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29/02/2024 | FRANCE | N°23PA01220

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 29 février 2024, 23PA01220


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société civile de construction vente Villa Jasmin a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 2 septembre 2021 par lequel le maire de la commune des Lilas (Seine-Saint-Denis) a refusé de lui délivrer un permis de construire modificatif sur un terrain situé 116 avenue du maréchal De Lattre de Tassigny.



Par un jugement n° 2114995 du 9 mars 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête enregistrée le 23 mars 2023, la société civile de const...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile de construction vente Villa Jasmin a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 2 septembre 2021 par lequel le maire de la commune des Lilas (Seine-Saint-Denis) a refusé de lui délivrer un permis de construire modificatif sur un terrain situé 116 avenue du maréchal De Lattre de Tassigny.

Par un jugement n° 2114995 du 9 mars 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 23 mars 2023, la société civile de construction vente Villa Jasmin, représentée par Me Brillat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2114995 du 9 mars 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 septembre 2021 ;

3°) d'enjoindre à la commune des Lilas de lui délivrer le permis de construire sollicité dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de la commune des Lilas le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté a été pris par une autorité incompétente pour ce faire ;

- les premiers juges ne pouvaient considérer que n'avaient pas été respectées les dispositions de l'article IV.3.b du règlement du plan local d'urbanisme imposant le respect d'une distance minimale de 8 mètres avec les façades voisines dès lors que cette distance est respectée et qu'en tout état de cause, son non-respect constitue une adaptation mineure autorisée par l'article L. 152-3 du code de l'urbanisme justifiée par l'existence d'une zone non aedificandi sous forme d'une bande de 2 mètres de large qui a servi de support à une construction irrégulière dont le mur est aveugle ;

- le refus de permis de construire modificatif ne pouvait légalement remettre en cause le permis de construire initial devenu définitif ainsi que le prévoit l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme ;

- les motifs tirés de l'irrégularité de la taille du local à bicyclettes et de l'insuffisance des emprises de pleine-terre ne sont pas fondés et devaient en tout état de cause être assortis de prescriptions ;

- le projet de modification s'intègre dans l'environnement urbain.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 mai 2023, la commune des Lilas, représentée par Me Lherminier, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société civile de construction vente Villa Jasmin le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gobeill,

- les conclusions de M. Doré, rapporteur public,

- et les observations de Me Laffitte substituant Me Lherminier représentant la commune des Lilas.

Considérant ce qui suit :

1. Le maire des Lilas a, par arrêté du 18 décembre 2014, délivré à la société civile de construction vente Villa Jasmin, un permis de construire un immeuble de gabarit R+3 comprenant 14 logements, d'une surface de plancher de 903,09 m2, sur un terrain situé 116 avenue du maréchal De Lattre de Tassigny. Les travaux ayant été achevés en décembre 2018, la société requérante a déposé, le 18 juin 2021 une demande de permis de construire modificatif rejeté par un arrêté du 2 septembre 2021 du maire. La société civile de construction vente Villa Jasmin relève appel du jugement du 9 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, le moyen tiré de ce que la décision aurait été prise par une autorité incompétente pour ce faire ne peut qu'être écarté par adoption des motifs retenus au point 2 du jugement contesté.

3. En deuxième lieu, d'une part, aux termes des dispositions de l'article L. 152-3 du code de l'urbanisme : " Les règles et servitudes définies par un plan local d'urbanisme : / 1° Peuvent faire l'objet d'adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes ; / 2° Ne peuvent faire l'objet d'aucune autre dérogation que celles prévues par les dispositions de la présente sous-section. ". Il résulte de ces dispositions que seules sont autorisées les adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes.

4. D'autre part, l'administration ne peut assortir une autorisation d'urbanisme de prescriptions qu'à la condition que celles-ci, entraînant des modifications sur des points précis et limités et ne nécessitant pas la présentation d'un nouveau projet, aient pour effet d'assurer la conformité des travaux projetés aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect. En outre, pour l'application des dispositions du code de l'urbanisme ou du plan local d'urbanisme qui prévoient expressément la possibilité pour l'administration de n'accepter le projet que sous réserve de prescriptions spéciales, un permis de construire ne peut être refusé que si l'autorité compétente estime qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales.

5. Aux termes de l'article IV-3 b) du PLUi d'Est Ensemble, concernant la commune des Lilas en zone UC et UM : " Lorsque la façade ou partie de façade comporte un ou plusieurs éléments créant des vues, la distance de retrait minimal est de 8 mètres. (...) ". Les dispositions du même PLUi prévoient que " En application des dispositions de l'article L. 471-1 du code de l'urbanisme, le recours à la cour commune est possible. Dans ce cas, les règles de prospect des constructions les unes par rapport aux autres sur un même terrain s'appliqueront à la place des règles de prospect par rapport aux limites séparatives ".

6. La société requérante soutient que la distance existant entre le projet et le bâtiment situé en vis-à-vis respecte les dispositions précitées en ce que le projet est situé à une distance de 6 mètres de la limite séparative à laquelle il faut ajouter une zone non aedificandi sous la forme d'une bande de 2 mètres de large, et qu'en tout état de cause, elle constitue une adaptation mineure autorisée par l'article L. 152-3 du code de l'urbanisme justifiée par l'existence de cette bande ayant servi de support à une construction irrégulière dont le mur est aveugle.

7. Toutefois, ne permettent d'établir la réalité de cette zone non aedificandi ni le contrat de vente du 13 février 2013 de la parcelle siège du projet, qui ne fait que faire état d'un courrier préfectoral du 21 avril 1994 mentionnant une " zone non aedificandi de quatre mètres " et qui est accompagnée d'un plan insuffisamment précis, ni l'acte de vente de la parcelle voisine enregistré au greffe de la Conservation des Hypothèques de la Seine le 12 novembre 1916 et qui se borne à relever sans autre précision l'existence d'une " petite bande de terre ". En tout état de cause, l'allégation selon laquelle la présence d'une construction illégale, qui ne ressort d'aucune pièce du dossier, justifierait que la distance de huit mètres pourrait faire l'objet d'une adaptation, n'est pas de nature à établir qu'une telle adaptation, à la supposer même mineure, serait pour autant rendue nécessaire.

8. Aux termes de l'article III-1 e) du règlement du PLUi, relatif aux " Règles concernant les locaux vélos, trottinettes, poussettes, etc " : " Constructions à sous-destination de logement : / Création de 2 logements et plus : / Il est exigé au minima la réalisation d'un local d'une superficie minimale de 3 m2 / Il est exigé la réalisation d'au moins 1,5 m2 par logement créé. ".

9. La demande de permis de construire modificatif mentionne la présence d'un local à bicyclettes de 12,99 m2. Outre qu'il s'agit d'une modification par rapport à la demande initiale qui faisait état d'un tel local d'une superficie de 13,94 m2, cette superficie est inférieure à la superficie exigée par les dispositions du PLUi à la date de la décision en litige, soit 21m2 compte tenu du nombre de logements. La décision contestée a ainsi pu à bon droit opposer le motif contesté, quand bien même un premier permis de construire aurait été accordé le 18 décembre 2014, la société ne pouvant utilement invoquer le caractère temporaire d'une telle réduction de superficie. Enfin, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'instauration d'une prescription était possible.

10. Les dispositions de l'article IV-3 c) du règlement du PLUi d'Est Ensemble prévoient que pour les constructions situées dans un secteur d'indice D, ce qui est le cas en l'espèce : " Une part de 30% minimum de la superficie du terrain doit être traitée en espace de pleine terre ", cette dernière étant définie comme " un espace libre ne comportant aucune construction, installation ou ouvrage dans le sol et hors sol ".

11. Contrairement aux affirmations de la société requérante selon laquelle la part des superficies de pleine terre, de 98 m2 dans le projet initial, a été portée à 105 m2 dans le projet modificatif et respecte ainsi les dispositions précitées qui exigent une surface de pleine terre de 95 m2 au minimum, il ressort des pièces du dossier qu'à l'Ouest du projet, une terrasse de 24,5 m2 a été créée en remplacement d'une terrasse de 11 m2 implantée dans un jardin privatif et que cette diminution n'a pas été compensée par la réduction de la superficie des terrasses situées au Nord et au Sud qui sont implantées au-dessus d'un parc de stationnement et ne peuvent donc être regardées comme des espaces de pleine terre. Il en résulte que la décision contestée a pu, sans méconnaitre les dispositions précitées, opposer le motif contesté quand bien même un premier permis de construire aurait été accordé le 18 décembre 2014.

12. Aux termes des dispositions de l'article III-1 b) du règlement du PLUi d'Est Ensemble : " Tout projet peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions particulières si les constructions ou utilisations du sol concernées, par leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales / (...) L'intégration des garde-corps de sécurité en acrotère sera privilégiée (...) ".

13. Il ressort des pièces du dossier que le projet de permis de construire modificatif a notamment pour objet de modifier le volume de la construction donnant sur le boulevard du Maréchal de Tassigny de nature, d'une part, à modifier l'extrémité de la façade en la couvrant d'un nouvel enduit blanc et, d'autre part, à recouvrir la partie centrale de cette façade d'un enduit remplaçant le parement en briques alors que d'autres bâtiments situés dans la même artère, que ce soit sur le même côté et en face du projet, comportent des parements en briques, l'instauration de prescriptions devant se limiter à entrainer des modifications sur des points précis et circonscrits. Il en résulte que c'est à bon droit que la décision s'est fondée sur le motif tiré de l'absence d'insertion de la construction dans le paysage.

14. Il résulte de tout ce qui précède que la société civile de construction vente Villa Jasmin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. La commune des Lilas n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de la société civile de construction vente Villa Jasmin tendant à ce qu'une somme soit mise à sa charge au titre des dispositions précitées doivent être rejetées. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société civile de construction vente Villa Jasmin le versement à la commune des Lilas d'une somme de 1 500 euros au titre des frais liés à l'instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société civile de construction vente Villa Jasmin est rejetée.

Article 2 : La société civile de construction vente Villa Jasmin versera une somme de 1 500 euros à la commune des Lilas au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile de construction vente Villa Jasmin et à la commune des Lilas.

Délibéré après l'audience du 1er février 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 février 2024.

Le rapporteur, Le président,

J.-F. GOBEILL J. LAPOUZADE

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA01220


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23PA01220
Date de la décision : 29/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : SEBAN ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-29;23pa01220 ?
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