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21/04/2016 | FRANCE | N°15NC01201

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 21 avril 2016, 15NC01201


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 7 juillet 2014 par lesquels le préfet du Bas-Rhin a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être éloignés.

Par un jugement n° 1404853,1404854 du 21 janvier 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

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r une requête, enregistrée le 29 mai 2015, MmeC..., représentée par

Me Chebbale, demande à la cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 7 juillet 2014 par lesquels le préfet du Bas-Rhin a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être éloignés.

Par un jugement n° 1404853,1404854 du 21 janvier 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 mai 2015, MmeC..., représentée par

Me Chebbale, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1404853,1404854 du tribunal administratif de Strasbourg du 21 janvier 2015 en tant qu'il porte rejet de sa demande d'annulation de l'arrêté du 7 juillet 2014 du préfet du Bas-Rhin refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans les mêmes conditions ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à Me Chebbale d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- cette décision n'est pas motivée ;

- cette décision n'est pas suffisamment motivée en fait, le préfet n'ayant pas procédé à l'examen de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas été consultée ;

- la décision attaquée est entachée d'erreur de droit au regard de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'à la date à laquelle elle a été prise, la décision de la Cour nationale du droit d'asile rejetant sa demande ne lui était pas notifiée ;

- la décision portant refus de titre a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision a méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences sur sa situation personnelle.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- la décision est entachée d'erreur de droit au regard de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile faute de notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la décision fixant le pays de destination :

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;

- elle est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Un mémoire présenté par Mme C...a été enregistré le 21 mars 2016, postérieurement à la clôture d'instruction.

Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy du 25 juin 2015.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Di Candia.

1. Considérant que Mme B... épouseC..., de nationalité azerbaïdjanaise, est entrée en France le 31 mai 2011 accompagnée de son époux, de nationalité arménienne, afin de solliciter l'octroi du statut de réfugié ; que leurs demandes d'asile ont été rejetées par deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 13 juillet 2012 confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 5 avril 2013 ; que par un arrêté du 10 juin 2013, le préfet du Bas-Rhin a refusé de délivrer à Mme C...un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ; que par un arrêté du 8 juillet 2013, le préfet du Bas-Rhin a retiré et remplacé par des décisions identiques l'arrêté du 10 juin 2013 ; que l'époux de Mme C...ayant introduit, antérieurement à l'édiction des décisions antérieurement contestées, une demande de titre de séjour en qualité de salarié, le préfet a, par arrêté du 10 octobre 2013, procédé au retrait de l'arrêté du 8 juillet 2013 ; qu'après une nouvelle instruction de sa demande, le préfet du Bas-Rhin a pris un arrêté du 7 juillet 2014 par lequel il a refusé de délivrer à Mme C...un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée ; que Mme C...relève appel du jugement du 21 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 733-32 du même code dans sa version en vigueur à la même date : " Le secrétaire général de la cour notifie la décision de la cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 213-3. Il la notifie également au directeur général de l'office. Il informe simultanément du caractère positif ou négatif de cette décision le préfet compétent et, à Paris, le préfet de police ainsi que le directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / La cour communique au préfet compétent et, à Paris, au préfet de police, lorsque ceux-ci en font la demande, copie de l'avis de réception (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'étranger, qui sollicite l'octroi du statut de réfugié, a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'OFPRA ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile ; qu'en l'absence d'une telle notification, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire ; qu'en cas de contestation sur ce point, il appartient à l'autorité administrative de justifier que la décision de la Cour nationale du droit d'asile a été régulièrement notifiée à l'intéressé, le cas échéant en sollicitant la communication de la copie de l'avis de réception auprès de la cour ;

3. Considérant que pour établir que la décision rendue par la Cour nationale du droit d'asile, le 5 avril 2013, rejetant le recours formé par Mme C...à l'encontre de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides portant rejet de la demande de réfugié, a été notifiée à l'intéressée, le préfet du Bas-Rhin a produit en première instance une capture d'écran de l'application informatique " Télémofpra " ; que cette seule production ne peut pallier l'absence de preuve de la notification par voie postale de cette décision prévue par les dispositions précitées de l'article R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la circonstance que Mme C...ait effectivement eu connaissance de l'adoption d'une décision de la Cour nationale du droit d'asile, à la supposer établie, ne peut suppléer l'absence de preuve de ce qu'elle aurait reçu notification de cette décision ; qu'enfin, si le préfet du Bas-Rhin soutient que la décision de la Cour nationale du droit d'asile a été notifiée à l'intéressée à l'adresse de l'Auda, 24 rue Macon à Strasbourg, Mme C...soutient sans être contredite qu'à la date de notification de cette décision, elle était domiciliée... ; que dans ces conditions, Mme C...est fondée à soutenir qu'à la date du

7 juillet 2014, date de l'arrêté du préfet du Bas-Rhin, elle bénéficiait encore du droit de séjourner en France, ce qui faisait obstacle à ce que le préfet puisse prendre à son encontre une décision portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

5. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique que la demande de

Mme C...soit réexaminée ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de procéder à ce réexamen, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, durant cette période d'instruction, Mme C...sera munie d'une autorisation provisoire de séjour en application des dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'y a pas lieu en revanche d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant que Mme C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Chebbale, avocat de MmeC..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de ce dernier le versement à Me Chebbale de la somme de 1 000 euros ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg n°1404853,1404854 du 21 janvier 2015 est annulé en tant qu'il porte rejet de la demande de

Mme C...tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juillet 2014 du préfet du Bas-Rhin refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

Article 2 : L'arrêté du préfet du Bas Rhin du 7 juillet 2014 refusant de délivrer à Mme C...un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Bas-Rhin, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, de réexaminer la demande de Mme C...et de la munir d'une autorisation provisoire de séjour en application des dispositions de l'article

L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Article 4 : L'État versera à Me Chebbale une somme de 1 000 (mille) euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par Mme C...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêté sera notifié à Mme A...B...épouse C...et au ministre de l'intérieur.

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

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N°15NC01201


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01201
Date de la décision : 21/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ETIENVRE
Rapporteur ?: M. Olivier DI CANDIA
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : CHEBBALE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/05/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-04-21;15nc01201 ?
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