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18/06/2015 | FRANCE | N°14MA02204

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 18 juin 2015, 14MA02204


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 2 octobre 2013 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1306066 du 4 mars 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregi

strés les 16 mai 2014 et 10 février 2015, M.B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 2 octobre 2013 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1306066 du 4 mars 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 mai 2014 et 10 février 2015, M.B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306066 du 4 mars 2014 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 octobre 2013 et la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à Me A...en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, son versement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- que le préfet n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa demande de titre et a insuffisamment motivé sa décision ;

- que la décision attaquée est entachée d'erreur de fait dès lors qu'il est père de trois enfants, et non de deux, comme le mentionne la décision attaquée ;

- qu'elle est entachée d'une appréciation manifestement erronée de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- qu'elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- que son épouse, ne disposant pas de ressources suffisantes, ne peut le faire bénéficier de la procédure de regroupement familial ;

- que son épouse et lui sont mariés depuis quatorze ans et sont parents de trois enfants âgés respectivement de 12 ans, 3 ans et de 2 mois dont l'aînée est scolarisée en France depuis 2005, soit depuis huit ans à la date de la décision attaquée ;

- que le refus de titre de séjour qui lui a été opposé méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision l'obligeant à quitter le territoire français :

- qu'elle est entachée d'un défaut d'examen réel et complet de sa situation et d'une insuffisance de motivation ;

- qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant dès lors que s'il devait retourner au Maroc ses enfants seraient inévitablement privés de l'un de leurs parents ;

En ce qui concerne la décision implicite de rejet de son recours gracieux :

- qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article 3 de l'accord franco marocain du 9 octobre 1987.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2015, le préfet de l'Hérault a conclu au rejet de la requête.

Il soutient :

- qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 avril 2014.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 modifié ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Firmin, rapporteur.

1. Considérant que M.B..., de nationalité marocaine, interjette appel du jugement n° 1306066 du 4 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 octobre 2013 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et des libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...s'est marié, le 14 août 1999 à Tinghir au Maroc, avec une compatriote ressortissante marocaine, laquelle était entrée en France en 1996, à la faveur d'une procédure de regroupement familial ; que de cette union sont nés trois enfants, respectivement le 12 avril 2001 à Tinghir au Maroc, et les 10 août 2010 et 25 septembre 2013 à Montpellier, soit antérieurement à la décision attaquée du 2 octobre 2013 ; que, dès le 22 janvier 2001, M. B...a déposé une demande de titre de séjour pour rejoindre son épouse en France, reçue le 2 février 2001 en préfecture de l'Hérault à laquelle il ne fut pas fait droit ; que, le 14 mai 2010 M.B..., qui est entré en France le 8 novembre 2009 sous couvert d'un visa Schengen délivré par les autorités italiennes, a présenté une nouvelle demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'après annulation de la décision implicite de rejet qui a été opposée par le préfet de l'Hérault à cette demande, M. B...a présenté une nouvelle demande de titre de séjour le 8 avril 2013 laquelle a été rejetée par l'arrêté attaqué du 2 octobre 2013 ; qu'il est constant que l'épouse de M. B...vit en France au bénéfice d'une carte de résident valable du 24 mai 2005 au 23 mai 2016 et que sa fille aînée est scolarisée en France depuis l'année scolaire 2005 - 2006 ; que, par ailleurs, le père et la mère du requérant résident également en France sous couvert de cartes de résident de 10 ans ; que, dans ces circonstances, M. B...est fondé à soutenir que l'arrêté du préfet de l'Hérault du 2 octobre 2013 lui refusant un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris et méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; que le présent arrêt annulant ladite décision il y a lieu d'annuler également, par voie de conséquence, les décisions de même date lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 2 décembre 2013 ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

6. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la situation de M. B...depuis l'intervention de l'arrêté du 2 octobre 2013 ait évolué dans des conditions telles que sa demande de titre de séjour serait devenue sans objet ou que des circonstances postérieures à la date de cet arrêté permettraient désormais de fonder légalement une nouvelle décision de rejet ; que l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que le préfet de l'Hérault délivre à l'intéressé une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; que, dès lors, il y a lieu pour la Cour de prescrire au préfet de délivrer à M.B..., dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, un tel titre de séjour ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " (...) Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, partielle ou totale, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. Si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat (...). " ; que, par application de ces dispositions, il y a lieu de condamner l'Etat, qui est la partie perdante dans la présente instance, à verser à Me A... une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés qu'il aurait réclamée au requérant si celui-ci n'avait pas bénéficié d'une aide juridictionnelle totale, ce versement emportant renonciation de la part de ce dernier à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1306066 du 4 mars 2014 du tribunal administratif de Montpellier et l'arrêté du 2 octobre 2013 du préfet de l'Hérault, ensemble sa décision implicite de rejet du recours gracieux formé le 2 décembre 2013 par M. B...sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer à M. B...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 à Me A...qui, si il recouvre cette somme, renoncera à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B..., à Me A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2015, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- M. Firmin, président assesseur,

- MmeC..., première conseillère,

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N° 14MA02204 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02204
Date de la décision : 18/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre FIRMIN
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-06-18;14ma02204 ?
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