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30/09/2016 | FRANCE | N°15PA04875

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 30 septembre 2016, 15PA04875


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2015 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour.

Par un jugement n°1504040 du 28 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté attaqué, d'autre part, enjoint au préfet de police de délivrer à M. D... un titre de séjour portant la mention " profession libérale ou indépendante auto-entrepreneur " dans un délai de trois mois à co

mpter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 janvier 2015 par lequel le préfet de police lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour.

Par un jugement n°1504040 du 28 octobre 2015, le Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté attaqué, d'autre part, enjoint au préfet de police de délivrer à M. D... un titre de séjour portant la mention " profession libérale ou indépendante auto-entrepreneur " dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 décembre 2015 et le 2 mars 2016, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1504040 du 28 octobre 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. D... devant le Tribunal administratif de Paris.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal a annulé son arrêté au motif qu'il était entaché d'une erreur de fait et d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 8221-6 du code du travail ; en effet, le statut d'auto-entrepreneur dissimulerait une activité salariée ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2016, présenté pour M. D..., par MeC..., conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire l'annulation de l'arrêté du préfet de police en date du 20 janvier 2015, à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " profession libérale ou travailleur indépendant - auto-entrepreneur ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre très subsidiaire, à ce qu'il soit enjoint au préfet de réexaminer sa situation et, pendant le délai d'instruction, qu'il lui soit délivré une autorisation de travail dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour et à ce que le versement de la somme de 2 500 euros soit mis à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le moyen n'est pas fondé ;

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ; sa demande n'a pas fait l'objet d'un examen particulier ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure, faute pour le préfet de police de lui avoir demandé de produire les pièces manquantes pour l'instruction de son dossier ;

- il est entaché d'erreur de droit au regard des dispositions du 3° de l'article L. 313-10 et de l'article R. 313-17 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet de police a illégalement ajouté des conditions à celles fixées par ces dispositions ;

- il est également entaché d'erreur de droit en ce que le préfet de police a excédé sa compétence en requalifiant en relation salariée la relation le liant avec son principal client ;

- il est entaché de plusieurs erreurs de fait et d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions des articles L. 8221-6 et L. 8221-6-1 du code du travail, dès lors que le préfet de police a qualifié à tort de relation salariée la relation le liant avec son principal client ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mosser, président assesseur,

- et les observations de MeB..., substituant C...et Associés, avocat de

M. A...D... ;

1. Considérant que M.D..., ressortissant japonais né le 6 avril 1982, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour portant la mention " profession libérale ou indépendante auto-entrepreneur " en vue de l'exercice indépendant de la profession de styliste, valable jusqu'au 25 juillet 2014 ; que, par un arrêté en date du 20 janvier 2015, le préfet de police a opposé un refus à sa demande, au motif que le régime de l'auto-entreprise de M. D...dissimule une activité salariée déguisée ; que le préfet de police relève appel du jugement du 28 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 20 janvier 2015 et lui a enjoint de délivrer à M . D...un titre de séjour portant la mention " profession libérale ou indépendante auto-entrepreneur " ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée:/ (...) 3° A l'étranger qui vient exercer une activité professionnelle non soumise à l'autorisation prévue à l'article L. 341-2 du code du travail et qui justifie pouvoir vivre de ses seules ressources. / Elle porte la mention de l'activité que le titulaire entend exercer " ; que les dispositions de l'article L. 5221-5 du code du travail, qui ont repris celles de l'ancien article L. 341-2 du même code, soumettent à l'obtention préalable d'une autorisation de travail tout exercice d'une activité salariée en France par les étrangers autorisés à y séjourner ; que pour l'application du 3° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il appartient au préfet de police de vérifier que les critères définis par ces dispositions sont remplis, notamment l'exercice d'une activité non salariée ne nécessitant pas l'obtention d'une autorisation de travail ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 8221-6 du code du travail : " I. - Sont présumés ne pas être liés avec le donneur d'ordre par un contrat de travail dans l'exécution de l'activité donnant lieu à immatriculation ou inscription : / 1° Les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d'allocations familiales ; / (...) II. - L'existence d'un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque les personnes mentionnées au I fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d'ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard de celui-ci. " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, qu'en tant qu'auto-entrepreneur, M. D..., est immatriculé auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales ; qu'il appartient dès lors au préfet de police, en application des dispositions précitées, d'établir l'existence d'un lien de subordination juridique permanent à l'égard de son principal client, caractérisant l'existence d'une relation salariée ;

5. Considérant, que le préfet de police fait valoir qu'au moment où M. D...s'est déclaré auto-entrepreneur, il travaillait depuis un an pour la société Solid Corporation en qualité de stagiaire sur des fonctions très similaires à celles qu'il exerce dans le cadre de son activité, que les factures produites entre février 2013 et novembre 2014 révèlent qu'il a pour seul client la société Solid Corporation, que les factures produites postérieurement au profit de trois autres clients l'ont été suite au courriel qui lui a été adressé le 26 décembre 2014, qu'il bénéficie d'une rémunération mensuelle fixée d'office dès le début des relations avec la société Solid Corporation, qu'il n'établit pas travailler à son domicile et que la circonstance que M. D...chercherait vainement de nouveaux clients est sans incidence sur la légalité de l'arrêté en litige ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment des factures produites dont le règlement est justifié par la production des relevés de comptes de M. D...qu'il n'a pas eu, dans son activité, pour seul client la

société Solid Corporation ; que par ailleurs, ses revenus mensuels sont extrêmement variables ce qui ne permet pas de retenir qu'il percevrait un salaire mensuel alors même que la rémunération a été fixée préalablement sur une mission de " consulting " avec son principal client ; que la circonstance alléguée par le préfet de police tirée de ce que M. D...a effectué trois stages au sein de la Solid Corporation dans des fonctions similaires ne suffit pas à établir la poursuite d'un lien de subordination entre M. D...et la

société Solid Corporation ; que le préfet de police n'établit pas que le domicile de

M. D...ne constitue pas son lieu de travail ; qu'il résulte ainsi de l'ensemble de ces éléments que le préfet de police, sur lequel pèse la charge de la preuve, n'établit pas, notamment par le faisceau d'indices qu'il invoque, que M. D...n'exercerait pas une profession indépendante et qu'il aurait en réalité une activité de salarié déguisée ; que, par suite, le préfet de police ne pouvait pas se fonder sur ce motif pour opposer à M. D...un refus à sa demande de renouvellement de son titre de séjour portant la mention " profession libérale ou indépendante auto-entrepreneur " ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté en date du 20 janvier 2015 refusant à M. D...la délivrance d'un titre de séjour en lui enjoignant de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " profession libérale ou indépendante auto-entrepreneur " ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du préfet de police le versement de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. D... et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. D...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au préfet de police et à M. A... D....

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 16 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Driencourt, président de chambre,

- Mme Mosser, président assesseur,

- Mme Lescaut, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 30 septembre 2016.

Le rapporteur,

G. MOSSERLe président,

L. DRIENCOURT Le greffier,

A-L. PINTEAULa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA04875


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA04875
Date de la décision : 30/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : Mme DRIENCOURT
Rapporteur ?: Mme Geneviève MOSSER
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : NARBONI et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-09-30;15pa04875 ?
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