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26/10/2023 | FRANCE | N°23TL00637

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 26 octobre 2023, 23TL00637


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 5 avril 2022 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2203576 du 13 octobre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 mars 2023, M. C..., représenté par Me Ruffel, demand

e à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 avril 2022 ;

3°) d'enjoind...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 5 avril 2022 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2203576 du 13 octobre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 mars 2023, M. C..., représenté par Me Ruffel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 avril 2022 ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de deux mois à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet de l'Hérault de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué ne répond pas au moyen selon lequel la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un vice de procédure en raison de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, en méconnaissance de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision est entachée d'un vice d'incompétence de son auteur ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de la saisine de la commission du titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet de l'Hérault ayant méconnu l'étendue de son pouvoir général de régularisation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire enregistré le 9 août 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 16 août 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 31 août 2023.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 février 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Barthez,

- et les observations de M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... ressortissant marocain né le 14 janvier 1984 et qui déclare être entré en France le 24 mars 2008, a sollicité le 22 février 2022 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de la vie privée et familiale ou, à défaut, en qualité de salarié. Par un arrêté du 5 avril 2022, le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer ce titre et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. C... fait appel du jugement du 13 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". L'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est le père de trois enfants nés en 2011, 2014 et 2021 en France de sa relation avec Mme A..., une compatriote résidant à Montpellier de façon régulière, sous couvert d'un titre de séjour d'une durée de validité de dix ans. Nonobstant les emplois occupés par M. C... dans les environs de Toulon (Var), plusieurs documents établissent le caractère habituel de sa présence à Montpellier ainsi que la relation avec Mme A... et leurs enfants communs. Ainsi, les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ont porté une atteinte disproportionnée au droit de M. C... au respect de la vie privée et familiale par rapport aux buts en vue desquels elles ont été prises. Elles méconnaissent donc les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 5 avril 2022 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, eu égard au moyen d'annulation retenu, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de délivrer un titre de séjour à M. C... dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

6. Il y a également lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser au conseil de M. C... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 13 octobre 2022 et l'arrêté du préfet de l'Hérault du 5 avril 2022 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer un titre de séjour à M. C... dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros au conseil de M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administratif et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié M. B... C..., à Me Christophe Ruffel et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2023, où siégeaient :

- M. Barthez, président,

- M. Lafon, président assesseur,

- Mme Restino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2023.

Le président-rapporteur,

A. BarthezL'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

N. Lafon

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°23TL00637 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00637
Date de la décision : 26/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité interne - Droit au respect de la vie privée et familiale.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: M. Alain BARTHEZ
Rapporteur public ?: M. CLEN
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-10-26;23tl00637 ?
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