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06/07/2021 | FRANCE | N°20NC00108

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 06 juillet 2021, 20NC00108


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2019 par lequel le préfet de la Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné, ou à défaut, de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à la décision de la Cour nationale du droit d'asile.

Par un jugement n° 1902645 du 19 décembre 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Cham

pagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 23 octobre 2019 par lequel le préfet de la Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné, ou à défaut, de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à la décision de la Cour nationale du droit d'asile.

Par un jugement n° 1902645 du 19 décembre 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 janvier 2020, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 19 décembre 2019 ;

2°) à titre principal, d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 23 octobre 2019 du préfet de la Marne ;

3°) à titre subsidiaire de suspendre l'exécution de l'arrêté du 23 octobre 2019 jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile prenne sa décision et d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer, durant cette attente, un récépissé l'autorisant à séjourner sur le territoire français.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au regard des risques qu'il encourt en cas de retour dans son pays d'origine ;

- il est fondé à en solliciter la suspension de la mesure d'éloignement en application de l'article L.743-3 alinéa 2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard de sa vie privée et familiale.

Le préfet de la Marne, à qui la procédure a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 mai 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

-la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., de nationalité centrafricaine, est entré en France à la date déclarée du 7 novembre 2015 et a sollicité auprès des autorités françaises son admission au séjour en qualité de demandeur d'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par décision du 13 avril 2017, confirmée par une décision du 12 avril 2019 de la Cour nationale du droit d'asile. La demande de réexamen de M. C... a été rejetée le 16 septembre 2019 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Par arrêté du 23 octobre 2019, le préfet de la Marne l'a obligé à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a octroyé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays de destination. M. C... fait appel du jugement du 19 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions d'annulation :

En ce qui concerne la décision pourtant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée M. C... était pacsé depuis un mois et demi, soit depuis le 5 septembre 2019, avec une ressortissante française. Les trois pièces produites à hauteur d'appel par le requérant sont insuffisantes pour attester d'une relation stable et ancienne avec sa compagne. Par ailleurs, il n'établit pas être dépourvu de toute attache familiale ou privée dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 36 ans. Par suite, la décision portant obligation de quitter le territoire français au regard des buts qu'elle poursuit, ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale normale, garanti notamment par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. En deuxième lieu, pour les motifs exposés au point précédent, cette décision n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa vie personnelle.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

5. L'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

6. Pour contester cette décision, M. C... se borne à évoquer la situation générale en République centrafricaine et n'apporte aucun élément de nature à démontrer l'existence de risques actuels, sérieux et personnels auxquels il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine ou dans un autre pays où il serait légalement admissible. Par suite, en désignant la République centrafricaine comme pays de renvoi, le préfet de la Marne n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. Il résulte de ce qui précède que les conclusions présentées par M. C... tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à la suspension de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français :

8. Aux termes de l'article L.723-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " L'office peut prendre une décision d'irrecevabilité écrite et motivée, sans vérifier si les conditions d'octroi de l'asile sont réunies, dans les cas suivants : (...)3° En cas de demande de réexamen lorsque, à l'issue d'un examen préliminaire effectué selon la procédure définie à l'article L. 723-16, il apparaît que cette demande ne répond pas aux conditions prévues au même article. ". Aux termes de l'article L.723-16 du même code : " A l'appui de sa demande de réexamen, le demandeur indique par écrit les faits et produit tout élément susceptible de justifier un nouvel examen de sa demande d'asile. L'office procède à un examen préliminaire des faits ou des éléments nouveaux présentés par le demandeur intervenus après la décision définitive prise sur une demande antérieure ou dont il est avéré qu'il n'a pu en avoir connaissance qu'après cette décision. Lors de l'examen préliminaire, l'office peut ne pas procéder à un entretien. Lorsque, à la suite de cet examen préliminaire, l'office conclut que ces faits ou éléments nouveaux n'augmentent pas de manière significative la probabilité que le demandeur justifie des conditions requises pour prétendre à une protection, il peut prendre une décision d'irrecevabilité. ". Aux termes de l'article L743-2 du même code : " " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque (...)4° L'étranger n'a introduit une première demande de réexamen, qui a fait l'objet d'une décision d'irrecevabilité par l'office en application du 3° de l'article L. 723-11, qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement ;4° bis Sans préjudice du 4° du présent article, l'office a pris une décision d'irrecevabilité en application du 3° de l'article L. 723-11 ;(...) ".

9. Aux termes de l'article L743-3 du même code : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. Dans le cas où le droit de se maintenir sur le territoire a pris fin en application des 4° bis ou 7° de l'article L. 743-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné statuant sur le recours formé en application de l'article L. 512-1 contre l'obligation de quitter le territoire français de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin fait droit à la demande de l'étranger lorsque celui-ci présente des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire durant l'examen de son recours par la cour. "

10. La possibilité ainsi prévue de solliciter la suspension d'une mesure d'éloignement consécutive à un refus d'asile opposé par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides s'applique notamment, en vertu des dispositions du 4°bis de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lorsque l'OFPRA a pris une décision d'irrecevabilité en application du 3° de l'article L. 723-11, ce qui est le cas de M. C... au regard de la décision du 16 septembre 2019 produite à l'instance.

11. Le requérant, qui se prévaut seulement de sa vie privée et familiale, ne présente aucun élément sérieux au sens des dispositions précitées de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de nature à justifier son maintien sur le territoire jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile statue sur sa demande. Par suite, et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer, les conclusions aux fins de suspension de l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français doivent être rejetées.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Les conclusions qu'il présente aux fins d'injonction ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

2

N° 20NC00108


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00108
Date de la décision : 06/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : DIALLO

Origine de la décision
Date de l'import : 03/08/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-07-06;20nc00108 ?
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