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18/05/2017 | FRANCE | N°16MA01161

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 18 mai 2017, 16MA01161


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 27 octobre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1509574 du 22 février 2016 le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 mars 2016, M. B...,

représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 27 octobre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1509574 du 22 février 2016 le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 mars 2016, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 22 février 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 27 octobre 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour provisoire à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- son état de santé nécessite un traitement adapté, indisponible dans son pays d'origine ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lafay,

- et les observations de Me A..., représentant M. B....

1. Considérant que M. B..., de nationalité arménienne, relève appel du jugement du 22 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté 27 octobre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...)" ; que l'arrêté du 9 novembre 2011 pris pour l'application de ces dernières dispositions prévoit que le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, s'il existe dans le pays dont l'étranger est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale, quelle est la durée prévisible du traitement, et pouvant indiquer, le cas échéant, si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers le pays de renvoi ;

3. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;

4. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

5. Considérant que M. B... est atteint de la maladie de Basedow, d'un diabète de type 1 lié à cette maladie, d'une thyroïdie de Hashimoto, ainsi que de troubles maniaco-dépressifs ; que dans son avis du 27 mai 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a indiqué que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale, dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il existait un traitement approprié dans son pays d'origine et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers ce pays ; qu'il ressort toutefois du rapport du Docteur Brongniart, psychiatre, médecin agréé, du 4 février 2016 et du certificat médical du docteur Delanian, médecin traitant du requérant, du 10 février 2016, produits en appel, que les pathologies dont souffre M. B... nécessitent une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé par atteinte majeure et invalidante de plusieurs organes ; que le certificat médical du docteur Delanian précise que l'intéressé ne peut bénéficier dans son pays d'origine d'une prise en charge nécessaire à son traitement, le médicament " propylex " n'étant pas disponible en Arménie ; que le préfet qui n'a pas défendu en appel n'établit pas la disponibilité de ce médicament dans le pays d'origine de M. B... ni, par suite, que ce dernier pourrait bénéficier d'une prise en charge adaptée en Arménie ; que M. B... est donc fondé à soutenir que l'arrêté du 27 octobre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'admission au séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que cette décision doit être annulée ainsi que, par voie de conséquence, la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français et celle fixant le pays de destination ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution. " ;

8. Considérant que, eu égard au motif d'annulation retenu au point 5 et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation de M. B... se serait modifiée, en droit ou en fait, depuis l'intervention de la décision contestée, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement la délivrance d'un titre de séjour à l'intéressé ; que, dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à M. B..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, le titre de séjour prévu par l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er: Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 22 février 2016 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 27 octobre 2015 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à M. B... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 200 euros à M. B... en application des dispositions l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2017 où siégeaient :

- M. Laso, président-assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222.26 du code de justice administrative,

- M. Lafay, premier conseiller,

- Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 18 mai 2017.

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N° 16MA01161


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA01161
Date de la décision : 18/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. LASO
Rapporteur ?: M. Louis-Noël LAFAY
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : MERDJIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-05-18;16ma01161 ?
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