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10/02/2021 | FRANCE | N°20VE01674

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 10 février 2021, 20VE01674


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 16 mars 2020 par lequel le préfet du Val-d'Oise lui a fait obligation de quitter le territoire français et a prononcé une interdiction de retour d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2003289 du 9 juin 2020, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté en tant qu'il a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, enjoint au préfe

t du Val-d'Oise de mettre fin au signalement de M. A... dans le système d'informati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 16 mars 2020 par lequel le préfet du Val-d'Oise lui a fait obligation de quitter le territoire français et a prononcé une interdiction de retour d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2003289 du 9 juin 2020, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté en tant qu'il a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, enjoint au préfet du Val-d'Oise de mettre fin au signalement de M. A... dans le système d'information de Schengen et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 juillet 2020, M. A..., représenté par Me C..., avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 16 mars 2020 en tant qu'il l'a obligé à quitter le territoire français sans délai ;

2° d'annuler dans cette mesure, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation après l'avoir muni d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A... soutient que :

- il n'a pas été invité à faire connaître ses observations préalablement à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire ;

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît l'article 3-1 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les observations de Me D..., substituant Me C... pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet du Val-d'Oise a, par un arrêté du 16 mars 2020, fait obligation à M. A..., ressortissant indien, de quitter le territoire français et prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée de deux ans. Par un jugement du 9 juin 2020, le magistrat délégué du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté en tant qu'il a interdit à M. A... de revenir sur le territoire français pendant deux ans et rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français. M. A... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français et la fixation du pays de destination en cas d'exécution forcée de cette obligation.

2. Si M. A... soutient que les décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination en cas d'exécution forcée de cette mesure ne sont pas motivées en méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'arrêté du 16 mars 2020 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, permettant à l'intéressé d'en contester utilement le bien-fondé. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.

3. M. A... soutient que les décisions attaquées méconnaissent le principe du contradictoire et le droit d'être entendu garantis par l'article 41 paragraphe 2 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Cette disposition énonce dans son paragraphe 1 que : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union ", et dans son paragraphe 2, que : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ". Le paragraphe 1 de l'article 51 de la Charte dispose également que : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union ".

4. Aux termes de la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne C-383/13 PPU du 10 septembre 2013, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal d'audition dressé le 14 mars 2020, que M. A... a été entendu par les services de police à la suite d'une plainte de son ex-conjointe pour des faits de violences. A cette occasion, il a communiqué divers renseignements concernant sa situation personnelle et familiale et fait état du caractère irrégulier de son séjour en France. Ainsi, il doit être regardé comme ayant eu connaissance qu'en raison de sa situation irrégulière, il s'exposait à ce que soit prise à son encontre une mesure d'éloignement à destination de son pays d'origine. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... aurait été empêché de présenter des observations avant que ne soient prises les décisions en litige. Par suite, le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixation du pays de destination et refus de délai de départ volontaire auraient été prises en méconnaissance du principe général du droit d'être entendu issu du droit de l'Union européenne doit être écarté.

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui soutient être entré en France en 2011, s'est maintenu sur le territoire français en situation irrégulière et s'est soustrait à une première obligation de quitter le territoire français du 6 mars 2017. S'il est père de deux enfants nés en France en 2016 et 2018, il est séparé de son ex-compagne qui a porté plainte à son encontre pour des faits de violence. M. A..., qui ne justifie pas d'une quelconque intégration professionnelle, ne justifie pas participer à l'éducation et à l'entretien de ses enfants. Ainsi, au regard des circonstances particulières à l'espèce, le préfet du Val-d'Oise ne peut être regardé comme ayant porté au droit à la protection de la vie privée et familiale de M. A... protégé par les stipulations précitées. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

7. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, que l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

8. Ainsi qu'il vient d'être dit, M. A... n'établit ni qu'il vivrait avec ses enfants, ni qu'il assumerait effectivement ses obligations de parent. En l'absence de liens réels et avérés entre M. A... et ses enfants, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas non plus les stipulations de l'article 3-1 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français sans délai. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

2

N° 20VE01674


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01674
Date de la décision : 10/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: M. BOUZAR
Avocat(s) : BULAJIC

Origine de la décision
Date de l'import : 25/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-02-10;20ve01674 ?
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