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16/01/2024 | FRANCE | N°22PA04437

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 16 janvier 2024, 22PA04437


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... et la Sarl NMH Fruits ont saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 février 2020 par lequel la maire de Paris a prononcé la radiation de M. B... des marchés découverts " Barbés " et " Joinville ", à compter du dimanche 1er mars 2020.



Par un jugement n° 2004791/4-3 du 1er avril 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.









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rocédure devant la Cour :



Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 13 octobre 2022 et 27 septemb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... et la Sarl NMH Fruits ont saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 février 2020 par lequel la maire de Paris a prononcé la radiation de M. B... des marchés découverts " Barbés " et " Joinville ", à compter du dimanche 1er mars 2020.

Par un jugement n° 2004791/4-3 du 1er avril 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 13 octobre 2022 et 27 septembre 2023, M. B... et la Sarl NMH Fruits, représentés par Me Levi, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 1er avril 2022 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 13 février 2020 ;

3°) de mettre à la charge de la ville de Paris le versement d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est irrégulier dans la mesure où les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce que la mesure contestée aurait dû être précédée d'une procédure contradictoire ;

- la décision contestée a été prise en méconnaissance des articles L. 121-1 et L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration et des droits de la défense, dès lors qu'elle n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire effective ;

- la décision contestée a été prise en méconnaissance de l'article L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration, dans la mesure où M. B... n'a pas été mis à même avant son édiction de consulter son dossier ;

- la décision contestée repose sur des infractions au règlement des marchés de la ville de Paris qui ne sont pas établies ;

- la décision contestée méconnaît l'article 97 du règlement des marchés découverts alimentaires et biologiques de la ville de Paris ;

- la décision contestée est disproportionnée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 juillet 2023, la maire de Paris conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 1er août 2023, la clôture de l'instruction a été reportée au 29 septembre 2023 à 12h00.

M. B... s'est vu octroyer le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 7 septembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- l'arrêté municipal du 10 décembre 2014 portant règlement des marchés découverts alimentaires et biologiques de Paris ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme d'Argenlieu,

- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Levi pour M. B... et la société NMH Fruits et de Me Falala pour la ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... exerce la profession de vendeur ambulant de fruits et légumes et la SARL NMH Fruits est sa société d'exploitation. L'intéressé était titulaire, depuis le 1er janvier 2006, d'une carte d'abonné délivrée par la maire de Paris, renouvelée tous les ans, lui permettant d'exercer son activité sur les marchés " Barbès " et " Joinville ". Par une décision du 13 février 2020, la maire de Paris a prononcé la radiation de M. B... de ces deux marchés à compter du 1er mars 2020, pour n'avoir pas respecté le règlement des marchés découverts alimentaires et biologiques de Paris. Par un jugement du 1er avril 2022, dont M. B... et la Sarl NMH Fruits relèvent appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 février 2020.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Il ressort de l'examen du jugement attaqué que le tribunal a écarté, par une motivation suffisante, les moyens tirés d'une part, de ce que la décision en litige n'aurait pas été précédée d'une procédure contradictoire, d'autre part, de ce que M. B... aurait dû être mis à même de consulter son dossier administratif. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement doit donc être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment (...) : 3° le maintien du bon ordre dans les endroits où il se fait de grands rassemblements d'hommes, tels que les foires, marchés, réjouissances (...) ". L'article L. 2512-13 du même code, dans sa version applicable, dispose : " I. - Dans la Ville de Paris, le préfet de police exerce les pouvoirs et attributions qui lui sont conférés par l'arrêté des consuls du 12 messidor an VIII qui détermine les fonctions du préfet de police à Paris et par les textes qui l'ont modifié ainsi que par les articles L. 2512-7, L. 2512-14 et L. 2512-17. II. - Toutefois, le maire de Paris est chargé de la police municipale en matière : (...) 5° De maintien du bon ordre dans les foires et marchés (...) ".

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". L'article L. 122-2 de ce code dispose : " Les mesures mentionnées à l'article L. 121-1 à caractère de sanction ne peuvent intervenir qu'après que la personne en cause a été informée des griefs formulés à son encontre et a été mise à même de demander la communication du dossier la concernant ". L'article L. 211-2 du même code précise : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délais des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 1°) Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ".

5. Tout d'abord, la décision en litige par laquelle la maire de Paris a radié M. B... des marchés " Barbès " et " Joinville " a été prise, sur le fondement de l'article précité L. 2512-13 du code général des collectivités territoriales, dans le but de prévenir tout risque d'atteinte au bon ordre sur ces marchés. Elle constitue par conséquent, non pas une sanction, mais une mesure de police dont l'édiction devait être précédée d'une procédure contradictoire permettant à l'intéressé d'être informé de la mesure envisagée, de ses motifs et de bénéficier d'un délai suffisant pour présenter ses observations. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été convoqué par une lettre du 18 octobre 2019 à un entretien fixé le 19 novembre 2019. Cette lettre mentionnait qu'il pouvait être accompagné de la personne de son choix et qu'en cas d'indisponibilité, il serait convenu d'une autre date. Cette convocation énumérait, en outre, l'ensemble des motifs sur le fondement desquels la maire de Paris envisageait de fonder sa mesure. Par suite, les moyens tirés de ce que la procédure en litige aurait été conduite en méconnaissance des dispositions précitées des articles L. 121-1 et L. 211 du code des relations entre le public et l'administration, des droits de la défense et du principe du contradictoire doivent être écartés.

6. Ensuite, les dispositions précitées de l'article L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration réservent aux seules décisions qui ont la nature de sanction l'obligation préalable de communication du dossier. Par suite, dès lors que la mesure en litige constitue, ainsi qu'il a été dit, une mesure de police, et alors qu'aucune autre disposition du règlement des marchés découverts alimentaires et biologiques de Paris n'institue une telle obligation, le moyen tiré de ce que cette décision aurait dû être précédée de la communication à M. B... de son entier dossier, ne peut qu'être écarté.

7. En second lieu, il convient d'écarter les moyens tirés de l'inexactitude matérielle des faits, de ce que la décision en litige méconnaîtrait les dispositions de l'article 97 du règlement des marchés découverts alimentaires et biologiques de Paris et de ce qu'elle serait entachée d'une erreur d'appréciation, par adoptions des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 4 à 13 du jugement attaqué.

8. Il résulte de ce qui précède que M. B... et la société NMH Fruits ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris n'a pas fait droit à sa demande. Par voie de conséquence, leur requête doit être rejetée.

Sur les frais de l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la ville de Paris, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. B... et la société NMH Fruits et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... le versement à la ville de Paris d'une somme de 1 000 euros au titre de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera la somme de 1 000 euros à la ville de Paris en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la société NMH Fruits et à la ville de Paris.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Bonifacj, présidente,

- M. Pagès, premier conseiller,

- Mme d'Argenlieu, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 janvier 2024.

La rapporteure,

L. d'ARGENLIEULa présidente,

J. BONIFACJ

La greffière,

E. TORDO

La République mande et ordonne au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA04437


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04437
Date de la décision : 16/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONIFACJ
Rapporteur ?: Mme Lorraine D'ARGENLIEU
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : LEVI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-16;22pa04437 ?
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