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19/03/2015 | FRANCE | N°14PA02394

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 19 mars 2015, 14PA02394


Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2014, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Bodin, avocat ; M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1308281,1308818 du 23 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, du 11 février 2013, refusant de lui délivrer une autorisation de travail, d'autre part, de l'arrêté du préfet de police du 5 avril 2013 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant

obligation de quitter le territoire français, dans un délai de trente jou...

Vu la requête, enregistrée le 13 mai 2014, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Bodin, avocat ; M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1308281,1308818 du 23 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, du 11 février 2013, refusant de lui délivrer une autorisation de travail, d'autre part, de l'arrêté du préfet de police du 5 avril 2013 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, en fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

Il soutient que :

- les décisions contestées portant refus d'autorisation de travail du 11 février 2013 et refus de délivrance d'un titre de séjour du 5 avril 2013 sont insuffisamment motivées ;

- pour refuser de lui délivrer l'autorisation de travail sollicitée, le préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, ne peut lui opposer la méconnaissance des dispositions de l'article L. 8251-1 du code du travail ;

- le préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que le métier de pizzaiolo ne pouvait être reconnu en tension en Ile-de-France ;

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision méconnait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français et celle fixant le pays de destination sont dépourvues de base légale ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 février 2015, présenté pour M. B..., qui conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Vu les pièces dont il résulte que la requête a été communiquée au préfet de police et au préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, qui n'ont pas présenté de mémoire en défense ;

Vu la décision du 20 février 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris a admis M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mars 2015 :

- le rapport de Mme Versol, premier conseiller,

- et les observations de Me Geissman avocat de M. B... ;

1. Considérant que M. B..., ressortissant malgache, relève appel du jugement du 23 octobre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, du 11 février 2013, refusant de lui délivrer une autorisation de travail, d'autre part, de l'arrêté du préfet de police du 5 avril 2013 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, en fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du 11 février 2013 portant refus d'autorisation de travail :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée, vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le code du travail, notamment son article R. 5221-20, indique que M. B..., en activité chez son employeur sans aucun titre lui permettant d'y exercer une activité salariée, exerce une profession de pizzaïolo qui ne fait pas partie de la liste des métiers reconnus en tension pour lesquels la situation de l'emploi n'est pas opposable aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat membre de l'Espace européen ou de la Confédération helvétique ; que, dans ces conditions, la décision contestée qui énonce les considérations de droit et de fait qui la fondent, doit être regardée comme suffisamment motivée ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté comme manquant en fait ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. / Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail, reprenant les dispositions de l'ancien article L. 341-2 du même code : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / (...) 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. " ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 18 janvier 2008 susvisé : " La situation de l'emploi ou l'absence de recherche préalable de candidats déjà présents sur le marché du travail n'est pas opposable à une demande d'autorisation de travail présentée pour un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, (...) souhaitant exercer une activité professionnelle dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur la liste annexée au présent arrêté. " ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 8251-1 du même code : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'employeur de M. B..., titulaire d'une carte de séjour en qualité de visiteur valable jusqu'au 6 août 2011, s'est vu refuser par décision du préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France, du 11 février 2013, l'autorisation de travail qu'il sollicitait pour employer M. B...en qualité de pizzaïolo ; que la demande d'autorisation ayant été déposée par cet employeur le 23 janvier 2013 alors que M. B... occupait ce poste depuis le 14 mars 2012, c'est à bon droit que le préfet de Paris a relevé qu'ont été méconnues les dispositions précitées de l'article L. 8251-1 du code du travail ; que si M. B...fait valoir que le préfet de Paris a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que le métier de pizzaïolo ne pouvait être reconnu en tension en Ile-de-France, il n'apporte toutefois aucune justification permettant d'établir que son employeur aurait rencontré des difficultés pour pourvoir le poste proposé, alors qu'il ressort des données statistiques établies par les services de Pôle Emploi sur la période d'un an que les demandes d'emploi en région Ile-de-France pour cette profession sont plus de deux fois supérieures aux offres proposées ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du 5 avril 2013 portant refus de titre de séjour :

5. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée du 5 avril 2013 portant refus de titre de séjour, vise l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment son article L. 511-1, précise que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, chargé de l'instruction de sa demande, a refusé par décision du 11 février 2013 d'accorder pour M. B... une autorisation de travail en application de l'article R. 5221-1 du code du travail et que l'intéressé ne remplit pas les conditions du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision contestée mentionne également que M. B... ne justifie ni de considérations humanitaires ni de motifs exceptionnels lui permettant de bénéficier d'une admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'est pas démuni d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident son épouse et ses cinq enfants ; que, par suite, la décision contestée qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, doit être regardée comme suffisamment motivée ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si le demandeur peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux ; que M. B...ne peut utilement soutenir que le préfet de police a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait sollicité un examen de sa situation sur le fondement de ces dispositions ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

8. Considérant que si M. B...fait valoir que résident en France trois de ses enfants, il ne justifie ni vivre aux côtés de ses derniers ni subvenir à leurs besoins ; qu'il n'établit pas davantage l'existence d'une communauté de vie avec la mère de son dernier enfant né en France en 2011 ; qu'il ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses autres enfants ainsi que son épouse ; que, dans ses conditions, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

10. Considérant que M. B... fait valoir qu'il réside habituellement en France depuis 2002, que trois de ses enfants, dont sa fille née en France en 2011, résident sur le territoire français et qu'il est parfaitement bien inséré ; que, cependant, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, qui a bénéficié, entre octobre 2002 et avril 2008, d'un visa de service en qualité de personnel d'ambassade, ne justifie ni de circonstance humanitaire, ni de motif exceptionnel d'admission au séjour au sens des dispositions précitées ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;

11. Considérant, en dernier lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 8 et 10 ci-dessus, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de séjour serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur les conclusions dirigées contre les décisions du 5 avril 2013 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

12. Considérant que les moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par M. B... à l'appui de ses conclusions dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ne peuvent qu'être écartée par voie de conséquence ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police et au préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France

Délibéré après l'audience du 5 mars 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Dalle, président,

- Mme Notarianni, premier conseiller,

- Mme Versol, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 19 mars 2015.

Le rapporteur,

F. VERSOL Le président,

D. DALLE

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA02394


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA02394
Date de la décision : 19/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. DALLE
Rapporteur ?: Mme Françoise VERSOL
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : LAFARGE ASSOCIES SELARL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-03-19;14pa02394 ?
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