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02/08/2012 | FRANCE | N°11NC01516

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 02 août 2012, 11NC01516


Vu la requête, enregistrée le 8 septembre 2011, complétée par des mémoires enregistrés les 27 février 2012 et 30 avril 2012, présentée pour M. Paul-Henri A, demeurant 22 rue Hubert Fabureau Appt 121 Résidence Saint-Exupéry à Auxerre (89000), par Me Linval, avocat ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002321 du 11 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 25 octobre 2010 par laquelle le ministre du travail a retiré la décision implicite de r

ejet, née le 11 octobre 2010, du recours hiérarchique formé par la Caisse région...

Vu la requête, enregistrée le 8 septembre 2011, complétée par des mémoires enregistrés les 27 février 2012 et 30 avril 2012, présentée pour M. Paul-Henri A, demeurant 22 rue Hubert Fabureau Appt 121 Résidence Saint-Exupéry à Auxerre (89000), par Me Linval, avocat ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002321 du 11 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 25 octobre 2010 par laquelle le ministre du travail a retiré la décision implicite de rejet, née le 11 octobre 2010, du recours hiérarchique formé par la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel de Champagne-Bourgogne contre la décision du 17 mai 2010 de l'inspecteur de travail refusant l'autorisation administrative de licenciement le concernant et a accordé l'autorisation de le licencier ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge de la caisse régionale de Crédit Agricole mutuel de Champagne-Bourgogne et de l'Etat une somme de 5 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que :

- le mémoire enregistré le 28 avril 2011 présenté par la Caisse régionale de Crédit Agricole ne lui a pas été transmis ;

- le rapport d'enquête de la direction régionale du travail ne lui pas été communiqué ;

- la décision de retrait du 25 octobre 2010 est illégale, dès lors qu'elle n'invoque ni la régularité de la procédure, ni une incompétence territoriale, ni une violation de la loi ou un détournement de pouvoir alors que la décision de l'inspecteur du travail n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'entretien préalable à son licenciement s'est déroulé sans motif légitime à Dijon qui n'est ni son lieu de travail, ni le siège de l'entreprise alors que le fait d'avoir été écarté de son poste de travail a pu entraver sa défense ;

- la circonstance que le conseil de discipline et le comité d'entreprise se sont réunis à Dijon lui a porté préjudice car des documents susceptibles d'éclairer les débats et d'établir la réalité des faits fautifs allégués étaient manquants ;

- la transmission tardive du procès-verbal a eu des effets sur la régularité de la mise à pied conservatoire conventionnellement limitée à 15 jours ;

- la circonstance que les débats n'aient pas été portés sur le procès-verbal transmis au ministre à l'appui du recours hiérarchique vicie également la procédure ;

- alors que l'administration avait été saisie du recours hiérarchique le 11 juin 2010, elle a attendu le 31 août 2010 pour procéder à l'audition des parties, le mettant dans l'impossibilité au regard de la période estivale, de se faire assister par un avocat ;

- l'inspecteur du travail a été saisi par l'employeur de quatre griefs alors que le quatrième relatif à la détention de fonds appartenant à des clients n'a pas été communiqué au conseil de discipline tandis que le ministre a retenu les deux derniers ;

- les griefs qui lui sont reprochés ne sont pas fondés car il n'a fait que répondre à une demande d'échange de bons formulée pas deux clients et n'a tiré aucun profit personnel de la transaction relative au retrait de 10 000 euros alors que la banque n'a pas été en mesure de préciser en quoi la procédure n'avait pas été respectée, qu'elle a estimé régulariser les opérations de façon contestable et sans aucun document établi et signé et que les risques encourus par l'établissement en matière de détention de fonds pour le compte d'un client ne sont pas établis ;

- la décision de licenciement est en lien avec son mandat syndical alors qu'il a été victime de discrimination syndicale ;

- l'autorisation administrative aurait dû être refusée pour un motif d'intérêt général alors qu'il est le seul représentant du personnel de l'agence de Tonnerre et que par conséquent son licenciement empêcherait toute représentation du personnel de cette agence de la présence d'un représentant actif ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2011, complété par des mémoires enregistrés les 27 janvier 2012, et 6 avril 2012, présenté pour la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel de Champagne-Bourgogne, dont le siège social est 269 Faubourg Croncels à Troyes (10083), représentée par son directeur, par la SCP Jean-Jacques Gatineau et Carole Fattaccine, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 500 € soit mise à la charge de M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La Caisse soutient que :

- l'absence de communication par l'administration du rapport d'enquête n'est pas de nature à entacher d'illégalité la décision du ministre dès lors que le requérant n'a pas sollicité ce document lors de l'instruction du recours hiérarchique ;

- le lieu de l'entretien préalable est justifié dès lors que sa direction développement des ressources humaines et de la communication est établie à Dijon ;

- les droits de la défense ont été respectés dans la mesure où l'intéressé a été accompagné d'un délégué syndical ;

- la pratique est que les entretiens organisés dans le cadre des procédures disciplinaires et les réunions du conseil de discipline n'aient pas lieu dans les agences, mais soit au siège social de Troyes, soit au siège social de la direction des ressources humaines à Dijon ;

- l'article R. 2421-14 n'a pas été méconnu dès lors que ces dispositions n'imposent nullement que le procès-verbal du comité d'entreprise soit transmis à l'inspection du travail dans les 48 heures mais uniquement que la demande d'autorisation de licenciement le soit alors que le procès-verbal a été adressé à l'inspecteur du travail dans une version succincte le 23 mars 2010 et dans sa version intégrale le 26 mars 2010, approuvée par le comité d'entreprise dans sa séance du 25 mars 2010 ;

- le moyen tiré de ce que l'audition des parties n'a eu lieu que le 31 août 2010 alors que le recours hiérarchique a été formé le 11 juin 2010 ne pourra qu'être écarté dès lors qu'aucun texte ne fixe un délai particulier pour l'audition des parties et qu'elle est intervenue dans le délai de quatre mois dont dispose le ministre pour statuer ;

- les droits de la défense n'ont pas été méconnus alors que le requérant, informé par courrier du 30 juillet 2010 de ce que l'audition aurait lieu le 31 août 2010, a demandé son report le jour même et que son conseil a pu produire des observations écrites, qu'il a été destinataire du recours du ministre et des pièces jointes et qu'il n'a jamais demandé communication des rapports de l'inspecteur du travail et de la direction régionale du travail ;

- le grief relatif à la détention de fonds appartenant à un client a bien été soumis au conseil de discipline et au comité d'entreprise ;

- elle avait demandé le licenciement sur la base de quatre griefs et ceux relatifs au non respect des procédures relatives aux commandes d'espèces client et à l'imitation de signature n'ont pas été retenus ;

- les griefs retenus par le ministre sont établis alors que le non respect des règles bancaires dans les opérations relatives au retrait de 10 000 euros et à la détention de fonds appartenant à des clients sont démontrés par les faits qui révèlent une violation caractérisée des règles élémentaires de prudence et de déontologie ;

- la loi du 12 juillet 1990 sur le blanchiment a mis fin aux pratiques qui consistaient à reprendre les bons au porteur ou bons d'épargne alors que les opérations que la banque a effectuées pour régulariser la situation peuvent être vérifiées ;

- le retrait de la décision de l'inspecteur du travail n'est pas illégal car le ministre a pu valablement, pendant le délai de recours contentieux, estimer que l'inspecteur du travail a commis une erreur dans l'appréciation des faits ;

- il n'existe aucun lien entre son mandat et la procédure de licenciement ;

Vu l'ordonnance en date du 20 février 2012 fixant la clôture d'instruction au 9 mars 2012, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance en date du 19 avril 2012 portant réouverture de l'instruction ;

Vu l'ordonnance en date du 19 avril 2012 fixant la clôture d'instruction au 4 mai 2012, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 juin 2012 :

- le rapport de M. Wallerich, premier conseiller,

- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,

- et les observations de M. A ;

Considérant que la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel de Champagne-Bourgogne a demandé à l'inspecteur du travail, le 23 mars 2010, l'autorisation de licencier pour fautes graves M. A, salarié protégé ; que par une décision du 17 mai 2010, l'inspecteur du travail lui a refusé cette autorisation ; qu'à la suite du recours hiérarchique qu'elle a formé le 10 juin 2010 à l'encontre de cette décision, le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique a, le 25 octobre 2010, annulé la décision de l'inspecteur du travail et accordé l'autorisation de licencier M. A ; que celui-ci interjette appel du jugement du 11 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes... Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que le mémoire enregistré le 28 avril 2011 présenté par la Caisse régionale de Crédit Agricole ne comportait aucun élément nouveau ; que par suite, les premiers juges ont pu, sans méconnaître le caractère contradictoire de la procédure statuer sans communiquer ledit mémoire ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure doit être écarté ;

Considérant, d'autre part, que les premiers juges ont pu se prononcer sur le litige dont ils étaient saisis, eu égard aux nombreuses pièces du dossier, sans qu'il soit nécessaire de solliciter la communication du rapport d'enquête de la direction régionale du travail lequel a été, au demeurant, versé au dossier dans la présente instance ;

Sur la légalité de la décision du ministre :

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que le licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

En ce qui concerne le moyen tiré du respect de la procédure contradictoire :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 2421-11 du code du travail : " L'inspecteur du travail procède à une enquête contradictoire au cours de laquelle le salarié peut, sur sa demande, se faire assister d'un représentant de son syndicat.(...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a été auditionné le 31 août 2010 dans les locaux de la Caisse régionale à Troyes après avoir été informé, par lettre du 30 juillet 2010, que son employeur avait formé un recours hiérarchique contre la décision de refus d'autoriser son licenciement ; qu'il a reçu, à cette occasion, une copie dudit recours dont il ne conteste pas avoir été mis à même de prendre connaissance avec l'ensemble des éléments du dossier, le bordereau des pièces communiquées par son employeur lui ayant été remis ; qu'ayant alors demandé à être assisté d'un avocat, ce dernier a fait parvenir ses observations écrites par lettre du 14 septembre 2010 ; que, par suite, alors qu'il n'établit ni n'allègue avoir été empêché de prendre connaissance d'une pièce de la procédure, M. A n'est pas fondé à soutenir que le caractère contradictoire de la procédure aurait été méconnu au motif qu'il n'a pu se faire assister d'un avocat ;

En ce qui concerne la saisine de l'administration :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 2421-14 du code du travail : " En cas de faute grave, l'employeur peut prononcer la mise à pied immédiate de l'intéressé jusqu'à la décision de l'inspecteur du travail. / La consultation du comité d'entreprise a lieu dans un délai de dix jours à compter de la date de la mise à pied. / La demande d'autorisation de licenciement est présentée dans les quarante-huit heures suivant la délibération du comité d'entreprise. S'il n'y a pas de comité d'entreprise, cette demande est présentée dans un délai de huit jours à compter de la date de la mise à pied. / La mesure de mise à pied est privée d'effet lorsque le licenciement est refusé par l'inspecteur du travail ou, en cas de recours hiérarchique, par le ministre. " ; que si le délai de quarante huit heures institué par les dispositions précitées n'est pas prescrit à peine de nullité, il doit cependant être aussi court que possible ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de la plainte d'un client et d'une enquête diligentée par le service " qualité service client ", la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel de Champagne-Bourgogne a mis à pied à titre conservatoire M. A ; que le comité d'entreprise s'est réuni le vendredi 19 mars 2010 et la demande d'autorisation a été adressée par la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel de Champagne-Bourgogne à l'inspecteur du travail le mardi 23 mars 2010, complété par un envoi du 26 mars 2010 ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la transmission de la demande a été tardive ;

Considérant, d'autre part, que le moyen tiré du caractère incomplet du procès-verbal dont le ministre a été saisi à l'appui du recours hiérarchique manque en fait ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la régularité de la procédure interne à l'entreprise :

S'agissant de l'entretien préalable :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1232-2 du code du travail : " L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. (...) ; qu'aux termes de l'article R. 1232-1 du même code : " La lettre de convocation prévue à l'article L. 1232-2 indique l'objet de l'entretien entre le salarié et l'employeur. / Elle précise la date, l'heure et le lieu de cet entretien. / Elle rappelle que le salarié peut se faire assister pour cet entretien par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou, en l'absence d'institutions représentatives dans l'entreprise, par un conseiller du salarié. " ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que l'entretien préalable doive se dérouler sur le lieu de travail du salarié ni au siège social de l'entreprise ; que l'entretien préalable a eu lieu le 17 mars 2010 à Dijon après que M. A en a été avisé le 10 mars 2010 ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que la circonstance que l'entretien ait eu lieu en dehors de son poste de travail ait eu pour conséquence de priver M. A, qui s'y est rendu accompagné d'un délégué syndical, de la possibilité d'exercer sa défense ; qu'il n'est pas davantage établi, contrairement aux allégations du requérant, que les débats aient été viciés lors de la tenue du conseil de discipline et de celle du comité d'entreprise à Dijon, en raison de l'impossibilité d'accéder à des documents conservés sur son lieu de travail ; que, par suite le moyen tiré d'un vice de procédure doit être écarté, la circonstance à la supposer avérée que d'autres procédures d'entretien préalable ou réunions de conseil de discipline se seraient tenues dans le département du lieu d'affectation des salariés étant inopérante ;

S'agissant de la consultation du comité d'entreprise :

Considérant que si M. A soutient que la note annexée à l'ordre du jour de la lettre de convocation du 12 mars 2010 adressée aux membres du conseil de discipline ne comporte pas l'intégralité des faits qui lui sont reprochés, le grief relatif à la détention des fonds de clients d'une valeur de 10 000 euros et des bons Prédicis au porteur d'une valeur de 29 031,30 euros y est expressément mentionné à la suite de l'énumération des manquements à ses obligations professionnelles ; que le moyen tiré d'une saisine parcellaire manque en fait ;

En ce qui concerne la réalité des fautes :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a procédé, pour le compte d'un client, M. Jollois, à l'issue d'une visite à son domicile intervenue le 24 octobre 2009, à une opération au terme de laquelle ce dernier a été débité, par le biais d'un prélèvement sur son compte bancaire, de la somme de 10 000 euros ; que cette somme a été conservée au coffre de l'agence sous la forme de vingt billets de 500 euros, jusqu'à ce que M. A les apporte au domicile d'une cliente, Mme Halle, le 7 novembre 2009, en échange de sept bons Predicis ; qu'il a remis ces bons à M. Jollois le 12 décembre 2009 après que celui-ci se fut présenté à l'agence pour avoir des explications sur le retrait de la somme de 10 000 euros opéré sur son compte ; que M. Jollois, dans une lettre du 21 février 2010, a saisi la direction de la Caisse du Crédit Agricole de Champagne-Bourgogne estimant avoir été abusé par M. A et contestant formellement la transaction qu'il affirme n'avoir jamais sollicitée ni signée ; qu'en outre, la valeur faciale des bons étaient supérieure à 10 000 euros puisque à la suite de leur restitution opérée après la plainte de M. Jollois, ces bons ont été évalués à 13 667,43 euros net en conservant l'anonymat et à 28 833 euros en remboursement nominatif ; que si M. A soutient avoir réalisé cette transaction à la demande de M. Jollois qui, selon lui, souhaitait ainsi pouvoir dédommager un de ses voisins et contre laquelle il n'aurait pas manifesté son opposition lors de la visite à son domicile effectuée le 4 novembre 2009, il n'est toutefois pas établi qu'à cette date, le client avait reçu son relevé bancaire daté du 31 octobre 2009, faisant apparaître le retrait de 10 000 euros, ni qu'il aurait confirmé la transaction en acceptant la remise des bons Prédicis le 12 décembre 2009 ; que le requérant ne conteste pas l'absence de trace écrite et officielle de ce que M. Jollois souhaitait acquérir des bons anonymes ni de ce que Mme Halle, ancienne détentrice, souhaitait vendre ces bons ; qu'ainsi, les faits reprochés à M. A selon lesquels ce dernier a irrégulièrement détenu des fonds appartenant à un client et n'a pas respecté les procédures officielles et claires dans son rôle d'intermédiaire entre son client âgé et une tierce personne pour un échange de titres de capitalisation au porteur contre la somme de 10 000 euros sont établis par les pièces versées au dossier ;

En ce qui concerne la gravité de la faute :

Considérant que si de tels agissements ont pu être constatés au sein de la profession antérieurement à la loi du 12 juillet 1990 relative à la lutte contre le blanchiment des capitaux, les actes accomplis par M. A dans le cadre de ces transactions effectuées en sa qualité de conseiller particulier et pour le compte de son employeur, étaient contraires aux règles déontologiques bancaires alors en vigueur et contreviennent aux règles et conditions de remboursement des bons de cette nature qui ne sont pas des bons anonymes mais des titres de capitalisation au porteur pour lesquelles les reprises sont impossibles ; que compte tenu des différences de valeur apparues lors de cette transaction, au détriment d'une cliente, M. A, a fait courir des risques à la banque qui a dû régulariser la situation vis-à-vis des clients concernés, en versant la somme de 3 703,27 euros à Mme Halle et en remboursant M. Jollois de la somme de 10 000 euros ; que, dès lors, nonobstant la circonstance que M. A n'avait tiré en l'espèce aucun profit personnel de l'opération à la date de la découverte des faits, les fautes qui lui sont reprochées sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

En ce qui concerne le lien avec le mandat syndical :

Considérant que si M. A soutient que son licenciement est en rapport avec les mandats de délégué syndical qu'il aurait exercés de façon très active, notamment dans le cadre d'une procédure de licenciement intervenue en janvier 2010, et que ses demandes de mutation et d'évolution professionnelle n'ont pas été prises en compte, ces éléments, à les supposer établis, ne permettent pas de démontrer un lien entre ses fonctions de représentant syndical et la décision de le licencier ;

En ce qui concerne le motif d'intérêt général :

Considérant que la circonstance que M. A est le seul représentant du personnel de l'agence bancaire de Tonnerre ne fait pas obstacle à son licenciement dès lors que la représentation syndicale s'apprécie au niveau de l'établissement et non de l'agence ; qu'il n'est pas davantage établi que cette mesure aurait pour effet de priver les salariés de la Caisse régionale du Crédit Agricole, qui couvre 140 agences, de toute représentation syndicale ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que, en n'usant pas de la faculté qui lui est offerte de prendre en compte un motif tiré de l'intérêt général pour refuser d'autoriser le licenciement de M. A, le ministre ait commis une erreur manifeste d'appréciation ; que, dès lors, le moyen sera écarté ;

En ce qui concerne le retrait de la décision de l'inspecteur du travail :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 2422-1 du code du travail : " Le ministre chargé du travail peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que ce salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet. / Ce recours est introduit dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de l'inspecteur. / Le silence gardé pendant plus de quatre mois sur ce recours vaut décision de rejet. " ; que, nonobstant la circonstance que le refus d'autorisation délivré par l'inspecteur du travail soit créateur de droits au profit de M. A, l'expiration du délai de quatre mois à l'issue duquel est intervenue une décision implicite de rejet ne fait pas obstacle à ce que, dans le délai de deux mois de recours contentieux qui suit l'expiration du délai de quatre mois, le ministre rapporte la décision implicite de rejet et procède au retrait de la décision initiale créatrice de droits, dès lors qu'il découle de ce qui précède qu'elles sont l'une et l'autre entachées d'illégalité ; que M. A n'est donc pas fondé à soutenir que la décision en date du 25 octobre 2010 par laquelle le ministre a rapporté sa décision implicite rejetant le recours hiérarchique formé contre la décision de l'inspecteur du travail refusant son licenciement est intervenue tardivement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat et la caisse régionale de Crédit Agricole mutuel de Champagne-Bourgogne, qui n'ont pas la qualité de partie perdante, versent à M. A la somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche une somme de 1 000 euros, à verser à la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel de Champagne-Bourgogne est mise à la charge de M. A sur ce même fondement ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : M. A versera à la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel de Champagne-Bourgogne la somme de 1 000 (mille) euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Paul-Henri A, au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel de Champagne-Bourgogne.

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N° 11NC01516


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC01516
Date de la décision : 02/08/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-03-04-01-01 Travail et emploi. Conditions de travail. Médecine du travail. Statut des médecins du travail dans l'entreprise. Nomination et licenciement.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : LINVAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-08-02;11nc01516 ?
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