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06/04/2023 | FRANCE | N°22PA03051

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 06 avril 2023, 22PA03051


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 mars 2022 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

Par un jugement n°2208676/1-1 du 29 juin 2022 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 juill

et 2022, M. B..., représenté par Me Rajkumar, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°2208676...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 mars 2022 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

Par un jugement n°2208676/1-1 du 29 juin 2022 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 juillet 2022, M. B..., représenté par Me Rajkumar, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°2208676/1-1 du 29 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 mars 2022 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur le refus de titre de séjour :

- il est entaché d'un défaut de motivation et d'examen de sa situation personnelle ;

- il est entaché d'une erreur de fait relative à l'ancienneté de sa résidence en France ;

- il est entaché d'une erreur de droit, alors qu'il remplissait les conditions pour pouvoir bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour, compte tenu de l'ancienneté de son séjour ;

- il est entaché d'un vice de procédure à défaut de saisine de la commission du titre de séjour ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'un défaut de motivation, sa motivation se confondant avec celle du refus de titre de séjour, et d'examen de sa situation personnelle ;

- elle est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :

- elle est insuffisamment motivée ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et viole les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 janvier 2023, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant sri-lankais, né en 1976 et entré en France en novembre 2010 selon ses déclarations, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 29 mars 2022, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. B... a saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du

29 juin 2022, dont M. B... fait appel, ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus d'admission exceptionnelle au séjour :

2. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. (...) ".

3. En premier lieu, l'arrêté contesté comporte dans ses visas et ses motifs les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde et qui permettent de vérifier que l'administration préfectorale a procédé à un examen de la situation particulière de M. B... au regard des stipulations et des dispositions législatives et réglementaires applicables. En particulier, il mentionne que M. B... ne justifie pas que lui soit délivré un titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après avoir apprécié sa situation au regard de l'ancienneté de son séjour et d'éventuels considérations humanitaires ou motifs exceptionnels, ainsi que de son expérience et ses qualités professionnelles. Par suite, les moyens tirés du défaut de motivation du refus de séjour et du défaut d'examen de sa situation personnelle, doivent être écartés.

4. En deuxième lieu, si M. B... justifie au dossier de pièces établissant son séjour en France à compter du mois de décembre 2010, pour l'année 2013, il ne justifie d'une présence continue que jusqu'au mois d'août, le seul courrier produit de la Cour nationale du droit d'asile d'octobre 2013 n'étant pas suffisant pour établir sa présence sur le sol français de septembre à la fin de l'année. Pour l'année 2014, l'intéressé ne justifie pas de pièces établissant sa présence à compter du mois d'octobre et jusqu'à la fin de l'année. De même, pour l'année 2017, contrairement aux autres années, M. B... ne justifie que de quelques pièces, lesquelles concernent la période de janvier à juin, et s'il verse au dossier, un courrier de la Cour nationale du droit d'asile daté de juillet, ainsi que deux courriers de l'assurance maladie de septembre et octobre, ceux-ci ne sont pas suffisants pour établir sa présence effective à cette période. Pour l'année 2018, les pièces qu'il a versées, soit principalement une attestation de rechargement de sa carte Navigo, ne justifient de sa présence qu'à partir du mois de mars. M. B... ne justifie donc pas d'une présence continue sur le sol français sur une période de dix ans. Dès lors, contrairement à ce que soutient l'appelant, la commission du titre de séjour n'avait pas à être saisie sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En troisième lieu, dès lors qu'il ne justifiait pas d'une présence habituelle et continue de dix ans en France, le préfet de police a pu mentionner, sans erreur de fait, que M. B... n'était pas en mesure d'attester de façon probante d'une telle ancienneté de résidence en France. Il ne ressort pas des pièces du dossier, par ailleurs, que ce dernier ait porté à la connaissance du préfet de police, préalablement à la décision litigieuse, des éléments relatifs à sa situation personnelle susceptibles d'être qualifiés de circonstances humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la durée du séjour ne pouvant à elle seule, en tout état de cause, constituer un tel motif. Le préfet de police n'a donc pas méconnu les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en refusant son admission exceptionnelle au séjour.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen, invoqué à l'encontre de la décision distincte portant obligation de quitter le territoire, et tiré de l'illégalité du refus de titre de séjour, doit être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, (...) ", et aux termes de l'article L. 613-1 du même code : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Toutefois, les motifs des décisions relatives au délai de départ volontaire et à l'interdiction de retour édictées le cas échéant sont indiqués. ".

8. La décision portant refus de titre de séjour, que comporte l'arrêté contesté, qui contient les considérations de droit et les circonstances de fait sur lesquelles elle se fonde, est comme il a été exposé au point 3, suffisamment motivée. En application des dispositions de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire français, prise sur le fondement des dispositions du 3° de l'article L. 611-1, n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision de refus de titre de séjour. Le moyen tiré d'un défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire doit donc être écarté. Il ne ressort pas des pièces du dossier, par ailleurs, et comme il a déjà été dit, que le préfet de police n'aurait pas examiné la situation personnelle de M. B....

9. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

10. Il est constant que M. B... est célibataire et sans charge de famille en France alors que sa femme et son fils résident au Sri Lanka. S'il fait valoir que compte tenu de la durée de son séjour, il a créé des attaches en France, il ne l'établit par aucune pièce. En outre

M. B..., qui produit des attestations de domiciliation postale dans des structures d'hébergement, ne démontre pas avoir une résidence stable, ni une activité professionnelle, et ne peut donc se prévaloir d'une particulière intégration dans la société française. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit donc être écarté. La décision contestée n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ :

11. Aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / Elle peut prolonger le délai accordé pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) ".

12. Lorsqu'elle accorde le délai de trente jours prévu par les dispositions précitées de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et d'asile, l'autorité administrative n'est pas tenue de motiver sa décision sur ce point si l'étranger, comme en l'espèce, n'a présenté aucune demande tendant au bénéfice d'un délai d'une durée supérieure. Au demeurant, l'arrêté contesté mentionne que rien ne s'oppose à ce que l'intéressé soit obligé de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Le moyen tiré du défaut de motivation doit, dès lors, être écarté.

En ce qui concerne le pays de destination :

13. Aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : / 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu la qualité de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Un autre pays pour lequel un document de voyage en cours de validité a été délivré en application d'un accord ou arrangement de réadmission européen ou bilatéral ; / 3° Ou, avec l'accord de l'étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". L'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. ".

14. En premier lieu, la décision contestée mentionne que M. B... n'établit pas être exposé à des peines ou traitement contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. La décision fixant le pays de destination est donc suffisamment motivée.

15. En second lieu, il est constant que la demande d'asile de M. B..., qui a été réexaminée à plusieurs reprises, a fait l'objet en dernier lieu d'un rejet par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 12 juin 2015 et par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 7 juillet 2015. M. B..., qui se borne à se référer à des rapports internationaux, ne verse au dossier aucune pièce nouvelle de nature à établir qu'il serait personnellement exposé à des risques pour sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine au sens des stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté. Le préfet de police n'a, dès lors, pas non plus méconnu les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais qu'il a exposés.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 23 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- Mme Renaudin, première conseillère,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 avril 2023.

La rapporteure,

M. RENAUDINLe président,

J. LAPOUZADE

La greffière,

C. POVSE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA03051


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22PA03051
Date de la décision : 06/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DIEMERT
Rapporteur ?: Mme Mathilde RENAUDIN
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : RAJKUMAR

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-04-06;22pa03051 ?
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