Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 9 août 2001, présentée pour la société à responsabilité limitée (S.A.R.L.) Le Moulin-Moine, dont le siège social est au lieudit Moulin-moine, 49510 Jallais, représentée par son gérant, par Me Gilles X..., avocat au barreau d'Angers ;
La S.A.R.L. Le Moulin-Moine demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 99-5150 du 19 avril 2001 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à ce que le département de Maine-et-Loire soit condamné à lui verser la somme, outre intérêts, de 2 780 491 F en réparation des conséquences dommageables pour le fonctionnement de la discothèque et de la pizzeria qu'elle exploite de l'interdiction totale de la circulation sur la route départementale n° 756 pendant la réalisation de travaux de voirie sur celle-ci ;
2°) de condamner le département de Maine-et-Loire à lui verser la somme de 2 780 491 F, avec intérêts à compter du 12 octobre 1999 sur la somme de 544 365 F et du 19 février 2001 sur le surplus ;
C
3°) de condamner le département de Maine-et-Loire à lui verser la somme de 30 000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 janvier 2004 :
- le rapport de M. MARGUERON, président,
- les observations de Me DIALLO, avocat de la S.A.R.L. Le Moulin-Moine,
- les observations de Me RICHOU, avocat du département de Maine-et-Loire,
- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société à responsabilité limitée Le Moulin-Moine exploite une discothèque et une pizzeria desservies par la route départementale n° 756, entre les communes de Jallais et de Beaupreau ; qu'en 1999, le département de Maine-et-Loire a entrepris sur un tronçon d'environ huit kilomètres de cette route, au milieu duquel à peu près se trouvent les deux établissements précités, de très importants travaux de voirie, comportant un recalibrage de chaussée, l'écrêtement à certains endroits du profil en long de la voie, des rectifications de courbes, des modifications de carrefours et des réfections d'ouvrages hydrauliques ; que des arrêtés successifs du président du conseil général de Maine-et-Loire ont interdit la circulation sur ce tronçon de route, sauf pour les riverains, pendant une période qui est allée du 5 janvier 1999 au 28 avril 2000 ; que la société à responsabilité limitée Le Moulin-Moine, qui n'a bénéficié durant cette période que d'une desserte par des voies communales demande la condamnation du département à l'indemniser du préjudice financier qu'elle a subi du fait de la diminution de la fréquentation des établissements qu'elle exploite en conséquence de cette situation ;
Considérant qu'au soutien de sa demande présentée devant le Tribunal administratif de Nantes, la société à responsabilité limitée Le Moulin-Moine invoquait notamment les fautes commises par le département de Maine-et-Loire en ce qui concerne la durée excessive du chantier, les conditions d'organisation de celui-ci et l'absence d'un aménagement de la circulation autre qu'une interdiction totale de circuler sur le tronçon de voie concerné ; qu'en s'abstenant de répondre à ces moyens, qui n'étaient pas inopérants, les premiers juges ont entaché leur jugement d'irrégularité ; qu'ainsi, le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 19 avril 2001 doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société à responsabilité limitée Le Moulin-Moine devant le Tribunal administratif de Nantes ;
Considérant que les modifications affectant la circulation générale et résultant de changements dans l'assiette ou la direction des voies publiques ne sont pas de nature à ouvrir droit à indemnité, dès lors qu'il n'est pas porté atteinte à l'accès des immeubles ; qu'ainsi, la société à responsabilité limitée Le Moulin-Moine, dont les deux établissements n'ont jamais été privés d'accès au cours de l'exécution des travaux sur la route départementale n° 756, n'est pas fondée à se prévaloir des mesures d'interdiction de la circulation autre que celle des riverains au soutien de ses prétentions indemnitaires ;
Considérant que la société requérante ne peut non plus prétendre justifier d'un préjudice anormal et spécial du fait de l'intervention de ces mêmes mesures, dès lors que celles-ci, qui n'ont eu qu'un caractère temporaire, n'ont pas eu pour effet d'empêcher tout accès pour la clientèle des établissements ; que le caractère plus malcommode de ces accès comme le fait que la signalisation directionnelle de la discothèque et de la pizzeria n'était que limitée sont sans influence à cet égard ;
Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier que si les travaux devaient être achevés avant la fin de l'année 1999, ce qui ne constituait pas un délai excessif eu égard à leur nature et leur importance, la poursuite de leur exécution sur l'année 2000 n'a résulté que de précipitations exceptionnel-lement fortes à partir de l'automne ; qu'il n'est pas démontré que, eu égard à leur consistance, ces travaux auraient pu être réalisés par tranches ; que les risques présentés pour les usagers de la voie justifiaient que seuls les riverains fussent autorisés, au demeurant dans des conditions restrictives de circulation, à emprunter le tronçon concerné pendant la durée du chantier ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société à responsabilité limitée Le Moulin-Moine n'est pas fondée à demander la condamnation du département de Maine-et-Loire ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que le département de Maine-et-Loire, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la société à responsabilité limitée Le Moulin-Moine la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de condamner la société à responsabilité limitée Le Moulin-Moine à payer au département de Maine-et-Loire la somme que celui-ci demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 19 avril 2001 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la société à responsabilité limitée Le Moulin-Moine devant le Tribunal administratif de Nantes est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de la société à responsabilité limitée Le Moulin-Moine et du département de Maine-et-Loire tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Le Moulin-Moine, au département de Maine-et-Loire et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
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