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10/11/2015 | FRANCE | N°15VE00891

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 10 novembre 2015, 15VE00891


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 23 mars 2015 et 20 avril 2015, présentés pour M. A...B..., demeurant..., par Me Tahri, avocat ; M. B...demande à la Cour :

1° d'annuler l'ordonnance n° 1407405 du 14 octobre 2014 par laquelle le président de la 3ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er août 2014 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de

trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 23 mars 2015 et 20 avril 2015, présentés pour M. A...B..., demeurant..., par Me Tahri, avocat ; M. B...demande à la Cour :

1° d'annuler l'ordonnance n° 1407405 du 14 octobre 2014 par laquelle le président de la 3ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er août 2014 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit ;

2° d'annuler cet arrêté ;

Il soutient que :

Sur le refus de titre de séjour :

- cette décision comporte une motivation sommaire, stéréotypée, qui ne tient pas compte de sa situation personnelle ;

- le préfet a commis une erreur de droit compte tenu de son état de santé ;

- le préfet était tenu de transmettre son contrat de travail à la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle conformément à la circulaire du

7 janvier 2008 ;

- en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- eu égard à la nature de sa demande, il ne lui appartenait pas de disposer préalablement d'une autorisation de travail ;

- le préfet ne pouvait faire application de l'article L. 5221-2 du code du travail sans commettre une erreur de droit ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour sur lequel elle est fondée ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'accord franco-marocain ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

..................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 octobre 2015 le rapport de Mme Boret, président assesseur ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant marocain, entré en France, selon ses déclarations, le 25 août 2001, à l'âge de vingt-cinq ans, a sollicité le 6 juin 2013 son admission exceptionnelle au séjour, que le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusée par arrêté en date du 1er août 2014, lui faisant obligation de quitter le territoire français, dans un délai de trente jours à compter de sa notification, et fixant le pays de destination ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que cette décision, comportant les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement, permettait ainsi à l'intéressé de contester utilement le refus qui lui a été opposé ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que M. B...ne peut utilement se prévaloir de la circulaire du 7 janvier 2008 du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, ladite circulaire ayant été annulée par une décision du Conseil d'État statuant au contentieux en date du 23 octobre 2009 ;

4. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet eu égard à l'état de santé de M. B...n'est pas assorti des précisions suffisantes pour permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé ; qu'au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B...aurait sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; qu'ainsi, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ; que l'article L. 111-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que les dispositions de ce code s'appliquent " sous réserve des conventions internationales " ; qu'aux termes de l'article 9 de l'accord

franco-marocain susvisé du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. " ; qu'en vertu de l'article 3 de l'accord franco-marocain susvisé : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques et professionnelles (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente :

1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail " ;

6. Considérant, d'une part, qu'il résulte de la combinaison des textes ci-dessus rappelés que la situation des ressortissants marocains souhaitant bénéficier d'un titre de séjour portant la mention " salarié " est exclusivement régie par les stipulations de l'accord

franco-marocain du 9 octobre 1987 dont les modalités d'application sont régies par les dispositions du code du travail ; que, dès lors, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur de droit en rejetant sa demande de titre de séjour en qualité de salarié au motif qu'il ne justifie pas avoir obtenu une autorisation de travail pour l'exercice d'une activité professionnelle, en application des dispositions de l'article L. 5221-2 du code du travail ; qu'il ne saurait davantage soutenir que la nature de sa demande l'exonérait de justifier préalablement d'une telle autorisation alors que les stipulations de l'article 3 de l'accord

franco-marocain du 9 octobre 1987 combinées aux dispositions précitées de l'article L. 5221-2 du code du travail l'imposent ; qu'en outre, le préfet pouvait, sans méconnaître les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain, se fonder sur ce motif pour rejeter la demande de

M. B...alors même qu'il existerait des difficultés de recrutement de personnes qualifiées pour exercer le métier d'étancheur ;

7. Considérant, d'autre part, que le requérant ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour contester la décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié, lesquelles sont inapplicables aux ressortissants marocains désireux d'exercer, en France, une activité professionnelle ; qu'en outre, si M. B... fait valoir qu'il réside en France depuis plus de dix ans, les pièces justificatives sont insuffisantes, notamment pour les années 2004, 2005 et 2006 pour lesquelles ne sont produits que deux factures et deux courriers de l'assurance maladie relatifs à l'octroi de l'aide médicale d'État ; que, de plus, la continuité du séjour de M. B... ne saurait être établie alors qu'il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 5 juillet 2012 ; que, dans ces conditions, le requérant n'atteste pas de motifs exceptionnels justifiant la délivrance d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " au titre de l'admission exceptionnelle au séjour ;

8. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

9. Considérant que M. B...ne démontre pas l'ancienneté de son séjour en France par les pièces qu'il produit ; que s'il a travaillé quelques mois au cours des années 2007, 2008, 2009, 2010, 2011 et 2013 dans le secteur du bâtiment puis de la restauration, ces circonstances sont insuffisantes pour attester d'une réelle intégration ; que, de plus, le requérant, célibataire, sans charge de famille, ne justifie d'aucune attache personnelle et familiale sur le territoire français ; qu'au contraire, il ne conteste pas ne pas être dépourvu de telles attaches au Maroc, son pays d'origine, où résident toujours ses parents ; qu'ainsi, le préfet de la

Seine-Saint-Denis n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et n'a donc pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants " ;

11. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision portant refus de titre de séjour ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

12. Considérant, en premier lieu, que selon l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. " ; que la décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a obligé M. B...à quitter le territoire français est consécutive au refus de titre de séjour pris à son encontre, lequel est suffisamment motivé ; qu'ainsi, la décision litigieuse n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celui-ci, en application des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

13. Considérant, en deuxième lieu, que l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour opposée à M. B...n'étant pas établie, l'exception d'illégalité de ladite décision, soulevée à l'appui des conclusions d'annulation dirigées contre ledit arrêté en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écartée ;

14. Considérant que M. B...n'invoque aucun argument distinct de ceux énoncés à l'encontre du refus de titre de séjour propre à faire ressortir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il s'ensuit que ce moyen doit être écarté par les motifs qui ont été opposés au même moyen dirigé contre la décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

15. Considérant, en dernier lieu, que le moyen selon lequel en obligeant le requérant à quitter le territoire français le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait violé l'accord

franco-marocain n'est pas assorti des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ; qu'au demeurant, M. B...ne peut utilement se prévaloir des stipulations dudit accord pour contester la mesure d'éloignement prise à son encontre, l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ayant pour seul objet de régir le droit au séjour des ressortissants marocains ; que, dès lors, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 1er août 2014 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE00891
Date de la décision : 10/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle BORET
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : TAHRI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-11-10;15ve00891 ?
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