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02/06/2005 | FRANCE | N°01PA01386

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre - formation a, 02 juin 2005, 01PA01386


Vu le recours, enregistré le 19 avril 2001, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1 et 2 du jugement n° 9511662/1 du 14 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Paris a accordé à la société C.A.C.L décharge partielle des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1990 et 1992 ;

2°) de décider que les impositions supplémentaires dont la décharge a été à tort décidée par le tribunal seront remises à la

charge de la société C.A.C.L ;

..........................................................

Vu le recours, enregistré le 19 avril 2001, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1 et 2 du jugement n° 9511662/1 du 14 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Paris a accordé à la société C.A.C.L décharge partielle des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1990 et 1992 ;

2°) de décider que les impositions supplémentaires dont la décharge a été à tort décidée par le tribunal seront remises à la charge de la société C.A.C.L ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mai 2005 :

- le rapport de M. Vincelet, rapporteur,

- et les conclusions de M. Jardin, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à l'issue de la vérification de comptabilité de son activité de fabrication et de vente de vêtements, la société à responsabilité limitée C.A.C.L. a été assujettie à des compléments d'impôt sur les sociétés au titre des exercices 1990 à 1992, en conséquence, d'une part de la réintégration dans ses résultats imposables desdits exercices de frais de dépôt de marque, d'autre part, de l'inclusion, parmi les charges servant à la détermination de la production en cours, de frais de collection ; que, par le présent recours, le MINISTRE de l'ÉCONOMIE, des FINANCES et de l'INDUSTRIE demande l'annulation des articles 1 et 2 du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a, le 14 décembre 2000, partiellement fait droit à la demande de la contribuable en la déchargeant des cotisations supplémentaires résultant de la remise en cause des frais de collection ; que, par voie d'appel incident, l'intimée demande l'annulation du jugement en tant qu'il a rejeté sa demande de décharge des impositions issues de la réintégration des frais de dépôt de marque ;

S'agissant de l'acquiescement aux faits invoqués :

Considérant que l'absence de production, par le MINISTRE auteur du recours, de tout nouveau mémoire durant une période supérieure à trois ans, ne vaut pas acquiescement aux faits énoncés dans les mémoires en défense de l'intimée ;

Sur le recours principal du MINISTRE et sans qu'il y ait lieu d'examiner la fin de non recevoir partielle opposée pour l'année 1991, non concernée en l'espèce :

Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209-1 du même code : 1 Le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises...2 Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ...L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers ...3 Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient ; qu'aux termes de l'article 38 ter de l'annexe III audit code : Le stock est constitué par l'ensemble des marchandises, des matières premières...et fournitures consommables, des productions en cours, des produits intermédiaires, des produits finis, des produits résiduels et des emballages non destinés à être récupérés, qui sont la propriété de l'entreprise ...et dont la vente...permet la réalisation du bénéfice de l'exploitation ; Les productions en cours sont les biens ou les services en cours de formation au travers d'un processus de production... ; qu'enfin, l'article 38 nonies de la même annexe dispose que : Les marchandises, matières premières, ...produits en stock et productions en cours au jour de l'inventaire sont évalués pour leur coût de revient. Le coût de revient est constitué :....pour...les productions en cours, par le coût d'achat des matières premières et fournitures consommées, augmentées de toutes les charges directes et indirectes de production à l'exclusion des frais financiers... ;

Considérant que la société C.A.C.L. assure, par ses ateliers de création ainsi que par le recours aux services de stylistes extérieurs, la conception de collections de vêtements masculins qu'elle fabrique et vend ensuite personnellement sous la marque Gentleman Farmer ; que, dans ces conditions, la conception et la réalisation des modèles doivent être regardés comme entrant dans le processus de production des vêtements assurée par elle et que les frais auxquels elles ont donné lieu constituent des éléments du prix de revient des stocks et travaux en cours ; que, dès lors, les dépenses exposées par la contribuable à titre de frais de collection , lesquelles incluent les charges de personnel des ateliers de création, les honoraires et salaires versés aux stylistes, les dépenses d'acquisition de matière première ainsi que les frais de présentation de collection, constituent des charges de production servant à déterminer le coût de revient des stocks et doivent, à ce titre, être inscrites pour leur montant à l'actif des bilans concernés ; que le fait que de telles dépenses soient également déductibles des résultats imposables des exercices de leur engagement nonobstant la perception ultérieure des produits correspondants dès lors qu'elles ont donné lieu au cours des mêmes exercices à prestations de services en contrepartie est sans incidence, les redressements en cause procédant de la seule valorisation de l'actif à concurrence de leur montant ; que, par suite, en se fondant, pour prononcer la décharge des impositions susmentionnées, sur la seule circonstance que les dépenses de collection exposées par la société constituaient des charges normales immédiatement déductibles des résultats des exercices concernés, alors que l'administration soutenait à juste titre que lesdites dépenses constituaient simultanément des charges de production inscriptibles à l'actif des mêmes exercices, le Tribunal administratif de Paris a commis une erreur de droit ; qu'il y a lieu pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par la société C.A.C.L. à l'appui de sa demande au tribunal, augmentés de ses écritures d'appel ;

Considérant, en premier lieu, que la requérante ne peut utilement se prévaloir, au soutien de sa contestation du redressement afférent à l'exercice 1990, des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts issues de la loi du 30 décembre 1991 qui rendent, sous certaines conditions, éligibles au crédit d'impôt recherche, les dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections exposées par les entreprises industrielles du secteur textile-habillement-cuir ; que le bénéfice du crédit d'impôt, s'agissant des dépenses de cette nature, demeure subordonné à la condition que celles-ci soient exposées en vue d'opérations de recherche ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les dépenses litigieuses aient eu cet objet ; que, par suite, et en tout état de cause, la requérante ne peut davantage se prévaloir de ces dispositions à l'appui de sa contestation du redressement afférent à l'exercice 1992 ;

Considérant, en deuxième lieu, que la réponse aux observations du contribuable du 29 juillet 1994 prenait en considération les remarques antérieures de la société concernant notamment le redressement afférent à l'exercice 1990 ; que la réponse apportée était suffisamment motivée et satisfaisait aux prescriptions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment des contrats de travail des salariés concernés, que M. X et Mlle Y ont été engagés par la société requérante en qualités respectives de modéliste et d'assistante-styliste ; que, si la société soutient que seule une partie des rémunérations versées aux intéressés devait être incluse dans l'assiette des redressements dès lors que ceux-ci occupaient également en son sein d'autres fonctions, elle ne combat pas utilement la présomption d'exercice exclusif de l'activité qui s'attache aux mentions des contrats, en se bornant d'une part à faire état, sans l'établir, de ce que M. X effectuerait des déplacements à l'étranger dans le cadre du suivi du processus de production, d'autre part à produire une attestation de son expert-comptable mentionnant que Mlle Y ne consacrait qu'un quart de son temps de travail à ses prestations de stylisme ; qu'ainsi, la demande de la société C.A.C.L. au tribunal administratif de Paris n'est pas fondée et doit être rejetée ;

Sur l'appel incident de la société C.A.C.L. :

Considérant qu'au soutien de son appel incident à l'encontre du jugement en ce qu'il a rejeté sa demande de décharge des impositions supplémentaires issues de la réintégration des frais de dépôt de marque, la requérante reprend la même argumentation que celle précédemment développée devant les premiers juges ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris par adoption des motifs qui en constituent le support ; que, si dans le dernier état de ses conclusions, la société revendique le bénéfice de diverses instructions administratives, respectivement référencées sous les numéros 4 D 1321 , et 4 C 2113 , lesdites instructions ne sont pas de nature à remettre en cause le principe de non déductibilité, à titre de charges normales des exercices, des frais de dépôt et d'enregistrement de la marque Gentlemen Farmer , en tant que ces frais concourent à valoriser l'actif immobilisé de l'entreprise ; que la réponse ministérielle à M. Z, en date du 19 mai 1979, qui concerne les compléments de droit d'enregistrement susceptibles d'être réclamés à l'acquéreur d'un fonds de commerce, est étrangère au présent litige ; que le recours incident de la société doit être également rejeté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE de l'ÉCONOMIE, des FINANCES et de l'INDUSTRIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a déchargé la société C.A.C.L. des compléments d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre des exercices 1990 et 1992 en conséquence de l'incorporation des frais de collection au coût de revient des travaux en cours de ces exercices ; que la société C.A.C.L. n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le même jugement, le tribunal a rejeté sa demande de décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie en conséquence de la remise en cause des frais de dépôt de marque ;

Considérant, enfin, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante en l'espèce, soit condamné à payer à la requérante la somme de 10 000 euros qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Les articles 1 et 2 du jugement du Tribunal administratif de Paris n° 9511662/1 du 14 décembre 2000 sont annulés.

Article 2 : Les cotisations d'impôt sur les sociétés assignées à la société C.A.C.L. au titre des exercices 1990 et 1992 en conséquence de l'inclusion des dépenses de collection dans le coût de la production en cours sont remises à sa charge.

Article 3 : Le recours incident de la société C.A.C.L. est rejeté.

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N° 01PA01386

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N° 01PA01386


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 01PA01386
Date de la décision : 02/06/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pré SICHLER-GHESTIN
Rapporteur ?: M. Alain VINCELET
Rapporteur public ?: M. JARDIN
Avocat(s) : LE BOULC'H

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-06-02;01pa01386 ?
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