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28/09/2023 | FRANCE | N°22PA05381

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 28 septembre 2023, 22PA05381


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 19 janvier 2022 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a ordonné son transfert du centre pénitentiaire du sud-francilien vers la maison centrale de Saint-Martin-en-Ré ainsi que les décisions implicite et expresse des 4 mai et 14 juin 2022 rejetant son recours gracieux introduit contre cette décision.

Par un jugement n°s 2210879/6-3, 2210880/6-3, 2216875/6-3 du 20 octobre 2022, le tribunal administrat

if de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requêt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 19 janvier 2022 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a ordonné son transfert du centre pénitentiaire du sud-francilien vers la maison centrale de Saint-Martin-en-Ré ainsi que les décisions implicite et expresse des 4 mai et 14 juin 2022 rejetant son recours gracieux introduit contre cette décision.

Par un jugement n°s 2210879/6-3, 2210880/6-3, 2216875/6-3 du 20 octobre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires en réplique enregistrés les 16 décembre 2022, 28 février 2023 et 2 mai 2023, M. C... D..., représenté par Me Ference, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 2210879/6-3, 2210880/6-3, 2216875/6-3 du 20 octobre 2022 ;

2°) d'annuler les décisions du 19 janvier 2022, du 4 mai 2022 et du 14 juin 2022 ;

3°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice, de l'affecter au centre de détention de Val-de-Reuil ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ;

- l'auteur de la décision n'avait pas compétence pour la prendre ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 mars 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la requête se borne à reproduire ses écritures de première instance et est par suite irrecevable ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gobeill,

- les conclusions de M. Doré, rapporteur public,

- et les observations de Me Ference, représentant M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... D..., condamné à la réclusion criminelle et détenu depuis le 5 mai 2017 au centre pénitentiaire du sud-francilien à Réau (Seine-et-Marne) a été transféré à la maison centrale de Saint-Martin-en-Ré (Charente-Maritime) par une décision du garde des sceaux, ministre de la justice du 19 janvier 2022. Il a formé, le 2 mars 2022, un recours gracieux contre cette décision, qui a été implicitement rejeté le 4 mai 2022 puis par une décision expresse le 14 juin 2022. M. D... relève appel du jugement du 20 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions.

2. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence de Mme A... et de Mme B... pour signer respectivement les décisions du 19 janvier 2022 affectant M. D... et du 14 juin 2022 rejetant son recours gracieux ne peut qu'être écarté par adoption des motifs retenus au point 3 du jugement contesté.

3. En second lieu, aux termes de l'article D. 80 du code de procédure pénale alors applicable : " Le ministre de la justice dispose d'une compétence d'affectation des condamnés dans toutes les catégories d'établissement. Sa compétence est exclusive pour les affectations dans les maisons centrales et les quartiers maison centrale ainsi que pour décider de l'affectation : / -des condamnés à une ou plusieurs peines dont la durée totale est supérieure ou égale à dix ans et dont la durée de l'incarcération restant à subir au moment où leur condamnation ou la dernière de leurs condamnations est devenue définitive est supérieure à cinq ans (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. M. D... soutient que son affectation à la maison centrale de Saint-Martin-en-Ré emporte un éloignement tel qu'il rendra quasi-impossible la visite des membres de sa famille qui résident à l'étranger, soit en Russie pour son épouse, en Allemagne pour ses collatéraux et en Suisse pour son fils. Il ne ressort cependant pas des pièces du dossier qu'une telle affectation, dans un établissement au demeurant spécialisé dans la prise en charge de sa personnalité et de son profil pénal, rendrait sensiblement plus difficile la visite de ses proches, dès lors qu'il avait, lors de ses premiers vœux, demandé à être affecté, par ordre décroissant de préférence, à Casabianda en Corse puis à Val-de-Reuil dans l'Eure puis au Centre pénitentiaire du sud francilien en Seine-et-Marne puis à Argentan dans l'Orne, dans des centres qui ne sont pas notoirement plus éloignés de l'Île-de-Ré au point d'empêcher toute visite de ses proches, ces derniers communiquant avec lui par téléphone ou visioconférence et aucune pièce du dossier ne permettant d'établir que ses sœurs ne pourraient se déplacer hors d'Allemagne du fait de la pathologie alléguée de leurs conjoints. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées et de l'erreur manifeste d'appréciation ne peuvent dès lors qu'être écartés.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 septembre 2023.

Le rapporteur, Le président,

J.-F. GOBEILL J. LAPOUZADE

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA05381


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22PA05381
Date de la décision : 28/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : CABINET LANDAIS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-09-28;22pa05381 ?
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