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29/03/2018 | FRANCE | N°16VE02775

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 29 mars 2018, 16VE02775


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les associations Garches Patrimoine, Garches Est à Vous et Garches Environnement ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler le permis de construire accordé le 30 avril 2013 par le maire de la commune de Garches à la SNC Marignan Résidences pour la réalisation d'un ensemble immobilier comprenant 59 logements et des locaux d'activités sur un terrain situé 6 à 12 rue de l'Eglise.

Par un jugement n° 1307334 du 29 juin 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a r

ejeté comme irrecevables les conclusions de l'association Garches Patrimoine et annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les associations Garches Patrimoine, Garches Est à Vous et Garches Environnement ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler le permis de construire accordé le 30 avril 2013 par le maire de la commune de Garches à la SNC Marignan Résidences pour la réalisation d'un ensemble immobilier comprenant 59 logements et des locaux d'activités sur un terrain situé 6 à 12 rue de l'Eglise.

Par un jugement n° 1307334 du 29 juin 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté comme irrecevables les conclusions de l'association Garches Patrimoine et annulé le permis de construire en date du 30 avril 2013.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 25 août 2016, la commune de Garches, représentée par Me Chergui, avocat demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande des associations Garches Patrimoine, Garches Est à Vous et Garches Environnement ou, à titre subsidiaire, de prononcer le sursis à statuer et autoriser la régularisation du permis de construire litigieux sur le fondement de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme ;

3° de mettre à la charge des associations requérantes le versement de la somme de

4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Garches soutient que :

- le dépôt des statuts de l'association Garches est à vous est postérieur à l'affichage de la demande de permis de construire de la SNC Marignan Résidences ; elle est irrecevable à demander l'annulation du permis en cause au regard de l'article L. 600-1-1 du code de l'urbanisme ;

- l'objet social des associations Garches Est à Vous et Garches Environnement ne leur donne pas intérêt pour agir contre un projet situé en zone UA du plan local d'urbanisme, zone dense d'habitat, de services et d'activités ;

- la construction comporte une hauteur de 13,50 mètres en son point le plus haut ;

-il est admis par la jurisprudence qu'il est possible de considérer comme combles des étages construits en attiques dont la façade est droite mais construite en retrait pour aménager une terrasse ; c'est à tort que le Tribunal a regardé le projet comme non conforme à l'article UA 10 du plan local d'urbanisme ;

- les toitures en retrait de façade du bâtiment A ne se situent pas en bordure de rue ;

- c'est à tort que le Tribunal a estimé que les irrégularités retenues pour fonder l'annulation du permis de construire ne pouvaient faire l'objet d'une régularisation dans le cadre des dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme.

.....................................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Colrat,

- les conclusions de Mme Ribeiro-Mengoli, rapporteur public,

- et les observations de Me Chergui pour la commune de Garches et de Me A...pour les associations Garches Est à Vous et Garches Environnement.

Sur les fins de non-recevoir soulevées par les associations Garches Est à Vous et Garches Environnement :

1. Considérant que la commune de Garches a produit la délibération en date du 9 avril 2014 par laquelle le conseil municipal de Garches a donné au maire habilitation pour " intenter les actions en justice et exercer toutes les voies de recours attachées à l'action, appel et cassation " ; que, par suite, les associations requérantes ne sont pas fondées à soutenir qu'il n'est pas justifié de la qualité pour agir du maire au nom de la commune ;

2. Considérant que la commune de Garches a produit un inventaire des pièces jointes à sa requête, conformément à l'article R. 414-3 du code de justice administrative ; que, par suite, la fin de non-recevoir soulevée par les associations requérantes tirée du caractère incomplet de cet inventaire doit être rejetée ;

3. Considérant que la commune de Garches, dont le maire est le signataire du permis de construire délivré à la SNC Marignan Résidences et annulé par le jugement attaqué, était partie au litige devant le Tribunal administratif ; qu'elle a donc qualité pour faire appel du jugement attaqué, nonobstant la circonstance que le bénéficiaire du permis de construire annulé se soit abstenu de relever appel dudit jugement ; que la fin de non-recevoir tirée de la circonstance que le bénéficiaire du permis de construire est réputé accepter les termes du jugement de première instance doit, dès lors, être rejetée ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-1-1 du code de l'urbanisme : " Une association n'est recevable à agir contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l'association en préfecture est intervenu antérieurement à l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une association n'est recevable à demander l'annulation pour excès de pouvoir d'une décision individuelle relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol que si elle a déposé ses statuts en préfecture avant l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire ; qu'il appartient au juge administratif, lorsque cette condition est remplie, d'apprécier si l'association requérante justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre la décision qu'elle attaque en se fondant sur les statuts tels qu'ils ont été déposés à la préfecture antérieurement à la date de l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire ;

5. Considérant que les statuts de l'association Garches Est à Vous, qui lui donnent pour mission " toutes études et réalisations de nature à préserver ou améliorer la qualité de vie à Garches ", ont été déposés en préfecture en janvier 1989 ; qu'un tel objet, qui présente un caractère très général, ne conférait pas à cette association un intérêt lui donnant qualité pour agir contre les décisions individuelles d'urbanisme ; que si l'association se prévaut de ce que ses statuts ont été complétés le 30 mai 2002 afin de lui permettre d'exercer des actions contentieuses en matière d'urbanisme, cette modification de son objet statutaire n'a été déclarée en préfecture que le 29 octobre 2012 ; que la commune produit un certificat de son maire attestant l'affichage de la demande de permis de construire déposée par la SNC Marignan Résidences à compter du 31 juillet 2012 ; que cette attestation fait foi jusqu'à preuve du contraire qui n'est pas apportée en l'espèce ; que les ajouts à la demande initiale de permis, qui ne modifient pas l'économie générale du projet, ne sont pas de nature à remettre en cause cette date ; que, dès lors, l'association Garches Est à Vous n'établit pas remplir les conditions posées par l'article

L. 600-1-1 du code de l'urbanisme pour être recevable à agir à l'encontre du permis de construire litigieux ; que, par suite, la commune de Garches est fondée à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier et doit être annulé en ce qu'il a admis la recevabilité des conclusions de l'association Garches Est à Vous ;

6. Considérant qu'il ressort des statuts de l'association Garches Environnement que celle-ci a pour objet de mener " toutes études, actions et réalisation de nature à préserver ou améliorer l'environnement, le cadre de vie, la qualité de vie à Garches, en particulier dans les domaines suivants : urbanisme, architecture, règlement d'urbanisme " ; que l'association justifie ainsi de son intérêt à agir à l'encontre des autorisations d'urbanisme délivrées sur le territoire de la commune de Garches ; que, par suite, la commune de Garches n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait irrégulier en tant qu'il a admis la recevabilité des conclusions de l'association Garches Environnement ;

Sur le fond du litige :

7. Considérant qu'aux termes de l'article UA 11 du règlement du plan d'occupation des sols : " 11.1 - Les surfaces visibles de l'extérieur, destinées à recevoir un parement ou un enduit, ne peuvent être laissées brutes de fabrication. / 11.2 - Sont interdits : - Les toitures terrasses en bordure de rue, (...) / 11.5 - Les constructions en bordure de rue devront être couvertes d'une toiture en tuiles à petits moules ; toiture qui comportera au moins un versant parallèle à l'axe de la voie. Les pentes devront, d'une façon générale, s'harmoniser avec celles des toitures des lots voisins. " ; que le dernier niveau du projet construit en attique est bordé sur tout son périmètre par un terrasse qui ne constitue pas une toiture terrasse recouvrant toute la surface du dernier niveau du bâtiment ; que, par suite, la commune est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal a estimé que le plan du bâtiment A qui prévoit une terrasse en bordure des rues de l'Eglise et de Suresnes méconnaissait l'article UA 11 précité ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article UA 10 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Garches : " La hauteur et le nombre de niveaux des constructions sont les suivants : - 12 m au faîtage et 9 m à l'égout soit R+2 étages + Combles sur les constructions situées Grande Rue du n° 159 au n° 187 formant angle avec rue de l'Abreuvoir, Passages du Clos, Lanoë / - 15 m dans les autres cas soit R+3 étages + Combles / - 3,50 m au faîtage ou 3 m à l'acrotère pour les annexes. Note : La hauteur est mesurée au droit des façades, en tout point, par rapport au terrain naturel avant travaux (...) " ;

9. Considérant, d'une part, que le niveau supérieur construit en attique présente une hauteur et un traitement des ouvertures, fenêtres et huisseries identiques à ceux des niveaux inférieurs ; que, s'il a une surface moindre que les niveaux inférieurs du fait de sa construction en attique et qu'il est compris entre le plancher haut et la toiture, il se situe dans son entier sous l'égout du toit ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la commune et en l'absence de définition du termes " combles " par le règlement du plan local d'urbanisme, c'est à bon droit que les premiers juges ont regardé le dernier niveau du projet, non comme un comble, mais comme un étage supplémentaire contraire aux prescriptions précitées du règlement du plan local d'urbanisme ;

10. Considérant, d'autre part, que la hauteur de 15 mètres prévues par les dispositions précitées du plan local d'urbanisme doit s'entendre au faîtage ; que les pièces du dossier démontrent que le projet méconnait cette règle de hauteur des constructions ; que, par suite, la commune de Garches n'est pas fondée à soutenir que les premiers juges auraient procédé à une interprétation erronée de l'article UA 10 en estimant que le permis de construire litigieux méconnaissait ses prescriptions sur les deux point en cause ; que ce seul motif est de nature à justifier l'annulation du permis de construire litigieux ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, aux termes duquel : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé par un permis modificatif, peut limiter à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixer le délai dans lequel le titulaire du permis pourra en demander la régularisation. " ; qu'aux termes de l'article L. 600-5-1 du même code : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par un permis modificatif peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si un tel permis modificatif est notifié dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. " ; que, si l'application de ces dispositions n'est pas subordonnée à la condition que la partie du projet affectée par une illégalité soit matériellement détachable du reste de ce projet, elle n'est possible que si la régularisation porte sur des éléments du projet pouvant faire l'objet d'un permis modificatif ; qu'un tel permis ne peut être délivré que si, d'une part, les travaux autorisés par le permis initial ne sont pas achevés et si, d'autre part, les modifications apportées au projet initial pour remédier au vice d'illégalité ne peuvent être regardées, par leur nature ou leur ampleur, comme remettant en cause sa conception générale ; qu'eu égard aux motifs qui fondent l'annulation du permis de construire délivré à la SNC Marignan Résidences qui ont trait à la conception générale du projet, c'est à bon droit que les premiers juges n'ont pas fait application des dispositions susvisées de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Garches est fondée à demander l'annulation du jugement en date du 29 juin 2016 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant qu'il a fait droit aux conclusions de l'association Garches Est à Vous ; qu'en revanche, la commune de Garches n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a fait droit aux conclusions de l'association Garches Environnement tendant à l'annulation du permis de construire délivré le 30 avril 2013 à la SNC Marignan Résidences ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Garches le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'association Garches Environnement et non compris dans les dépens ; que les conclusions de l'association Garches Est à Vous et de la commune de Garches fondées sur les mêmes dispositions doivent en revanche être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1317334 du 29 juin 2016 du Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise est annulé en tant qu'il a fait droit aux conclusions de l'association Garches Est à Vous.

Article 2 : La demande de l'association Garches Est à Vous devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de Garches ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La commune de Garches versera à l'association Garches Environnement une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de l'association Garches Est à Vous présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 16VE02775


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE02775
Date de la décision : 29/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation locale.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: Mme RIBEIRO-MENGOLI
Avocat(s) : CHERGUI

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-03-29;16ve02775 ?
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