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10/05/2017 | FRANCE | N°16MA01936

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Chambres réunies, 10 mai 2017, 16MA01936


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'acte du 10 mars 2014 par lequel le ministre de l'éducation nationale aurait refusé de faire droit à sa demande tendant à l'annulation de la candidature d'une équipe d'enseignants du lycée Philibert Delorme de L'Isle-d'Abeau au concours de " La Journée nationale de l'innovation ".

Par un jugement n° 1401270 du 15 mars 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. B....

M. B... a demandé au m

ême tribunal de condamner l'Etat à lui payer une somme de 50 000 euros en réparation ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'acte du 10 mars 2014 par lequel le ministre de l'éducation nationale aurait refusé de faire droit à sa demande tendant à l'annulation de la candidature d'une équipe d'enseignants du lycée Philibert Delorme de L'Isle-d'Abeau au concours de " La Journée nationale de l'innovation ".

Par un jugement n° 1401270 du 15 mars 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. B....

M. B... a demandé au même tribunal de condamner l'Etat à lui payer une somme de 50 000 euros en réparation de ses préjudices consécutifs à l'illégalité entachant l'acte du 10 mars 2014.

Par un jugement n° 1403818 du 3 mai 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. B... comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Procédure devant la Cour :

I. - Par une requête, enregistrée le 17 mai 2016 sous le n° 16MA01936, M. B..., représenté par la société civile professionnelle d'avocats Moulins et associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier n° 1401270 du 15 mars 2016 ;

2°) d'annuler l'acte du 10 mars 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges ont incorrectement qualifié sa demande ;

- l'acte du 10 mars 2014 présente un caractère décisoire ;

- il est entaché d'incompétence ;

- il ne se réfère à aucun fondement légal ;

- il repose sur une analyse erronée de l'atteinte portée à ses droits de propriété intellectuelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2016, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- la demande est irrecevable ;

- elle est nouvelle en appel ;

- il s'agit d'une injonction présentée à titre principal ;

- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par courrier du 25 janvier 2017, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de fonder sa décision sur un moyen d'ordre public relevé d'office, tiré de l'incompétence de la juridiction administrative pour connaître du présent litige.

Des observations en réponse au moyen d'ordre public ont été enregistrées pour la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, le 7 février 2017.

II. - Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2016 sous le n° 16MA02750, M. B..., représenté par la société civile professionnelle d'avocats Moulin et associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier n° 1403818 du 3 mai 2016 ;

2°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 50 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la juridiction administrative est compétente pour connaître du litige ;

- celui-ci ne porte pas sur une action en contrefaçon ;

- il intéresse le seul refus de son autorité hiérarchique d'assurer la sauvegarde de ses droits de propriété intellectuelle méconnus par un établissement public de l'Etat relevant de son domaine de compétence ;

- les premiers juges ont incorrectement qualifié sa demande dirigée contre l'acte du 10 mars 2014 ;

- cet acte présente un caractère décisoire ;

- il est entaché d'incompétence ;

- il ne se réfère à aucun fondement légal ;

- il repose sur une analyse erronée de l'atteinte portée à ses droits de propriété intellectuelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2016, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement et de la recherche conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 15 décembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 10 janvier 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la propriété intellectuelle ;

- la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gautron,

- et les conclusions de M. Thiele, rapporteur public,

1. Considérant que les requêtes n° 16MA01936 et n° 16MA02750 sont présentées par le même auteur, présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que M. B..., enseignant du second degré, a saisi, le 20 février 2014, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche d'un recours tendant notamment à l'annulation de la candidature d'une équipe d'enseignants du lycée Philibert Delorme de L'Isle-d'Abeau au concours " La journée nationale de l'innovation 2014 ", en raison de l'atteinte prétendument portée par le projet présenté par cet établissement public d'enseignement à ses droits de propriété intellectuelle sur une méthode d'enseignement qu'il a créée, dénommée " Neurosup " ; que le 25 mars suivant, il a sollicité l'allocation d'une indemnité de 50 000 euros en réparation des préjudices consécutifs au refus opposé à sa demande ; que M. B... relève appel, d'une part, dans la requête n° 16MA01936, du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 15 mars 2016 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 mars 2014 par laquelle a été rejetée sa demande du 20 février 2014 ; qu'il relève appel, d'autre part, dans la requête n° 16MA02750, du jugement du 3 mai 2016, qui a également rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser de ses préjudices ;

Sur les conclusions indemnitaires :

3. Considérant que si la responsabilité, qui peut incomber à l'Etat ou aux autres personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs, est soumise à un régime de droit public et relève en conséquence de la juridiction administrative, il en va autrement si la loi, par une disposition expresse, a dérogé à ces principes ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-1 du code de la propriété intellectuelle : " Les actions civiles et les demandes relatives à la propriété littéraire et artistique (...) sont exclusivement portées devant des tribunaux de grande instance, déterminés par voie réglementaire (...) " ; que, par dérogation aux principes gouvernant la responsabilité des personnes publiques, la recherche d'une responsabilité des personnes publiques fondée sur la méconnaissance par ces dernières de droits en matière de propriété littéraire et artistique relève, compte tenu des dispositions de l'article L. 331-1 du code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de l'article 196 de la loi susvisée du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;

5. Considérant que le litige indemnitaire, alors même qu'il ne porte pas sur une action en contrefaçon dirigée par M. B... contre les responsables d'une atteinte à ses droits de propriété intellectuelle, tend à mettre en oeuvre la responsabilité de l'Etat à raison du seul refus de faire cesser cette atteinte ; que ce litige concerne, ainsi, une demande relative à la propriété littéraire et artistique, au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 331-1 du code de la propriété intellectuelle ; que par suite, il relève de la compétence exclusive des juridictions de l'ordre judiciaire ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par leur jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande à fin d'indemnité comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la requête ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que tant le recours adressé à la ministre de l'éducation nationale, le 20 février 2014, que la demande devant le tribunal administratif, tendaient uniquement à ce que cette dernière mît fin à une atteinte prétendument portée à ses droits de propriété intellectuelle ; que cette demande doit ainsi être regardée comme relative à la propriété littéraire et artistique, au sens des dispositions précitées de l'article L. 331-1 du code de la propriété intellectuelle ; qu'en outre, elle n'implique ni que soit portée sur les intérêts en présence, notamment l'intérêt général, une appréciation, autre que relative à la propriété intellectuelle, relevant de la seule compétence du juge administratif, ni que soit ordonnée, le cas échéant, une mesure que seul celui-ci peut prononcer à l'égard de l'administration ; qu'en application des mêmes dispositions, il n'appartient, dans ces conditions, qu'aux juridictions judiciaires de connaître du litige ainsi soulevé ; que, par suite, il y a lieu, d'annuler le jugement par lequel le tribunal administratif de Montpellier s'est reconnu compétent pour connaître de la demande du requérant et, statuant par voie d'évocation, de rejeter cette demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Montpellier n° 1401270 du 15 mars 2016 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que ces dispositions s'opposent à ce que la somme réclamée par M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1401270 du tribunal administratif de Montpellier du 15 mars 2016 est annulé.

Article 2 : La demande de M. B... devant le tribunal administratif de Montpellier, dans l'affaire n° 16MA01936, est rejetée comme portée devant une juridiction incompétence pour en connaître.

Article 3 : Le surplus des requêtes de M. B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Délibéré après l'audience du 22 mars 2017 où siégeaient :

- Mme Erstein, président de la Cour,

- M. Moussaron, président de chambre,

- M. Bocquet, président de chambre,

- M. Marcovici, président assesseur,

- Mme Steinmetz-Schies, président assesseur,

- Mme Hameline, premier conseiller,

- M. Gautron, conseiller,

Lu en audience publique, le 10 mai 2017.

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Nos 16MA01936-16MA02750


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Chambres réunies
Numéro d'arrêt : 16MA01936
Date de la décision : 10/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

30-03 Enseignement et recherche. Recherche.


Composition du Tribunal
Président : Mme ERSTEIN
Rapporteur ?: M. Allan GAUTRON
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : SCP MOULIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-05-10;16ma01936 ?
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