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20/02/2018 | FRANCE | N°17VE03250

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 20 février 2018, 17VE03250


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 28 mars 2017 par lequel le préfet des Yvelines lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.r>
Par un jugement n° 1704490 en date du 20 octobre 2017, le Tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 28 mars 2017 par lequel le préfet des Yvelines lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1704490 en date du 20 octobre 2017, le Tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 28 mars 2017 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A...et l'a obligé à quitter le territoire et a enjoint au préfet des Yvelines de réexaminer la situation administrative de M. A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 novembre 2017, le préfet des Yvelines demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de confirmer son arrêté en date du 28 mars 2017 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu, pour annuler l'acte en litige, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte dès lors que le préfet des Yvelines avait consenti une délégation de signature à M. D...et, en cas d'absence de ce dernier, à M. C...pour signer les refus de séjours et obligations de quitter le territoire français ;

- c'est sans erreur manifeste d'appréciation qu'il a pu refuser la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade à M. A...dès lors que le médecin de l'agence régionale de santé a indiqué, dans son avis en date du 4 janvier 2017, que l'état de santé de M. A...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'un traitement approprié à la prise en charge du malade existe dans son pays d'origine et qu'il n'était pas mis en évidence de risque pour sa personne à raison d'un voyage vers son pays d'origine ;

- M. A...n'allègue pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine.

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Lepetit-Collin a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant béninois né le 27 décembre 1983, est entré sur le territoire français le 1er août 2010 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa court séjour selon ses allégations ; qu'il a bénéficié d'un titre de séjour pour soins du 13 novembre 2014 au 12 novembre 2015 ; que le préfet des Yvelines a toutefois opposé un refus à la demande de renouvellement de son titre le 8 février 2016 ; que M. A...a sollicité à nouveau la délivrance d'un tel titre le 20 janvier 2017 ; que le 4 janvier 2017, le médecin de l'Agence régionale de santé a émis un avis défavorable à sa demande d'autorisation de séjour pour raison médicale ; que, par l'arrêté attaqué du 28 mars 2017, le préfet des Yvelines a refusé son admission au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout pays dans lequel il établit être légalement admissible ; que M. A...a sollicité du Tribunal administratif de Versailles l'annulation de cet arrêté ; que, par un jugement en date du 20 octobre 2017, le tribunal administratif a fait droit à sa demande et enjoint au préfet des Yvelines de réexaminer la situation administrative de M. A... dans un délai de trois mois à compter de la notification dudit jugement ; que le préfet des Yvelines relève régulièrement appel de ce jugement ;

2. Considérant que l'arrêté contesté du 28 mars 2017 a été signé par M. Pascal Bagdian, secrétaire général, pour le préfet et par délégation ; qu'il ressort des pièces du dossier d'appel que ce dernier bénéficiait d'une délégation de signature consentie par arrêté n° 2017079-0008 du 20 mars 2017 du préfet des Yvelines, publié le lendemain de sa signature au recueil des actes administratifs de la préfecture des Yvelines à l'effet de signer, notamment, les arrêtés de refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ; que le préfet des Yvelines est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles a retenu le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 28 mars 2017 pour l'annuler ;

3. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif ;

Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions de refus de séjour et obligation de quitter le territoire français :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 dont les dispositions sont désormais codifiées à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques (...) ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 511-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...). " ; que la rédaction d'une décision à l'aide de formules stéréotypées n'est pas de nature à entacher cette décision d'insuffisance de motivation pour autant que les considérations de droit et de fait qui constituent son fondement sont mentionnées ; que la décision portant refus de délivrer à M. A...le titre de séjour sollicité comporte de manière suffisamment précise l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet s'est fondé ; qu'ainsi, en application des dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. A...n'avait pas à faire l'objet d'une motivation spécifique ; que dès lors le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) " ;

6. Considérant que pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par M.A..., le préfet des Yvelines s'est fondé sur l'avis du médecin de l'Agence régionale de santé d'Ile-de-France en date du 4 janvier 2017 ; que cet avis, versé au dossier, indique que si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale, son défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressé peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

7. Considérant que, pour contredire cet avis, M. A...produit des certificats médicaux desquels il ressort qu'il souffre des séquelles d'une poliomyélite à l'origine d'une déformation du membre inférieur droit (amyotrophie et raccourcissement de 4 centimètres par rapport à l'autre membre inférieur) source d'un handicap sérieux puisqu'il ne peut marcher qu'en appuyant la main sur sa jambe au risque de ne pas pouvoir verrouiller son genou, handicap auquel il ne peut-être remédié que par la pose d'une orthèse ; qu'il ressort également des pièces du dossier que le principal risque de dégradation de ce handicap réside dans un risque de luxation de la hanche et une perte des possibilités de marche ; que si le certificat médical daté du 21 octobre 2016 évoque une orthèse en cours de fabrication à l'hôpital de la pitié Salpetrière et précise que, si les douleurs devaient persister malgré cette orthèse articulée, une arthrodèse du genou devrait être envisagée, aucun élément ne vient préciser les suites données à cette procédure ; que si un autre certificat médical en date du 16 novembre 2016 indique qu'une chirurgie de recurvatum associée à une orthèse cruro-pédieuse est envisagée, il n'en précise pas le terme ; qu'ainsi, en l'état du dossier, les soins dont bénéficie M. A...apparaissent résider dans des soins d'entretien des muscles résiduels dont il n'établit pas ne pas pouvoir bénéficier dans son pays d'origine ; que les éléments médicaux produits par M. A...ne sont donc pas de nature à remettre en cause l'avis de médecin de l'agence régionale de santé ; que dès lors, par suite, le moyen tiré de ce que la décision serait entachée d'une erreur d'appréciation doit être écarté ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que si M.A..., qui déclare être entré en France en 2010, soutient être couturier de formation, être trilingue et indique envisager de travailler dès qu'il sera en situation régulière, il ne démontre pas avoir noué sur le territoire français des liens personnels ou amicaux, ni ne conteste avoir conservé des attaches familiales dans son pays d'origine où résident son épouse et deux enfants mineurs et où lui-même a vécu jusqu'à l'âge de 27 ans ; que, par suite, le préfet des Yvelines n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en prenant les décisions attaquées ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de destination :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ; que M. A...ne produit aucun élément de nature à établir que sa vie serait menacée en cas de retour dans son pays d'origine, ou qu'il y serait personnellement exposé à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; qu'il ne saurait davantage soutenir que le renvoi vers son pays d'origine le priverait des soins médicaux nécessaires à son état de santé et aurait pour conséquence d'alourdir son handicap, et donc de lui faire subir des traitements inhumains ou dégradants au sens des stipulations précitées, dès lors qu'il n'est pas établi que la prise en charge sanitaire de ses pathologies serait indisponible dans son pays d'origine ainsi qu'il vient d'être dit ; que le moyen ne peut, dès lors, qu'être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 28 mars 2017 par lequel le préfet des Yvelines a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement ; que les conclusions de la demande tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet des Yvelines de lui délivrer un titre de séjour ainsi que les conclusions portant sur les frais liés au litige ne peuvent donc également qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1704490 en date du 20 octobre 2017 du Tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...A...devant le Tribunal administratif de Versailles est rejetée.

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N° 17VE03250


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE03250
Date de la décision : 20/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Hélène LEPETIT-COLLIN
Rapporteur public ?: Mme ORIO
Avocat(s) : WAGNER

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-02-20;17ve03250 ?
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