La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/06/2011 | FRANCE | N°10NT00426

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 03 juin 2011, 10NT00426


Vu la requête enregistrée le 26 février 2010, présentée pour la COMMUNE DE GRANVILLE (50404), représentée par son maire en exercice, par Me Martin, avocat au barreau de Rennes ; la COMMUNE DE GRANVILLE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n°s 08-1741 et 08-2668 du 23 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Caen a, à la demande de M. et Mme X, M. Y, Mme Z et l'association Vie et Mémoires du Vieux Granville, annulé l'arrêté du maire de Granville du 22 mai 2008 délivrant à la SARL CEREP France le permis de démolir un immeuble sis 5-7,

cours Jonville ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme X et autres de...

Vu la requête enregistrée le 26 février 2010, présentée pour la COMMUNE DE GRANVILLE (50404), représentée par son maire en exercice, par Me Martin, avocat au barreau de Rennes ; la COMMUNE DE GRANVILLE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n°s 08-1741 et 08-2668 du 23 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Caen a, à la demande de M. et Mme X, M. Y, Mme Z et l'association Vie et Mémoires du Vieux Granville, annulé l'arrêté du maire de Granville du 22 mai 2008 délivrant à la SARL CEREP France le permis de démolir un immeuble sis 5-7, cours Jonville ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme X et autres devant le Tribunal administratif de Caen ;

3°) de mettre à la charge solidaire de M. et Mme X et autres la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code du patrimoine ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2011 :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;

Considérant que la SARL CEREP France a présenté auprès du maire de Granville (Manche), le 26 novembre 2007, une demande de permis de démolir portant sur un bâtiment qui accueillait auparavant une succursale de la Banque de France et une maison d'habitation attenante sis 5-7, cours Jonville ; que l'architecte des Bâtiments de France a émis, le 26 décembre 2007, un avis favorable ; que le nouveau titulaire de ces fonctions a néanmoins retiré cet avis et émis un avis défavorable le 7 février 2008 ; qu'après avoir refusé de le délivrer par arrêté du 21 février 2008, le maire de Granville a accordé le permis de démolir sollicité par arrêté du 22 mai 2008 ; que la COMMUNE DE GRANVILLE interjette appel de l'article 1er du jugement du 23 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Caen a, à la demande de M. et Mme X, M. Y, Mme Z et l'association Vie et Mémoires du Vieux Granville, annulé ce dernier arrêté ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, d'une part, que si l'expédition du jugement attaqué adressée à la COMMUNE DE GRANVILLE ne vise pas le mémoire en défense présenté par celle-ci, la minute de ce jugement, dont il ne tient qu'à elle d'en obtenir copie, a été établie conformément aux dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;

Considérant, d'autre part, que, dans leur mémoire enregistré le 2 décembre 2008 au greffe du Tribunal administratif de Caen, M. et Mme X et autres ont critiqué le motif retenu par l'architecte des Bâtiments de France pour délivrer son avis favorable du 26 décembre 2007 en indiquant qu'il s'était à tort fondé sur la reconversion potentielle de la construction concernée alors qu'il aurait dû apprécier l'impact de la démolition de celle-ci sur les bâtiments classés ou inscrits dans le périmètre de protection desquels elle se trouve ; que le jugement attaqué, qui prononce l'annulation de l'arrêté contesté du 22 mai 2008 en accueillant ce moyen tel qu'il vient d'être énoncé, n'est donc pas fondé sur un moyen relevé d'office ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative n'ont pas été observées doit être écarté ;

Sur la légalité de l'arrêté du 22 mai 2008 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 621-31 du code du patrimoine : Lorsqu'un immeuble est situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé au titre des monuments historiques ou inscrit, il ne peut faire l'objet, tant de la part des propriétaires privés que des collectivités et établissements publics, d'aucune construction nouvelle, d'aucune démolition, d'aucun déboisement, d'aucune transformation ou modification de nature à en affecter l'aspect, sans une autorisation préalable (...) Si l'immeuble n'est pas classé, le permis de construire, le permis de démolir, le permis d'aménager ou l'absence d'opposition à déclaration préalable tient lieu de l'autorisation si l'architecte des Bâtiments de France a donné son accord (...) En cas de désaccord soit du maire ou de l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis de construire, le permis d'aménager ou le permis de démolir ou ne pas s'opposer à la déclaration préalable, soit du pétitionnaire avec l'avis émis par l'architecte des Bâtiments de France, le représentant de l'Etat dans la région émet, après consultation de la section de la commission régionale du patrimoine et des sites, un avis qui se substitue à celui de l'architecte des Bâtiments de France. Le recours du pétitionnaire s'exerce à l'occasion du refus d'autorisation de travaux. Si le représentant de l'Etat infirme l'avis de l'architecte des Bâtiments de France, le maire ou l'autorité administrative compétente est fondé à délivrer le permis de construire, le permis de démolir ou le permis d'aménager initialement refusé ou ne pas s'opposer à la déclaration préalable. Les délais de saisine du préfet de région et ceux impartis à la section de la commission régionale du patrimoine et des sites, au préfet ou au maire, ou à l'autorité administrative compétente pour statuer sont fixés par décret en Conseil d'Etat. / Le ministre chargé de la culture peut évoquer tout dossier dont l'architecte des Bâtiments de France ou le représentant de l'Etat dans la région est saisi en application du présent article. L'autorisation ou le permis de construire ne peut dès lors être délivré qu'avec son accord ; qu'aux termes de l'article 1er de la même loi, codifié à l'article L. 621-2 du code du patrimoine : Est considéré (...) comme étant situé dans le champ de visibilité d'un immeuble classé ou proposé pour le classement tout autre immeuble nu ou bâti, visible du premier ou visible en même temps que lui et situé dans un périmètre n'excédant pas 500 mètres ; qu'aux termes de l'article R. 423-67 du code de l'urbanisme : (...) le délai à l'issue duquel l'architecte des Bâtiments de France est réputé avoir émis un avis favorable est de : / a) Deux mois lorsque la demande concerne la démolition d'une construction située (...) dans le champ de visibilité d'un monument historique défini à l'article L. 621-30-1 du code du patrimoine (...) ; qu'aux termes de l'article R. 425-1 du code de l'urbanisme : Lorsque le projet est situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit au titre des monuments historiques ou dans celui d'un parc ou d'un jardin classé ou inscrit ayant fait l'objet d'un périmètre de protection délimité dans les conditions fixées aux deuxième ou troisième alinéas de l'article L. 621-30-1 du code du patrimoine, le permis de construire, le permis d'aménager, le permis de démolir ou la décision prise sur la déclaration préalable tient lieu de l'autorisation prévue à l'article L. 621-31 du code du patrimoine dès lors que la décision a fait l'objet de l'accord de l'architecte des Bâtiments de France (...) ;

Considérant qu'il est constant que l'ensemble immobilier faisant l'objet de la demande de permis de démolir est situé à moins de 500 mètres de l'ancienne porte de ville, du casino et de l'enceinte de la haute ville, édifices classés ou inscrits au titre de la législation des monuments historiques ; que si l'architecte des Bâtiments de France a émis le 7 février 2008 un avis défavorable au projet de démolition, retirant son avis favorable du 26 décembre 2007, c'est à juste titre que le maire de Granville a estimé ne pas être pour autant tenu de rejeter la demande de permis de démolir dont il était saisi dès lors que l'architecte des Bâtiments de France s'était dessaisi de sa compétence consultative en émettant un avis explicite dans le délai de deux mois imparti par l'article R. 423-67 du code de l'urbanisme ; que, néanmoins, à supposer même que les immeubles à démolir soient visibles en même temps que les édifices protégés par la législation des monuments historiques, il résulte des mentions qui y figurent que l'avis favorable donné par l'architecte des Bâtiments de France le 26 décembre 2007 est exclusivement motivé par leur faible potentiel de reconversion ; que ce motif ne pouvait légalement fonder un tel avis, au regard des dispositions précitées de l'article L. 621-31 du code du patrimoine ; que, par suite, l'illégalité de cet avis, qui aurait lié le maire de Granville s'il avait été défavorable, entraîne celle de l'arrêté du 22 mai 2008 délivrant un permis de démolir à la SARL CEREP France ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE GRANVILLE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Caen a annulé l'arrêté du maire de Granville du 22 mai 2008 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme X et autres, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, la somme que la COMMUNE DE GRANVILLE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la COMMUNE DE GRANVILLE une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme X et autres et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE GRANVILLE est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE GRANVILLE versera à M. et Mme X et autres une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE GRANVILLE (Manche), à M. et Mme X, à M. Jack Y, à Mme Odette Z, à l'association Vie et Mémoires du Vieux Granville.

Une copie en sera, en outre, adressée à la SARL CEREP France.

''

''

''

''

2

N° 10NT00426

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 10NT00426
Date de la décision : 03/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MILLET
Rapporteur ?: M. Philippe D IZARN de VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : TIRARD-ROUXEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2011-06-03;10nt00426 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award