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22/06/2006 | FRANCE | N°01NC01111

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ere chambre - formation a 3, 22 juin 2006, 01NC01111


Vu la requête, enregistrée le 19 octobre 2001, complétée par mémoire enregistré le 11 octobre 2002, présentée pour la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE (CNR), ayant son siège ... (69316), par Me Y..., avocat au barreau de Lyon ; la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 004282 en date du 8 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé, à la demande de la commune de Brunstatt, l'arrêté en date du 29 août 2000 par lequel le préfet du Haut-Rhin a mandaté d'office au budget de ladite commune une dépense de 147 556

,50 F, à verser à la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE ;

2°) de rejeter la de...

Vu la requête, enregistrée le 19 octobre 2001, complétée par mémoire enregistré le 11 octobre 2002, présentée pour la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE (CNR), ayant son siège ... (69316), par Me Y..., avocat au barreau de Lyon ; la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 004282 en date du 8 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé, à la demande de la commune de Brunstatt, l'arrêté en date du 29 août 2000 par lequel le préfet du Haut-Rhin a mandaté d'office au budget de ladite commune une dépense de 147 556,50 F, à verser à la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE ;

2°) de rejeter la demande de la commune de Brunstatt devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) de condamner la commune de Brunstatt à payer la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que la créance qu'elle détient sur la commune de Brunstatt était sérieusement contestée ;

- la convention conclue entre la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE et la commune n'est pas une offre de concours, mais une convention de financement ;

- ladite convention n'est pas atteinte de caducité ;

- l'existence d'une demande en justice dirigée contre l'Etat à l'effet d'être indemnisée du préjudice subi du fait de l'abandon de la liaison Rhin-Rhône est sans lien avec l'obligation de versement des sommes réclamées par la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE ;

- la participation financière de la commune à la réalisation du bief de Niffer n'était pas subordonnée à l'aménagement complet du canal Rhin-Rhône :

- l'interruption des versements à la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE est bien antérieure à l'abandon du projet global ;

- la créance qu'elle détient sur la commune présente un caractère obligatoire, dans la mesure où elle correspond à une dette certaine, liquide et exigible ;

- l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas invocable dans la présente procédure ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu enregistré au greffe le 5 juillet 2002, le mémoire en défense présenté pour la commune de Brunstatt, représentée par son maire dûment habilité à cet effet, par Me X..., avocat au barreau de Strasbourg qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE à lui payer la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la convention de financement doit être regardée comme une offre de concours ;

- eu égard à l'abandon par l'Etat du projet de canal Rhin-Rhône, ladite convention est devenue caduque ;

- la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE doit se retourner contre l'Etat pour obtenir le remboursement des sommes qu'elle estime lui être dues du fait de l'abandon illégal du projet de canal à grand gabarit ;

- la commune de Brunstatt a engagé une action contre l'Etat en vue d'être indemnisée du préjudice qu'elle a subi du fait de l'abandon du projet ;

- la créance en cause fait l'objet d'une contestation sérieuse empêchant la mise en oeuvre de la procédure d'inscription d'office ;

Vu enregistré au greffe le 13 mars 2006, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire qui ne formule aucune observation à la requête d'appel formée par la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juin 2006 :

- le rapport de Mme Stahlberger, présidente,

- les observations de Me Vivien, avocat de la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE et de Me Dieten Hoeffer, avocat de la commune de Brunstatt ;

- et les conclusions de M. Adrien, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales : «Ne sont obligatoires pour les collectivités territoriales que les dépenses nécessaires à l'acquittement des dettes exigibles et les dépenses pour lesquelles la loi l'a expressément décidé. / La chambre régionale des comptes saisie, soit par le représentant de l'Etat dans le département, soit par le comptable public concerné, soit par toute personne y ayant intérêt, constate qu'une dépense obligatoire n'a pas été inscrite au budget ou l'a été pour une somme insuffisante. Elle opère cette constatation dans le délai d'un mois à partir de sa saisine et adresse une mise en demeure à la collectivité territoriale concernée. / Si, dans un délai d'un mois, cette mise en demeure n'est pas suivie d'effet, la chambre régionale des comptes demande au représentant de l'Etat d'inscrire cette dépense au budget et propose, s'il y a lieu, la création de ressources ou la diminution de dépenses facultatives destinées à couvrir la dépense obligatoire. Le représentant de l'Etat dans le département règle et rend exécutoire le budget rectifié en conséquence. S'il s'écarte des propositions formulées par la chambre régionale des comptes, il assortit sa décision d'une motivation explicite» ;qu'aux termes de l'article L. 1612-16 du même code : «A défaut de mandatement d'une dépense obligatoire par le maire, le président du conseil général ou le président du conseil régional suivant le cas, dans le mois suivant la mise en demeure qui lui a été faite par le représentant de l'Etat dans le département, celui-ci y procède d'office. / Le délai prévu à l'alinéa précédent est porté à deux mois si la dépense est égale ou supérieure à 5 p.100 de la section de fonctionnement du budget primitif» ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales qu'une dépense ne peut être regardée comme obligatoire et faire l'objet d'un mandatement d'office que si elle correspond à une dette échue, certaine, liquide, non sérieusement contestée dans son principe et dans son montant et découlant de la loi, d'un contrat, d'un délit, d'un quasi-délit ou de toute autre source d'obligations ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en application de la loi n° 80-3 du 4 janvier 1980, la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE a été chargée de la construction d'un canal à grand gabarit allant de Laferrière sur la Saône à Niffer sur le Grand Canal d'Alsace ; que l'article 2 de la même loi dispose que le «financement des travaux… bénéficie notamment de crédits ouverts au budget de l'Etat et de contributions volontaires des collectivités territoriales et des établissements publics intéressés par la liaison entre le Rhin et la Méditerranée» ; que l'article 3 du décret du 22 novembre 1990 qui a autorisé la réalisation d'une voie navigable à grand gabarit entre Niffer et Mulhouse dispose que : «pour la réalisation de l'opération, la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE bénéficiera, à hauteur de 80 % d'un concours financier de l'Etat qui en définira lui-même les modalités, ainsi que des contributions volontaires des collectivités territoriales et des établissements publics intéressés par la liaison Saône Rhin pour un montant égal à 20 % de l'opération» ; que dans le cadre de ces dispositions législatives et réglementaires, la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE a signé avec la commune de Brunstatt une convention en date du 25 avril 1994 qui détermine le montant de la participation financière de ladite commune à l'opération, ainsi que les modalités de paiement fractionné lui incombant ; que le moyen tiré de ce que l'abandon par l'Etat de la réalisation de l'ensemble du projet de liaison Saône Rhin fait perdre sa cause à l'engagement de la commune de Brunstatt de contribuer à financer les travaux de mise à grand gabarit du canal, alors que cet engagement a été pris uniquement dans la perspective de la réalisation de l'ensemble du projet, constitue une contestation sérieuse de la créance de la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE de nature à faire obstacle à la mise en oeuvre de la procédure de mandatement d'office prévue à l'article L.1612-5 susrappelé du code général des collectivités territoriales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté du préfet du Haut-Rhin en date du 29 août 2000 mandatant d'office au budget de la commune de Brunstatt la somme de 147 556,50 F restant due à raison des travaux qu'elle a exécutés ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Brunstatt qui n'est pas la partie perdante le paiement à la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE des frais exposés par elle dans la présente instance et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE le paiement à la commune de Brunstatt de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE est rejetée.

Article 2 : La COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE versera à la commune de Brunstatt la somme de mille cinq cents euros (1 500 €) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE, à la commune de Brunstatt et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

Copie sera en outre adressée pour information au préfet du Haut-Rhin.

4

N° 01NC01111


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01NC01111
Date de la décision : 22/06/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: Mme Evelyne STAHLBERGER
Rapporteur public ?: M. ADRIEN
Avocat(s) : SESTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-06-22;01nc01111 ?
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