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11/07/2006 | FRANCE | N°04PA01013

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre - formation a, 11 juillet 2006, 04PA01013


Vu le recours, enregistré le 19 mars 2004, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9717291/1 du 19 novembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Paris a déchargé la société Y... France des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1991 et 1992 ;

2°) de remettre à la charge de la société Y... France les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés établies au titre des années 1991 et 1992 et dont le t

ribunal a à tort accordé la décharge ;

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Vu ...

Vu le recours, enregistré le 19 mars 2004, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9717291/1 du 19 novembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Paris a déchargé la société Y... France des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1991 et 1992 ;

2°) de remettre à la charge de la société Y... France les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés établies au titre des années 1991 et 1992 et dont le tribunal a à tort accordé la décharge ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 juin 2006 :

- le rapport de M. Vincelet, rapporteur,

- les observations de Me X..., pour la société Y... France,

- et les conclusions de M. Jardin, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE relève appel du jugement en date du 19 novembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Paris a déchargé la société Y... France des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1991 et 1992 ;

Sur la recevabilité du recours du ministre :

Considérant que le recours présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE expose les moyens de fait et de droit pour lesquels il estime que le jugement attaqué encourt l'annulation ; que la circonstance que lesdits moyens soient identiques aux motifs pour lesquels le directeur des services fiscaux concluait au rejet de la demande de la société requérante devant le tribunal administratif n'est pas de nature à entacher d'irrecevabilité le présent recours ;

Au fond :

S'agissant du recours du ministre :

Considérant qu'aux termes de l'article 38-2 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : « Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et l'ouverture de la période … L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés… » ;

Considérant que la société Y..., devenue Y... France, qui a pour activité la construction et l'exploitation de parcs et garages de stationnement, avait notamment conclu avec les municipalités de Dijon et Nice des conventions d'exploitation relatives aux parcs « Grangier » et « Massena », en vertu desquelles elle devait assumer le coût de la construction et de l'entretien des ouvrages ; qu'à l'initiative des communes, ces concessions, conclues pour trente ans, étaient susceptibles d'être prorogées de quinze ans et que dans l'hypothèse inverse, les concédantes, à qui faisaient retour les ouvrages en fin de contrat, s'engageaient à indemniser leur cocontractante du tiers de leur valeur ; qu'à l'occasion de la vérification de comptabilité de la société Y... France, le vérificateur a remis en cause les amortissements financiers dits de caducité, pratiqués par la contribuable à l'effet de reconstituer son capital investi et qu'elle avait limités aux deux tiers du prix de revient des ouvrages ; qu'il a réintégré dans ses résultats imposables des années 1991 et 1992 l'amortissement annuel en résultant, calculé sur la durée de la concession et égal à un quarante-cinquième du prix ; que les redressements contestés procèdent de cette réintégration ;

Considérant qu'une entreprise concessionnaire qui est dans l'obligation de détruire ou abandonner sans indemnité ses équipements ou installations à la collectivité concédante à l'expiration de la durée de la concession peut amortir ces immobilisations en fonction de cette dernière durée par des amortissements dits de caducité ; qu'eu égard toutefois à l'incertitude que les conventions en vigueur laissaient subsister sur le sort, même partiel, des installations de la société à l'issue de la concession, l'intéressée ne pouvait être regardée comme tenue d'abandonner ces dernières ; qu'elle ne pouvait donc pratiquer à leur égard des amortissements de caducité ; qu'ainsi en se fondant, pour prononcer la décharge des impositions contestées, sur la circonstance que la requérante ne pouvait bénéficier d'aucune indemnisation à concurrence des deux tiers du coût des ouvrages et qu'elle avait limité les amortissements à hauteur de cette proportion, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; qu'il y a lieu pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens présentés par l'intimée à l'appui de sa demande au tribunal, augmentés de ses écritures d'appel ;

Sur la demande de la société Y... France au tribunal administratif :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 D du code général des impôts : « L'amortissement des constructions et aménagements édifiés sur le sol d'autrui doit être réparti sur la durée normale d'utilisation de chaque élément… » ;

Considérant que la circonstance que la requérante ne peut, pour le motif susindiqué, amortir financièrement une fraction du coût de ses installations sur la durée totale de la concession, ne fait pas par elle même obstacle, même en l'absence de renouvellement de ces installations, à ce qu'elle soit autorisée à pratiquer, sur ces dernières, inscrites à son bilan, un amortissement technique destiné à compenser leur dépréciation et qui doit dès lors être calculé sur leur seule durée d'utilisation ; que toutefois la contribuable, à qui il appartient dans ce cas de préciser cette durée, ne donne aucune indication sur la date à laquelle elle estime que ses infrastructures deviendront obsolètes ; qu'elle ne soutient pas davantage que celles-ci ne pourront plus être utilisées après l'expiration des contrats ; qu'elle ne peut, par suite, bénéficier davantage de l'amortissement en raison de l'usure de ses immobilisations, ni, en tout état de cause et pour un motif identique, être autorisée à amortir ses droits incorporels sur les constructions ;

Considérant, enfin, que l'instruction de la direction générale des impôts, référencée sous le numéro « 4 D 264 », relative à l'amortissement des constructions sur le sol d'autrui, et dont est susceptible de bénéficier l'ensemble des titulaires de bénéfices industriels et commerciaux, commente l'article 39 D du code général des impôts en rappelant, dans chacun des cas qu'elle évoque, l'obligation pour le contribuable d'amortir ses installations sur la durée de leur utilisation ; qu'elle ne dispense pas le contribuable d'établir ladite durée ; qu'elle-même est complétée par une instruction n° «4 D 265», laquelle concerne spécifiquement les amortissements financiers dits de caducité pratiqués par les entreprises concessionnaires ; que, dès lors l'article 8 de la première instruction, qui déclare supprimer les distinctions jurisprudentielles antérieures fondées sur les clauses de retour des biens aux propriétaires du sol, ne concerne pas les amortissements financiers et ne peut permettre par suite à la contribuable de pratiquer, contrairement à la loi fiscale, un amortissement financier partiel sur les installations litigieuses ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que le Ministre appelant est fondé à obtenir, outre l'annulation du jugement attaqué, la remise à la charge de la société Y... France des impositions complémentaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1991 et 1992, qui ont été à tort déchargées par le tribunal ; que la demande de l'intimée au tribunal administratif, et, par voie de conséquence, ses conclusions devant la cour tendant au remboursement de ses frais, doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 9717291/1 du 19 novembre 2003 est annulé.

Article 2 : Les compléments d'impôt sur les sociétés mis à la charge de la société Y... France au titre des années 1991 et 1992 sont remis à sa charge.

Article 3 : La demande de la société Y... France au Tribunal administratif de Paris et sa demande reconventionnelle devant la cour sont rejetées.

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N° 04PA01013


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 04PA01013
Date de la décision : 11/07/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pré SICHLER-GHESTIN
Rapporteur ?: M. Alain VINCELET
Rapporteur public ?: M. JARDIN
Avocat(s) : SCPA BONTRON-FILLON

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-07-11;04pa01013 ?
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