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29/09/2005 | FRANCE | N°04NT01494

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3eme chambre, 29 septembre 2005, 04NT01494


Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2004, présentée pour Mme France X, demeurant ..., par Me Soulé ; Mme France X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-2159 du 21 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 16 juillet 2002 par laquelle le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité a retiré la décision de l'inspecteur du travail en date du 5 février 2002 et autorisé son licenciement ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) de condamn

er la mutuelle des travailleurs d'Eure-et-Loir à lui verser une somme de 1 000 euros a...

Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2004, présentée pour Mme France X, demeurant ..., par Me Soulé ; Mme France X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-2159 du 21 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 16 juillet 2002 par laquelle le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité a retiré la décision de l'inspecteur du travail en date du 5 février 2002 et autorisé son licenciement ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) de condamner la mutuelle des travailleurs d'Eure-et-Loir à lui verser une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er septembre 2005 :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort, rapporteur ;

- les observations de Me Bordet, avocat de la mutuelle des travailleurs d'Eure-et-Loir ;

- les conclusions de M. Millet, commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement :

Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre, la requête de Mme X comporte une critique des motifs du jugement attaqué et est accompagnée de la copie de celui-ci ; qu'elle répond donc aux exigences posées, respectivement, par l'article R.411-1 du code de justice administrative, applicable devant le juge d'appel en vertu des dispositions de l'article R.811-3 du même code, et par l'article R.412-1 ; que la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement doit donc être rejetée ;

Sur la légalité de la décision en date du 16 juillet 2002 ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que Mme X a été recrutée le 30 juillet 1998 par la mutuelle des travailleurs d'Eure-et-Loir pour exercer à temps partiel les fonctions de chirurgien dentiste au sein de la clinique dentaire gérée par celle-ci ; que Mme X a été désignée le 16 février 2000 en qualité de déléguée syndicale par le Syndicat national des chirurgiens dentistes de centres de santé ; que son employeur a sollicité le 7 décembre 2001 de la part de l'inspecteur du travail l'autorisation de la licencier en invoquant une attitude en permanence agressive à l'égard des clients du centre de soins dentaires et de son personnel, en relevant l'existence de plaintes de certains patients sur son attitude, de refus de rendez-vous avec elle de la part de certains patients, de plaintes de collaborateurs faisant état de l'impossibilité de travailler avec elle dans des conditions normales et en faisant état de la perte de confiance de la direction à son égard et au total de l'influence négative de son comportement sur l'avenir du centre dentaire ; que cette autorisation, refusée dans un premier temps par l'inspecteur du travail par décision en date du 5 février 2002, a été délivrée dans un second temps par le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, qui a retiré le 16 juillet 2002 la décision de l'inspecteur du travail ;

Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L.236-11, L.412-18, L.425-1 et L.436-1 du code du travail, les délégués du personnel, titulaires et suppléants, les membres, titulaires et suppléants, du comité d'entreprise, les délégués syndicaux et les membres du comité d'hygiène et de sécurité, qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, ne peuvent être licenciés qu'avec l'autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables à son contrat de travail et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;

Considérant que Mme X produit en appel une attestation du 14 décembre 2004 de l'ancien directeur adjoint de la mutuelle des travailleurs d'Eure-et-Loir selon laquelle le directeur de cet organisme avait été avisé, ce qu'il niait jusque-là, de la désignation de l'intéressée en qualité de déléguée syndicale dès le printemps 2000 et qu'il avait alors pris la décision de l'évincer ; que des témoignages défavorables ont alors été sollicités et que de moins en moins de patients réputés faciles lui ont été attribués ; que le seul caractère tardif de cette attestation ne suffit pas à l'écarter et que l'existence de liens personnels entre Mme X et M. Y n'est pas démontrée par la mutuelle ; qu'ainsi, la demande d'autorisation de licenciement n'était pas dénuée de lien avec le mandat exercé par Mme X ;

Considérant, en outre, que les quatre lettres de réclamation de patients mécontents des soins reçus, sur lesquelles se fondent le ministre et l'employeur de Mme X, ne permettent pas de déduire que le comportement de celle-ci était agressif envers ses patients ; qu'elle fournit des attestations de ses précédents employeurs selon lesquelles son comportement personnel et ses aptitudes professionnelles étaient satisfaisants ; qu'elle produit un certificat médical du 9 février 2005 de son médecin traitant qui la suit depuis dix ans établissant, contrairement à ce que soutenait la mutuelle, qu'elle ne fumait pas alors qu'il lui était reproché de fumer dans son cabinet ; que les seuls incidents dont la réalité est établie ne sont pas d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que Mme X, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à la mutuelle des travailleurs d'Eure-et-Loir la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner la mutuelle des travailleurs d'Eure-et-Loir à payer à Mme X la somme de 1 000 euros qu'elle demande au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 21 octobre 2004 du Tribunal administratif d'Orléans et la décision en date du 16 juillet 2002 du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sont annulés.

Article 2 : La mutuelle des travailleurs d'Eure-et-Loir versera à Mme X une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par la mutuelle des travailleurs d'Eure-et-Loir tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme France X, à la mutuelle des travailleurs d'Eure-et-Loir et au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

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N° 04NT01494

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 04NT01494
Date de la décision : 29/09/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALUDEN
Rapporteur ?: M. Philippe D IZARN de VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : SECHET-SOULE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2005-09-29;04nt01494 ?
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