de l'aide juridictionnelle en contrepartie de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle ;

Il soutient que :

- de nationalité marocaine, il est entré en France en octobre 2003, à l'âge de 15 ans, sous couvert du passeport de son père ;

- depuis cette date, il réside en France avec son père, retraité, qui vit en France depuis 1970, sous couvert d'une carte de résident de 10 ans ;

- il a été scolarisé en France de 2003 à 2007 ;

- il a demandé sur le fondement de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur son admission exceptionnelle au séjour au titre de sa situation familiale, qui a été rejetée par la décision litigieuse ;

- les demandes en septembre 2004 et en juin 2005 de regroupement familial de son père à son bénéfice ont été rejetées eu égard à la non-conformité de son logement et de l'insuffisance de ses ressources ;

- sa mère et son frère étant décédés, il n'a plus d'attaches au Maroc ;

- la décision litigieuse est insuffisamment motivée en fait ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa demande ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

- il remplit les conditions des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour se voir attribuer un titre de séjour "vie privée et familiale" ;

- il remplit aussi les critères de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur;

- arrivé en France à l'âge de 15 ans, il établit résider en France depuis 2003, soit depuis plus de 10 ans ;

- il parle bien le français ;

- il bénéficie d'une promesse d'embauche en qualité d'agent de service à partir de juillet 2013 en contrat à durée indéterminée ;

- il ne constitue pas un risque pour l'ordre public ;

- le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour avant de prendre le refus de titre de séjour litigieux ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu, enregistré le 28 mai 2014 le mémoire présenté par le préfet des Pyrénées-Orientales, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation du requérant à lui verser la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le préfet fait valoir que :

- la première demande du requérant de titre de séjour du 16 septembre 2010 a fait l'objet le 7 février 2011 d'un refus assorti d'une obligation de quitter le territoire français, dont la légalité a été confirmée par le jugement du 26 mai 2011 du tribunal administratif de Montpellier, confirmé par arrêt du 4 février 2013 de la Cour ;

- la demande de première instance du requérant était irrecevable pour tardiveté ;

- son refus n'avait pas à être précédé de la saisine de la commission du titre de séjour ;

- la décision litigieuse est suffisamment motivée ;

- sa demande a fait l'objet d'un examen circonstancié ;

- le refus de titre de séjour litigieux n'est pas entaché d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

- le requérant est célibataire sans enfant ;

- sa mère et l'ensemble de sa fratrie vivent au Maroc ;

- le père du requérant, qui séjourne en France depuis 1970, n'est pas retourné au Maroc à la naissance de son fils en 1987 pour l'élever ;

- leurs liens familiaux ne peuvent ainsi être qualifiés de stables et anciens au sens de l'article L. 313-11 7° du code ;

- il ne justifie pas d'une intégration par le travail ;

- il ne justifie d'aucun revenu et ne peut être pris en charge financièrement par son père, qui perçoit une retraite de 677,12 euros par mois ;

- le refus de titre de séjour litigieux ne méconnaît pas non plus l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il lui appartient de retourner au Maroc pour demander le visa exigible ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Marseille, en date du 21 février 2014 accordant à M. B...l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la lettre en date du 16 décembre 2014 par laquelle le président de la formation de jugement informe les parties de ce que la cour est susceptible de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de l'irrégularité de la formation de jugement ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la circulaire NOR INTK1229185C du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 sur les conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la 2ème chambre de la cour dispensant la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 janvier 2015 le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;

1. Considérant que M.B..., de nationalité marocaine, interjette appel de l'ordonnance du 10 décembre 2013 par laquelle le président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 mai 2013 par laquelle le préfet des Pyrénées-Orientales a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux née le 24 août 2013 du silence gardé pendant deux mois par le préfet sur ce recours ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...) et les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. " ;

3. Considérant qu'à l'appui de sa demande présentée devant le tribunal administratif de Montpellier, M. B...a notamment invoqué les moyens tirés de la méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 313-11 7 ° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de ce que l'appréciation portée sur sa situation personnelle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que ces moyens, qui étaient assortis de faits susceptibles de venir à leur soutien et n'étaient pas dépourvus des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé, n'étaient ni inopérants ni irrecevables ; que les termes dans lesquels ils étaient exprimés, qui permettaient d'en saisir le sens et la portée, les rendaient suffisamment intelligibles pour que le juge exerçât son office en en appréciant le bien-fondé au regard des pièces produites ; que, dès lors, il n'appartenait qu'au tribunal administratif statuant en formation collégiale de statuer sur la demande de M. B...; que le président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Montpellier ne pouvait, comme il l'a fait par l'ordonnance attaquée, rejeter la demande de M. B...sur le fondement des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, ainsi que les parties en ont été informées par une lettre de la Cour du 16 décembre 2014 ; que, par suite, l'ordonnance du président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Montpellier du 10 décembre 2013 est entachée d'irrégularité et doit être annulée ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance de M.B... :

4. Considérant que le préfet fait valoir que la demande du requérant était tardive au motif qu'elle tendait à l'annulation de sa décision du 15 mai 2013 rejetant sa demande d'admission exceptionnelle au séjour et qu'elle n'a été enregistrée que le 8 octobre 2013 au greffe du tribunal administratif de Montpellier ; que, toutefois, le préfet ne produit pas l'accusé de la réception de cette décision par le requérant ; qu'à défaut, les délais de recours contentieux n'ont pas commencé à courir ; que, dès lors, la fin de non recevoir du préfet doit être rejetée ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

5. Considérant que le requérant a demandé son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 en faisant valoir sa vie privée et familiale en France en sa qualité de jeune majeur, en mentionnant notamment son entrée en France à l'âge de 15 ans sous couvert du passeport de son père, sa scolarité en France de 2003 à 2007 et sa résidence habituelle auprès de son père, en situation régulière, depuis 2003 ; que le préfet a, dans sa décision attaquée, mentionné que le requérant n'établissait pas sa résidence habituelle en France depuis 5 ans au sens de cette circulaire et qu'il n'a fourni aucune information sur ses activités professionnelles passées, actuelles ou futures de nature à ouvrir droit à une régularisation exceptionnelle au titre du travail et des possibilités d'insertion professionnelle sur le fondement de cette circulaire ; qu'en se bornant à relever que M. B...ne remplissait pas les conditions prévues par la circulaire du 28 novembre 2012, sans examiner sur ce point la situation de l'intéressé au regard des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont le requérant se prévalait, ni envisager de faire droit à la demande de l'intéressé alors même qu'il ne remplissait pas les critères de la circulaire susvisée, le préfet ne peut être regardé, ainsi que le soutient le requérant, comme ayant examiné sa situation particulière;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que la décision du 15 mai 2013 du préfet des Pyrénées-Orientales, ensemble sa décision implicite de rejet du recours gracieux de M. B... doivent être annulées ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. Considérant que, compte tenu du motif retenu par le présent arrêt, l'annulation de l'arrêté en litige n'implique pas nécessairement que le préfet des Pyrénées-Orientales délivre à l'intéressé le titre de séjour " vie privée et familiale " sollicité, mais implique seulement qu'il réexamine, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et en tenant compte des éléments de fait existant à la date à laquelle il statuera, la demande d'admission au séjour présentée par M. B...et qu'il lui délivre dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

8. Considérant que M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Akdag, avocat de M.B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Akdag de la somme de 1 500 euros qu'il demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M.B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à l'Etat de quelque somme que ce soit au titre des frais d'instance ;

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance du 10 décembre 2013 du président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Montpellier est annulée.

Article 2 : La décision du 15 mai 2013 du préfet des Pyrénées-Orientales est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des Pyrénées-Orientales de procéder à un nouvel examen de la demande d'admission au séjour au titre de la vie privée et familiale de M.B..., dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Akdag la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Akdag renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Les conclusions présentées par le préfet des Pyrénées-Orientales au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le surplus de la demande de M. B...est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., à Me Akdag et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Perpignan.

Délibéré après l'audience du 15 janvier 2015, où siégeaient :

- M. Firmin, président-assesseur, présidant la formation du jugement en application de l'article R. 222.26 du code de justice administrative,

- MmeC..., première conseillère,

- Mme Carassic, première conseillère,

Lu en audience publique, le 19 février 2015.

N° 14MA005132

RP-AG


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA00513
Date de la décision : 19/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. FIRMIN
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : AKDAG

Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-02-19;14ma00513 ?
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