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31/03/2005 | FRANCE | N°04VE00620

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ere chambre, 31 mars 2005, 04VE00620


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. Ahmed X, demeurant chez M. Mostefa X ..., par Me Deutsch ;

Vu la requête, e

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Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. Ahmed X, demeurant chez M. Mostefa X ..., par Me Deutsch ;

Vu la requête, enregistrée le 16 février 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle M. Ahmed X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement N° 0202717 en date du 8 décembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mai 2002 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) à ce qu'il soit enjoint au préfet des Yvelines de lui délivrer une carte de séjour vie privée et familiale dans un délai de 8 jours ;

3°) à ce que l'Etat soit condamné à lui verser 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que, contrairement à l'article 2 du décret du 23 juin 1998, l'administration a procédé à son audition le jour du dépôt de son dossier ; qu'il n'a pas été mis en mesure par le préfet de présenter utilement sa défense ; que le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé au regard des exigences de la loi du 11 juillet 1979 ; que l'arrêté est entaché d'une erreur dans la qualification juridique des faits ; que le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation particulière, notamment au regard des risques encourus et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, mais s'est cru lié par la décision du ministre, ce que traduit l'absence de référence à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il a rapporté la preuve des risques qu'il encourt en cas de retour en Algérie ; que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu, ainsi que l'article 3 de ladite convention dans la mesure où M. X devra soit retourner en Algérie, soit vivre irrégulièrement en France sans pouvoir subvenir aux besoins de sa famille ; que l'arrêté attaqué viole aussi le principe du respect de la dignité humaine reconnu par le Conseil constitutionnel ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mars 2005 :

- le rapport de M. Blin, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Sur les moyens tirés de ce que la procédure suivie par l'administration aurait été irrégulière et que l'arrêté litigieux serait insuffisamment motivé :

Considérant que M. X n'a présenté, en première instance, que des moyens de légalité interne contre l'arrêté du préfet des Yvelines lui refusant un titre de séjour ; qu'ainsi, il n'est pas recevable, en appel, à soutenir que cet arrêté serait entaché d'un défaut de motivation ou qu'il aurait été pris à l'issue d'une procédure irrégulière, ce moyen reposant sur une cause juridique différente de celle qui fondait ses moyens de première instance ;

Sur l'exception d'illégalité de la décision du 25 mars 2002 par laquelle le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales a refusé l'asile territorial à M. X :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la loi susvisée du 25 juillet 1952 : Dans les conditions compatibles avec les intérêts du pays, l'asile territorial peut être accordé par le ministre de l'intérieur après consultation du ministre des affaires étrangères à un étranger si celui-ci établit que sa vie ou sa liberté est menacée dans son pays ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. ;

Considérant que M. X, qui est de nationalité algérienne, est né en 1966 en Algérie et est entré en France en mai 2001 avec un passeport revêtu d'un visa de court séjour ; qu'il soutient que lorsqu'il a effectué son service national en Algérie, un vol d'armes a été commis en 1988, qu'il a été soupçonné de complicité avec les auteurs de ce vol, qu'en raison de ces soupçons il a été plusieurs fois torturé par l'armée algérienne en 1988, 1994, 1996 et 1999 et qu'afin d'échapper à de nouvelles tortures, il a fui vers la France ; qu'à l'appui de ses allégations, il produit plusieurs convocations d'un tribunal militaire algérien, des certificats de soins d'établissements algériens pour troubles psychologiques, un certificat d'un psychiatre du centre médico-psychologique de Sartrouville du 25 février 2004, des certificats d'un médecin du centre de soins de l'association pour les victimes de la répression en exil en date du 13 juillet 2004 et du 8 décembre 2004 et deux certificats d'un médecin du centre hospitalier d'Argenteuil ; que, toutefois, s'il ressort de ces pièces que M. X présente des troubles psychologiques graves ainsi que des cicatrices qui pourraient avoir été provoquées par des actes de torture, il n'établit pas, en tout état de cause qu'il serait encore menacé de torture plus de treize ans après les faits litigieux ; que s'il ajoute qu'il a été victime de menaces et d'agression de la part de terroristes, il n'en apporte aucune preuve ; que, dès lors, il n'est pas fondé à soutenir, qu'en lui refusant l'asile territorial, le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ou aurait méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mai 2002 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de délivrer un titre de séjour à M. X :

Considérant qu'aux termes de l'article 9 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, dans sa rédaction issue du deuxième avenant en date du 28 septembre 1994, en vigueur à la date du refus litigieux : Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français (...) les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité et un visa de long séjour délivré par les autorités françaises ;

Considérant que le préfet des Yvelines a fondé son arrêté non seulement sur le refus ministériel d'asile territorial, mais aussi sur les article 7 et 9 de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et a précisé que la situation de M. X ne justifiait pas de dérogation ; qu'ainsi, il ne ressort pas du dossier qu'il n'aurait pas procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de M. X ; que, par ailleurs, M. X n'est pas fondé à soutenir que le préfet des Yvelines se serait cru lié par la décision du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales pour lui refuser un titre de séjour ;

Considérant que l'arrêté attaqué ne fixe pas de pays de destination ; que, dès lors, M. X ne peut utilement invoquer à son encontre les risques qu'il encourrait s'il retournait en Algérie ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1°- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2°- Il ne peut y avoir ingérence dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure (...) nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales (...) ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que M. X s'est marié en Algérie en 1998 et est venu en France en 2001 avec son épouse, également en situation irrégulière, et son fils né en 2000 ; que la légalité de la décision attaquée devant être appréciée en fonction des éléments de fait existant à la date de cette décision, M. X ne peut utilement faire valoir qu'il serait père d'un second enfant né le 17 octobre 2004 ; qu'eu égard à la durée du séjour en France de cette famille à la date de la décision attaquée et à la possibilité pour M. X et sa famille de retourner en Algérie, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté attaqué porte au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la circonstance que M. X, s'il ne trouve pas un autre pays d'accueil devrait, soit retourner en Algérie, soit rester irrégulièrement en France sans pouvoir travailler et subvenir aux besoins de sa famille, ne peut être regardé comme un traitement inhumain et dégradant au sens de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou portant atteinte au respect dû à la personne humaine ;

Considérant que si M. X invoque le bénéfice des dispositions du 11° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, en se prévalant de son état de santé, il ressort des pièces du dossier qu'il n'a pas sollicité un titre de séjour sur ce fondement ; que, dès lors, et en tout état de cause, ce moyen est inopérant ;

Considérant enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant dans ces conditions un titre de séjour à M. X, le préfet des Yvelines aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. X, n'appelle aucune mesure d 'exécution ; que dès lors les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. X doivent être rejetées en tout état de cause ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant enfin, que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui en appel et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 04VE00620
Date de la décision : 31/03/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre BLIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : DEUTSCH

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-03-31;04ve00620 ?
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