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03/07/2014 | FRANCE | N°13NC01965

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 03 juillet 2014, 13NC01965


Vu la requête, enregistrée le 6 novembre 2013, présentée pour Mme C... B..., demeurant..., par Me A... ;

Mme B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302418 du 2 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin en date du 30 mai 2013 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêt

;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement, ...

Vu la requête, enregistrée le 6 novembre 2013, présentée pour Mme C... B..., demeurant..., par Me A... ;

Mme B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302418 du 2 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin en date du 30 mai 2013 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant ce réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance des articles 2, 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car, recherchée par la police dans son pays d'origine depuis 2007, elle serait exposée à des risques pour sa vie si elle devait y être renvoyée ;

- elle souffre depuis plusieurs années de troubles psychiques nécessitant un suivi régulier ; cette situation doit être regardée comme un motif exceptionnel d'admission au séjour au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de titre de séjour est illégal dès lors qu'elle ne dispose pas des ressources nécessaires pour accéder à un traitement médical approprié dans son pays d'origine ;

- elle justifie d'une promesse d'embauche prenant effet au 1er avril 2014 ;

- elle entre dans les cas prévus par la circulaire du 28 novembre 2012 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2014, présenté par le préfet du Bas-Rhin qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2008-1281 du 8 décembre 2008 relatif aux conditions de publication des instructions et circulaires ;

Vu la circulaire NOR INTK1229185C du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 sur les conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 juin 2014 :

- le rapport de M. Pommier, président ;

1. Considérant que MmeB..., née le 31 décembre 1974 en République démocratique du Congo, est entrée irrégulièrement en France le 7 avril 2007, selon ses déclarations ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ont respectivement rejeté sa demande d'asile les 17 septembre 2007 et 23 juillet 2008, ainsi que sa demande de réexamen les 22 janvier 2009 et 5 mars 2010 ; qu'elle s'est vu délivrer deux autorisations provisoires de séjour les 7 mai et 16 novembre 2009 puis le 16 novembre 2010 une carte de séjour temporaire en qualité d'étranger malade ; que, par un arrêté du 9 décembre 2011, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 26 juillet 2012, le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui accorder le renouvellement de son titre de séjour et a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français ; que Mme B...n'a pas déféré à cette mesure d'éloignement et a déposé au guichet de la préfecture du Haut-Rhin, le 21 janvier 2013, " une demande d'admission exceptionnelle au séjour au titre du travail " que le préfet a rejetée par un arrêté du 30 mai 2013, lui faisant également obligation de quitter le territoire sans délai et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ; que Mme B... relève appel du jugement du 2 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ;

3. Considérant, d'une part, que Mme B...a fourni à l'appui de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour au titre du travail des attestations de salaire en tant qu'intérimaire pour de courtes périodes de travail effectuées au cours des années 2008, 2009 et 2010 ; que la promesse d'embauche produite devant la cour est datée du 25 octobre 2013 et est donc postérieure à la décision attaquée ; que c'est dès lors sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le préfet du Haut-Rhin a, au vu des pièces fournies par l'intéressée, estimé qu'en dépit de l'ancienneté de son séjour en France, elle ne justifiait pas de motifs exceptionnels d'admission au séjour au titre du travail ;

4. Considérant, d'autre part, que si Mme B...fait valoir qu'elle rencontre d'importants problèmes de santé, de nature à lui ouvrir droit à une admission exceptionnelle au séjour, il n'est pas contesté qu'elle n'avait nullement fait état d'un tel motif à l'appui de sa demande ; qu'elle n'est donc pas fondée à soutenir que le préfet, qui n'était pas tenu de rechercher si un autre motif que celui invoqué pouvait justifier une admission exceptionnelle au séjour, aurait méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'à supposer que Mme B...ait entendu soulever le moyen tiré de ce que la décision lui refusant un titre de séjour aurait été prise en méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif à l'attribution d'une carte de séjour temporaire pour raisons de santé, il ressort clairement des pièces du dossier qu'elle n'avait pas présenté de demande de titre de séjour sur ce fondement ; que le préfet n'était pas tenu d'examiner d'office si elle entrait dans le champ d'application de ces dispositions ; que, par suite, la requérante ne peut utilement se prévaloir de ce qu'elle ne disposerait pas des ressources lui permettant d'accéder à un traitement médical approprié dans son pays d'origine ;

6. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que, si la requérante soutient que la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour l'exposerait à des risques pour sa vie, prohibés par les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ces moyens ne peuvent être utilement invoqués à l'encontre de cette décision, qui n'implique pas par elle-même le retour de l'intéressée dans son pays ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que comme il a été dit au point 3, la requérante n'a justifié d'une promesse d'embauche que postérieurement à l'édiction de la décision attaquée ; qu'ainsi et en tout état de cause, elle n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions de la circulaire du 28 novembre 2012 ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :

9. Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par le même motif que celui énoncé au point 6 ;

10. Considérant, en second lieu, que la décision faisant obligation à un étranger de quitter le territoire français n'a pas pour objet de fixer le pays de destination, lequel est déterminé par une décision distincte ; qu'ainsi les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont inopérants à l'encontre de l'obligation faite à la requérante de quitter le territoire ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

11. Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par le même motif que celui énoncé au point 6 ;

12. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement, sauf en exécution d'une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par la loi. 2. La mort n'est pas considérée comme infligée en violation de cet article dans les cas où elle résulterait d'un recours à la force rendu absolument nécessaire : a) pour assurer la défense de toute personne contre la violence illégale ; b) pour effectuer une arrestation régulière ou pour empêcher l'évasion d'une personne régulièrement détenue ; c) pour réprimer, conformément à la loi, une émeute ou une insurrection " ; qu'aux termes de l'article 3 de ladite convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

13. Considérant que les allégations de Mme B...relatives au risque que lui ferait courir son retour dans son pays d'origine, en raison des poursuites dont elle ferait l'objet, ne sont pas assorties de justifications suffisantes ; qu'en outre, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ont, à deux reprises, rejeté sa demande de reconnaissance du statut de réfugié ; que la seule circonstance que Mme B...ait obtenu précédemment un titre de séjour en qualité d'étranger malade ne saurait faire regarder son éloignement vers la République démocratique du Congo comme l'exposant à des traitements inhumains alors surtout qu'elle n'établit nullement l'impossibilité où elle se trouverait d'accéder à un traitement approprié à la pathologie dont elle souffre ni le caractère de gravité de cette affection ; que, dès lors, les moyens tirés de ce que la décision fixant le Congo comme pays de destination méconnaîtrait les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sauraient être accueillis ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

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13NC01965


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC01965
Date de la décision : 03/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Joseph POMMIER
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : AFANI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-07-03;13nc01965 ?
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