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10/07/2015 | FRANCE | N°13PA04305

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 10 juillet 2015, 13PA04305


Vu la requête, enregistrée le 26 novembre 2013, présentée pour la Polynésie française, dont le siège est BP 2551 à Papeete (98713), par la Selarl Groupavocats ;

La Polynésie française demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1300041 du 24 septembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Polynésie Française a déchargé la société TGR développement des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et de contribution complémentaire à l'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'année 2008 ;

2°) de remettre à

la charge de la société TGR développement les rappels d'impôt sur les sociétés et de contribution ...

Vu la requête, enregistrée le 26 novembre 2013, présentée pour la Polynésie française, dont le siège est BP 2551 à Papeete (98713), par la Selarl Groupavocats ;

La Polynésie française demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1300041 du 24 septembre 2013 par lequel le Tribunal administratif de Polynésie Française a déchargé la société TGR développement des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et de contribution complémentaire à l'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'année 2008 ;

2°) de remettre à la charge de la société TGR développement les rappels d'impôt sur les sociétés et de contribution supplémentaire à l'impôt sur les sociétés ainsi que les pénalités y afférentes, résultant des avis de mise en recouvrement n° 1466 et 1472 du 9 février 2012, auxquels la société a été assujettie pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008 ;

3°) de mettre à la charge de la société TGR développement une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le délai de trois mois imparti pour procéder à une vérification de comptabilité par l'article 412-5 du code des impôts ne lui est pas opposable ; pour l'année 2009 aucune imposition n'a été mise en recouvrement ; l'année 2008 dépasse le seuil de chiffre d'affaires prévu par l'article 412-5 du code des impôts ; le service a dû mettre en oeuvre des moyens d'investigations très importants ;

- les rectifications sont fondées ; il y a lieu à la réintégration dans la base imposable de l'année 2008 des produits financiers qui n'avaient pas été comptabilisés d'une part dans la détermination des exercices 2006, 2007, ce qui avait entraîné une sous-estimation de l'actif net de la société pour l'année 2008 et d'autre part dans la détermination de l'année 2008 ; la déductibilité d'une provision pour risques et charges ne peut être admise en son principe et au titre de l'année de rattachement ; ne peuvent être déduites de l'année 2008, des charges qui avaient été engagées au titre des années 2005, 2006, 2007, les charges ne pouvant être déduites que de l'année au cours de laquelle elles ont été engagées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure adressée le 9 avril 2014 à la Société TGR développement, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2014, présenté pour la Société TGR développement qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la Polynésie française à lui verser la somme de 30 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable en ce qu'elle ne respecte pas les dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative dès lors que la requête ne comporte pas les moyens nécessaires à la critique du jugement ;

- la durée maximale de vérification de comptabilité de trois mois prévue par l'article 412-5 du code des impôts n'a pas été respectée ; le droit fiscal retient une conception restrictive du chiffres d'affaires ; le droit fiscal polynésien diffère du droit métropolitain ; le chiffre d'affaires de l'exercice 2009 étant inférieur à 20 000 000 F CFP, l'un au moins des exercices vérifiés a un chiffre d'affaires inférieur au seuil prévu par l'article 412-5 du code des impôts, ce qui a pour conséquence la nullité du redressement en raison du dépassement du délai de trois mois ;

- l'avis de vérification ne lui a pas été régulièrement notifié ;

- le délai de quinze jours prévu par l'article 412-1 du code des impôts entre la date de l'envoi de l'avis de vérification du 19 novembre 2010 et le jour de la première date de présentation le

10 décembre 2010 n'a pas été respecté dès lors qu'il s'agit d'un délai franc et que les samedis, dimanches et jours fériés doivent être exclus du décompte ;

- les années 2008 et 2009 sont prescrites en application de l'article LP 451-3 du code des impôts dès lors qu'aucune notification de redressement ne lui a été faite dans des conditions susceptibles d'interrompre le délai de prescription ;

- l'inspecteur qui a procédé aux opérations de contrôle n'avait pas la compétence territoriale ;

- les rectifications ne sont pas fondées ; la société n'a pas fraudé relativement aux produits financiers ; il y aurait double imposition relativement aux provisions pour risque et charge ; l'indemnité de résiliation du contrat était due au moment de l'établissement du bilan de l'année 2008 ; il est admis que, tant sur le plan comptable que fiscal, que certaines charges, dont les frais d'acquisition d'une immobilisation, puissent être inscrites en charge à répartir et faire l'objet d'un étalement sur plusieurs exercices et les charges engagées sur les exercices 2005 à 2008 ont fait l'objet d'une dotation au compte de charge à répartir et ont été engagées en vue de l'acquisition d'un élément d'actif immobilisé ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 janvier 2015, présenté pour la Polynésie française qui conclut aux mêmes fins que sa requête et par les mêmes moyens ; elle soutient en outre que :

- la double imposition ne pourrait éventuellement être invoquée qu'au titre de l'exercice

2010 ;

- le vérificateur disposait bien d'une compétence territoriale, les agents de la DICP pouvant contrôler l'impôt sans être habilités préalablement par le président de la Polynésie française ou son délégué et l'opposabilité des actes individuels n'est subordonnée qu'à la notification de la décision à l'intéressé et non à sa publication ou affichage ;

- la société a disposé d'un délai raisonnable entre la date d'envoi de l'avis de vérification et le début de la vérification de comptabilité ;

- l'avis de vérification a été régulièrement envoyé ;

Vu, enregistré le 2 juin 2015, reçu par mail, le mémoire présenté pour la société TGR développement ;

Vu, enregistré le 20 juin 2015, le mémoire présenté pour la Polynésie française qui conclut aux mêmes fins que la requête et par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 juin 2015 :

- le rapport de Mme Mosser, président assesseur,

- les conclusions de M. Boissy, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour la société TGR Développement ;

1. Considérant que la société TGR développement, qui a pour activité l'ingénierie financière et la promotion immobilière, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité du 10 décembre 2010 au 24 mars 2011, sur la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009, qui a abouti à des rehaussements pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2008 pour un montant total de 389 823 217 F CFP ; que la Polynésie française relève appel du jugement en date du

24 septembre 2013 par lequel le tribunal de la Polynésie française a accordé à la société TGR développement la décharge des impositions mises à sa charge au titre de l'année 2008 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 412-5 du code des impôts : " Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne les entreprises ou contribuables, quelle que soit la nature de l'activité exercée, dont le chiffre d'affaires hors taxe d'un des exercices vérifié ne dépasse pas : /quarante millions de francs CFP s'il s'agit d'entreprises ou contribuables dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fournir le logement ; /vingt millions de francs CFP s'agissant d'autres types d'activités. (...) /La vérification est considérée comme achevée à la date de la dernière intervention sur place du vérificateur. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que si le chiffre d'affaires de l'un des exercices ayant fait l'objet d'une vérification de comptabilité ne dépasse pas le seuil prévu par le texte, le délai de la vérification de comptabilité ne peut s'étendre sur une période supérieure à trois mois, sous peine de nullité de l'imposition ;

3. Considérant qu'il est constant que la vérification de comptabilité de la société

TGR développement sur la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009 s'est déroulée du

10 décembre 2010 au 24 mars 2011, dernier jour d'intervention sur place du vérificateur, soit sur plus de trois mois ; qu'il est également constant que le chiffre d'affaires de l'année 2009 est inférieur à la somme de 20 000 000 F CFP ; que la Polynésie française ne peut pas utilement invoquer la circonstance que pour l'année 2009 aucune imposition n'a été mise en recouvrement, cette circonstance étant sans incidence sur l'application de l'article 412-5 cité au point 2 ; que la Polynésie française ne peut pas non plus utilement invoquer la circonstance que le service a dû mettre en oeuvre des moyens d'investigation très importants, laquelle est également sans incidence sur l'application de l'article 412-5 précité ; qu'elle ne peut pas non plus encore utilement se prévaloir de la circonstance que le chiffre d'affaires rectifié de l'année 2008 excède le seuil prévu par le texte, dès lors que le montant du chiffre d'affaires de l'année 2009 qui est l'une des années vérifiées, est inférieur au seuil ; que, par suite, il résulte du point 2, qu'en application des dispositions de l'article 412-5 du code des impôts précité, le dépassement du délai de trois mois de la vérification de comptabilité de la société TGR développement a entaché de nullité l'imposition en litige ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, ni les autres moyens de la requête, que la Polynésie française n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Polynésie Française a accordé à la société TGR développement la décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre de l'année 2008 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société TGR développement qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la Polynésie française la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

6. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par la société TGR développement ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la Polynésie française est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société TGR développement sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Gouvernement de la Polynésie française et à la Société TGR développement.

Délibéré après l'audience du 26 juin 2015, où siégeaient :

Mme Driencourt, président de chambre,

Mme Mosser, président assesseur,

M. Cheylan, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 10 juillet 2015.

Le rapporteur,

G. MOSSERLe président,

L. DRIENCOURT

Le greffier,

F. DUBUY

La République mande et ordonne au Haut Commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13PA04305


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA04305
Date de la décision : 10/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: Mme Geneviève MOSSER
Rapporteur public ?: M. BOISSY
Avocat(s) : CHANSIN-WONG et USANG

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-07-10;13pa04305 ?
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