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05/03/2015 | FRANCE | N°14NC01225

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 05 mars 2015, 14NC01225


Vu la requête, enregistrée le 12 juin 2014, présentée pour M. C...E..., demeurant ... par Me Hoffmann, avocat ;

M. E...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106179 du 15 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 21 novembre 2011 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour au titre de l'asile et a décidé de le remettre aux autorités allemandes ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui déli

vrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre les frais et dépens à la charge de...

Vu la requête, enregistrée le 12 juin 2014, présentée pour M. C...E..., demeurant ... par Me Hoffmann, avocat ;

M. E...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106179 du 15 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 21 novembre 2011 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour au titre de l'asile et a décidé de le remettre aux autorités allemandes ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre les frais et dépens à la charge de l'Etat ;

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué méconnaît l'article 7 du règlement (CE) n° 343/2003 du 18 février 2003 dès lors que l'Etat français aurait dû se considérer responsable de l'examen de sa demande d'asile ;

- l'arrêté attaqué méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est contraire à l'intérêt supérieur de son enfant tel que protégé par l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 janvier 2015, présenté par le préfet de la Moselle, qui conclut au rejet de la requête par les mêmes moyens que ceux opposés en première instance ;

Vu la lettre du 29 janvier 2015 informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt de la cour est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées par M. E...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative faute pour celles-ci d'être chiffrées ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 19 août 2014 accordant à M. E... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 février 2015 :

- le rapport de M. Di Candia, premier conseiller ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

1. Considérant que M. E...relève appel du jugement n° 1106179 du 15 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 21 novembre 2011 du préfet de la Moselle refusant de l'admettre au séjour et décidant de le remettre aux autorités allemandes ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, rendues applicables à l'étranger qui demande l'asile lorsque l'examen de sa demande relève de la responsabilité de l'un des Etats membres de l'Union européenne en application de conventions internationales : " Par dérogation aux articles L .213-2 et L. 213-3, L. 511-1 à L. 511-3, L. 512-2 à L. 512-5, L. 513-1 et L. 513-3, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 212-1, L. 212-2, L. 311-1 et L. 311-2 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des convention internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne. (...) " ;

3. Considérant d'autre part qu'en vertu du 1° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile peut être refusée notamment si l'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat en application des dispositions du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers, ou d'engagements identiques à ceux prévus par ce règlement avec d'autres Etats ;

4. Considérant que le règlement (CE) n° 343/2003 du 18 février 2003 pose en principe dans le paragraphe 1 de son article 3 qu'une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre ; que cet Etat est déterminé par application des critères fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre, à moins que l'application de ces critères soit écartée en cas de mise en oeuvre, soit de la clause dérogatoire énoncée au paragraphe 2 de l'article 3 du règlement, soit de la clause humanitaire définie par l'article 15 du règlement ;

5. Considérant, enfin, qu'en vertu de l'article 7 du règlement susmentionné, si un membre de la famille du demandeur d'asile, que la famille ait été ou non préalablement formée dans le pays d'origine, a été admis à résider en tant que réfugié dans un État membre, cet État membre est responsable de l'examen de la demande d'asile, à condition que les intéressés le souhaitent ; qu'en vertu de l'article 2 de ce même règlement, on entend par "membres de la famille", dans la mesure où la famille existait déjà dans le pays d'origine, les membres suivants de la famille du demandeur présents sur le territoire des États membres : i) le conjoint du demandeur d'asile, ou son ou sa partenaire non marié(e) engagé(e) dans une relation stable, lorsque la législation ou la pratique de l'État membre concerné réserve aux couples non mariés un traitement comparable à celui réservé aux couples mariés, en vertu de sa législation sur les étrangers, ainsi que les enfants mineurs des couples précités à condition qu'ils soient non mariés et à sa charge, sans discrimination selon qu'ils sont nés du mariage, hors mariage ou qu'ils ont été adoptés, conformément au droit national ;

6. Considérant qu'il est constant que les enfants mineurs A...etD..., nés sous le nom deB..., sont titulaires d'un titre de voyage pour réfugiés ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des mentions figurant sur la copie des actes de naissance de ces enfants, produits pour la première fois en appel, que M. E...a reconnu en être le père le 20 juin 2013 ; qu'il ressort par ailleurs des mentions de ces actes de naissance qu'une déclaration conjointe de changement de nom a été enregistrée devant l'officier d'état civil pour chacun de ces enfants, le 24 mars 2014, indiquant que ceux-ci porteraient désormais le nom de M.E..., leur père ; que dans ces conditions, M. E...doit être regardé comme apportant la preuve de la paternité des enfants A...et D...; que, par suite, M. E...est fondé à soutenir qu'en refusant de l'admettre au séjour au motif qu'il n'établissait pas être le père de A...etD..., le préfet de la Moselle a méconnu les dispositions de l'article 7 du règlement (CE) n° 343/2003 du 18 février 2003 ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. E...est fondé à demander l'annulation du jugement du 15 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Moselle du 21 novembre 2011 portant refus d'admission au séjour et décision de remise aux autorités allemandes ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que le présent jugement, eu égard au motif d'annulation qu'il retient, implique nécessairement que le préfet de la Moselle enregistre la demande de reconnaissance de la qualité de réfugié présentée par M. E...et lui délivre le temps de son examen le document provisoire de séjour mentionné à l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, et alors que le préfet ne fait pas valoir en défense que le requérant entre dans un des cas prévus à l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à l'exception du 1°, lui permettant de refuser la délivrance d'une telle autorisation provisoire de séjour à un étranger, il y a lieu d'enjoindre au préfet de procéder à l'enregistrement de la demande du requérant et de lui délivrer le document de séjour prévu à l'article L. 742-1 dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que si M. E...demande " le remboursement des frais et dépens ", de telles conclusions, non chiffrées, sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1106179 du tribunal administratif de Strasbourg du 15 avril 2014 et l'arrêté du préfet de la Moselle du 21 novembre 2011 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Moselle de procéder à l'enregistrement de la demande de M. E...et de lui délivrer le document de séjour prévu à l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...E...et au ministre de l'intérieur.

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Moselle.

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14NC01225


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC01225
Date de la décision : 05/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Olivier DI CANDIA
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : SCP GENIN-HOFFMANN-HUM

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-03-05;14nc01225 ?
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