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13/10/2015 | FRANCE | N°14MA00636

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 13 octobre 2015, 14MA00636


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté préfectoral du 25 juin 2012 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales lui a refusé la délivrance d'un premier certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale ".

Par un jugement n° 1203267, du 10 décembre 2013, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 février 2014, M.C..., représen

té par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpell...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté préfectoral du 25 juin 2012 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales lui a refusé la délivrance d'un premier certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale ".

Par un jugement n° 1203267, du 10 décembre 2013, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 février 2014, M.C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 10 décembre 2013 ;

2°) d'annuler la décision de refus de séjour du 25 juin 2012 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Orientales de lui délivrer " une carte de séjour temporaire " portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre la somme de 2 000 euros à la charge de l'État " avec distraction au profit de MeA... ".

Il soutient que :

- la décision du 15 juin 2012, qui ne contient pas tous les éléments de faits et de droit, ne peut être regardée comme répondant à la motivation exigée par la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- l'autorité préfectorale n'a manifestement pas pris la peine d'étudier le dossier ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne tenant pas compte des éléments susceptibles de permettre l'attribution d'une carte de séjour temporaire ;

- le refus de titre méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les stipulations des articles 3-1 et 9-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ont également été méconnues.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juin 2015, le préfet des Pyrénées-Orientales a conclu au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de l'appelant ne sont pas fondés.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 19 mars 2014.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de MmeE..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. C..., de nationalité algérienne a sollicité, par courrier du 12 juin 2012, la délivrance d'un titre de séjour en faisant valoir sa situation familiale d'époux d'une ressortissante algérienne titulaire d'un certificat de résidence de dix ans et la présence de six enfants à charge ; que, le 25 juin 2012, le préfet des Pyrénées-Orientales a refusé d'accéder à sa demande, en lui précisant qu'il appartenait à son épouse d'effectuer une demande de regroupement familial en sa faveur ; que M. C...relève appel du jugement du 10 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre ce refus ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de la lecture du refus contesté que le préfet des Pyrénées-Orientales, après avoir relevé que l'appelant avait épousé Madame B...C..., ressortissante algérienne titulaire d'un certificat de résidence algérien valable du 17 avril 2003 au 16 avril 2013, et que le couple avait six enfants à charge, y a indiqué n'être pas en mesure de donner une suite favorable à la demande dont il était saisi au motif qu'il appartenait à l'épouse de M. C...d'effectuer au préalable une demande de regroupement familial en sa faveur, en application des articles 4 et 6 alinéa 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; qu'il a ce faisant suffisant motivé, tant en fait qu'en droit, les raisons de son refus et mis M. C... à même de les critiquer ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort de la lecture du courrier adressé par M. C... au préfet des Pyrénées-Orientales qu'il s'est borné à y indiquer que son épouse était en situation régulière, qu'avec la naissance de jumeaux, elle se trouvait dans l'incapacité de s'occuper seule de tous les enfants et que son expérience professionnelle devait lui permettre de trouver un travail pour subvenir aux besoins de sa famille s'il était muni d'un titre de séjour ; qu'au vu de ces éléments, l'absence dans le refus contesté de mention relative à la situation du jeuneF..., lourdement handicapé, à la maîtrise de la langue française par l'appelant et à la situation professionnelle de chacun des membres du couple ne saurait être regardée comme révélant, de la part de l'autorité préfectorale, un défaut d'examen de la situation particulière de l'intéressé ou un manque de sérieux dans l'examen de sa demande ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

5. Considérant qu'en application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative saisie d'une demande de titre de séjour par un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; que cette dernière peut en revanche tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par la mesure statuant sur le droit au séjour, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...a épousé sa femme le 11 décembre 2011, à l'âge de quarante et un ans, à Oran, alors que cette dernière vivait en France depuis dix ans et qu'elle avait divorcé six mois auparavant du père de ses quatre premiers enfants ; qu'il indique être entré en France sous couvert d'un visa valable du 23 mai 2012 au 22 juin 2012, de sorte qu'à la date de la décision attaquée, les époux vivaient ensemble depuis moins d'un mois, et qu'il n'est arrivé en France que trois mois après la naissance des jumeaux issus de ce mariage ; qu'il est constant que la procédure de regroupement familial n'a pas été respectée alors que M. C... ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial ; qu'au vu de ces éléments, et bien que le couple ait désormais six enfants à charge, le refus de régulariser la situation de M. C...ne peut être regardé, compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France, comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive au regard des objectifs poursuivis par ce refus, à savoir assurer le respect des dispositions relatives à l'entrée et au séjour des étrangers, et une certaine effectivité à la procédure de regroupement familial, tout particulièrement dans le cas des familles qui ont sciemment contourné la procédure de regroupement familial à travers le maintien irrégulier sur le territoire après entrée sous couvert d'un visa de tourisme ; que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont, ainsi, pas été méconnues au cas d'espèce ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C...est la mère de quatre enfants issus d'un premier lit respectivement âgés de 11 ans, 10 ans, 8 ans et 7 ans ; que l'enfant âgé de 8 ans présente un syndrome polymalformatif s'intégrant dans le cadre d'une anomalie chromosomique et présente un retard de développement psychomoteur nécessitant un suivi médical ; qu'un taux d'incapacité supérieur ou égal à 80 % lui a été reconnu ; que si M. C...fait valoir qu'il pourrait contribuer financièrement aux besoins de la famille en travaillant, les promesses d'embauche qu'il produit sont postérieures au refus contesté ; que ses affirmations doivent au demeurant, à tout le moins, être mises en perspective avec les pièces produites en défense par le préfet qui font apparaître qu'en mars 2014, Mme C...a déposé plainte contre son époux pour des faits de violence et a indiqué dans une main courante déposée le 17 mars 2014 qu'il lui empruntait régulièrement de l'argent ; que dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu de la faible durée du séjour de M. C...sur le sol français et de l'absence d'insertion professionnelle, les éléments qu'il fait valoir ne permettent pas de considérer que le refus préfectoral serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ce refus sur la situation familiale ;

8. Considérant, en cinquième et dernier lieu, qu'il convient d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 3-1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, repris à l'identique en appel par M.C..., par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées par voie de conséquence tant ses conclusions à fin d'injonction que celles présentées au titre des frais irrépétibles ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., au ministre de l'intérieur et à Me A....

Copie en sera adressée au projet des Pyrénées-Orientales.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2015, où siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- MmeE..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2015.

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N° 14MA00636 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA00636
Date de la décision : 13/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Droits civils et individuels - Convention européenne des droits de l'homme - Droits garantis par la convention - Droit au respect de la vie privée et familiale (art - 8).

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité interne - Droit au respect de la vie privée et familiale.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : AKDAG

Origine de la décision
Date de l'import : 23/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-10-13;14ma00636 ?
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