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23/01/2015 | FRANCE | N°14PA01890

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 23 janvier 2015, 14PA01890


Vu la requête, enregistrée le 28 avril 2014, présentée pour Mme C...B..., demeurant..., par Me Duché ; Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1316208 du 28 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du

14 octobre 2013 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté

;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire ...

Vu la requête, enregistrée le 28 avril 2014, présentée pour Mme C...B..., demeurant..., par Me Duché ; Mme B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1316208 du 28 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du

14 octobre 2013 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de renvoi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire valant autorisation de travail dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Duché, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du

10 juillet 1991 ;

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce que le tribunal a dénaturé les pièces du dossier relatives à sa situation médicale ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour qu'elle accompagne ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions des articles L. 511-4 et L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et d'obligation de quitter le territoire ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu les pièces dont il résulte que la requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense ;

Vu la décision en date du 17 juillet 2014 du bureau d'aide juridictionnelle du Tribunal de grande instance de Paris accordant l'aide juridictionnelle totale à Mme C...B... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2015 le rapport de M. Cheylan, premier conseiller ;

1. Considérant que MmeB..., ressortissante camerounaise née le

11 septembre 1958, est entrée en France le 9 juin 2009 selon ses déclarations ; qu'elle a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté en date du

14 octobre 2013, le préfet de police a opposé un refus à sa demande et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois en fixant son pays de renvoi ; que Mme B...relève appel du jugement du 28 mars 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, contrairement à ce que soutient la requérante, une éventuelle dénaturation des pièces du dossier relatives à sa situation médicale affecte le bien-fondé d'une décision juridictionnelle et non sa régularité ;

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...souffre d'un syndrome d'apnée du sommeil sévère et d'hypertension artérielle ; que le certificat en date du 11 mars 2013 établi par le DrA..., praticien hospitalier, indique que le traitement consiste en une ventilation en pression positive continue que la patiente doit porter chaque nuit et que le défaut de soins exposerait Mme B...à des troubles majeurs de la vigilance, à des pathologies cardiovasculaires à type d'hypertension artérielle, à des accidents vasculaires cérébraux ou infarctus du myocarde ; que si le médecin, chef du service médical de la préfecture de police, a estimé le 27 juin 2013 que l'intéressée pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, il ressort de l'attestation établie le

25 novembre 2013 par la société Vitalaire, qui fournit l'appareil de ventilation, que l'entretien et le suivi de l'appareil respiratoire de Mme B...ne pourra pas être assuré au Cameroun ; que cette même attestation précise qu'une visite du technicien tous les six mois au domicile de la patiente est nécessaire afin de vérifier la bonne utilisation selon la prescription et renouveler le masque ; que le préfet de police, qui n'a pas défendu dans la présente instance, n'a produit devant le Tribunal administratif de Paris aucun document susceptible de contredire cette attestation ; que, par suite, en rejetant la demande de titre de séjour de Mme B...en qualité d'étranger malade, le préfet de police a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité délivre à Mme B...le titre de séjour sollicité ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de police de délivrer ce titre dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

7. Considérant que Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Duché, avocat de MmeB..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Duché de la somme de 1 000 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1316208 du 28 mars 2014 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté en date du 14 octobre 2013 par lequel le préfet de police a rejeté la demande de titre de séjour présentée par Mme B...et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de renvoi, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme B...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Duché, avocat de MmeB..., une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Duché renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Driencourt, président de chambre,

- Mme Mosser, président assesseur,

- M. Cheylan, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 23 janvier 2015.

Le rapporteur,

F. CHEYLANLe président,

L. DRIENCOURT Le greffier,

J. BOUCLY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA01890


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA01890
Date de la décision : 23/01/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: M. Frédéric CHEYLAN
Rapporteur public ?: M. BOISSY
Avocat(s) : DUCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-01-23;14pa01890 ?
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