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17/06/1986 | FRANCE | N°85-92271

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 juin 1986, 85-92271


CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- le Fonds de garantie automobile, partie intervenante,
contre un arrêt de la Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, Chambre correctionnelle, en date du 11 avril 1985 qui, dans une poursuite exercée contre X... William des chefs d'homicide et blessures involontaires, défaut d'assurance, défaut de changement de carte grise et infraction au Code de la route, s'est prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ainsi que les observations complémentaires ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la

violation des articles 319 et 320 du Code pénal, 2 et 3, 485, 512 et 593...

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- le Fonds de garantie automobile, partie intervenante,
contre un arrêt de la Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, Chambre correctionnelle, en date du 11 avril 1985 qui, dans une poursuite exercée contre X... William des chefs d'homicide et blessures involontaires, défaut d'assurance, défaut de changement de carte grise et infraction au Code de la route, s'est prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ainsi que les observations complémentaires ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 319 et 320 du Code pénal, 2 et 3, 485, 512 et 593 du Code de procédure pénale, pour défaut de motifs,
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement entrepris (du Tribunal correctionnel de Saint-Pierre-de-la-Réunion du 19 mars 1981), " en ce qu'il a déclaré X... William entièrement responsable de l'accident du 7 avril 1980 " ;
" aux motifs que sur la responsabilité de l'accident, le premier juge a déclaré X... William entièrement responsable de l'accident du 7 avril 1980 ; qu'ainsi le Tribunal correctionnel a fait une juste appréciation des éléments de la cause et qu'il convient de confirmer cette décision en adoptant intégralement ses motifs " ;
" alors que les juges doivent répondre aux chefs péremptoires des conclusions dont ils sont saisis ; que le Fonds de garantie a fait valoir dans des conclusions régulièrement déposées devant la Cour :
" Au fond le jugement du 19 mars 1981 est erroné et a violé l'article R. 214 du Code de la route. Ce n'est pas le Fonds de garantie, mais bien le Tribunal correctionnel qui n'a lu qu'une partie de ce texte. L'article R. 214 du Code de la route dispose que les véhicules à traction animale qui circulent de nuit sur une route doivent être équipés : à l'avant, d'un ou deux feux émettant vers l'avant une lumière blanche ou jaune ; à l'arrière, d'un ou de deux feux émettant vers l'arrière une lumière rouge. Cet article dispose que ces lumières doivent être visibles à une distance de 150 mètres. Il ajoute : que s'il n'y a qu'un feu à lumière blanche ou jaune ou un seul feu à lumière rouge, chacun d'eux doit être placé à la gauche du véhicule, si ce dernier est en mouvement ; que tous les véhicules à traction animale à un seul essieu, ce qui est le cas de l'espèce, peuvent n'être signalés que par un feu unique placé du côté opposé à l'accotement ou au trottoir, émettant vers l'avant une lumière blanche ou jaune, et vers l'arrière une lumière rouge. C'est ce dernier paragraphe que n'a pas lu le Tribunal correctionnel de Saint-Pierre. Or la gendarmerie, qui est arrivée sur les lieux immédiatement après l'accident, a constaté que la charrette conduite par Y... n'était équipée que d'un fanal à l'avant-gauche de la caisse et de deux cataphotes placés à l'arrière de ladite caisse. A l'arrière gauche de celle-ci, il n'y avait aucun feu, ce que ne conteste pas d'ailleurs Y... Celui-ci était donc en infraction grave. Il a surpris X... qui circulait " normalement " au volant de sa voiture (témoin Z... Reine). Le léger état alcoolique dans lequel se trouvait le prévenu et la fatigue de celui-ci (à supposer cette fatigue démontrée) sont sans rapport avec l'accident. Celui-ci s'est produit parce que Y... circulait de nuit (0 h 45), sans éclairage réglementaire et que le prévenu X... a aperçu la charrette beaucoup trop tard. Le prévenu devait rouler à l'allure approximative de 90 km / heure et il n'était donc pas en infraction. Il doit donc être relaxé des fins de la poursuite pour homicide et blessures par imprudence " ; qu'en se bornant à déclarer " qu'il convient de confirmer (la) décision du premier juge sur la responsabilité " en adoptant intégralement ses motifs ", sans examiner les conclusions précises précitées du Fonds de garantie qui faisaient remarquer que le Tribunal correctionnel " n'a pas lu " le dernier paragraphe de l'article R. 214 du Code de la route imposant que le " feu unique placé du côté opposé à l'accotement ou au trottoir, (émette)... vers l'arrière une lumière rouge ", que n'avait pas la charrette conduite par Y..., la Cour n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure de s'assurer de la légalité de sa décision ; que la cassation est, dès lors, encourue de ce chef " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision et que les juges doivent répondre aux chefs péremptoires des conclusions dont ils sont régulièrement saisis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme en adoptant ses motifs non contraires que X... qui, sans avoir contracté une assurance ni avoir fait procéder au changement de carte grise, conduisait une automobile lui appartenant, a heurté à l'arrière un véhicule à traction animale à un seul essieu qui circulait dans le même sens que lui sous la conduite de Y... ; qu'à la suite du choc, un passager dudit véhicule, A..., a été tué et Y... blessé ;
Attendu qu'après avoir déclaré X... coupable d'homicide et blessures involontaires au motif qu'il n'était pas resté maître de la vitesse ni de la direction de son véhicule et que cette inobservation des règlements avait été la cause de l'accident, les premiers juges ont retenu l'entière responsabilité du prévenu ; que pour écarter, à cet égard, les conclusions du Fonds de garantie qui soutenaient que la charrette de Y... n'était pas régulièrement éclairée et que cette faute avait concouru à la production du dommage, le tribunal s'est fondé sur les dispositions de l'article R. 214 du Code de la route selon lesquelles les véhicules à traction animale à un seul essieu peuvent n'être signalés que par un feu unique placé du côté opposé à l'accotement ou au trottoir et a constaté que tel était le cas en l'espèce ;
Attendu que pour confirmer cette décision, la juridiction du second degré s'est bornée à énoncer que le tribunal avait fait une juste appréciation des éléments de la cause ;
Mais attendu qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions du Fonds de garantie qui faisait valoir que, selon l'article précité, le feu unique équipant un véhicule à traction animale à un seul essieu devait émettre vers l'avant une lumière blanche ou jaune et vers l'arrière une lumière rouge, alors que la charrette de Y... n'était équipée que d'un fanal à l'avant gauche et de deux cataphotes à l'arrière de la caisse, la Cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure de s'assurer de la légalité de la décision ;
Attendu, cependant, que la cassation encourue ne peut être que partielle ;
Qu'en effet, d'une part, l'auteur d'une infraction est tenu à la réparation intégrale du dommage qui en résulte pour une victime à laquelle aucune faute n'est imputée, même s'il n'en est pas le seul responsable ; d'où il suit que le prévenu a été à juste titre condamné à réparer l'entier préjudice subi par les ayants droit de A..., passager tué au cours de la collision ; que cette solution se trouve confirmée par les articles 2 et 6 combinés de la loi du 5 juillet 1985, déclarés applicables aux instances en cours ;
Que, d'autre part, le grief formulé dans le moyen est devenu sans objet en ce qui concerne la réparation du dommage résultant des atteintes à la personne de Y..., dès lors que selon l'article 3 de la même loi les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, ne peuvent se voir opposer leur propre faute, fût-elle inexcusable, lorsqu'elle n'a pas été la cause exclusive de l'accident ;
Qu'ainsi la cassation doit être limitée à la disposition de l'arrêt portant sur l'indemnisation des dommages aux biens subis par Y... et ce, dans les seuls rapports entre le Fonds de garantie et ladite partie civile ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, en date du 11 avril 1985, mais seulement en ce que, dans les rapports du Fonds de garantie et de Y..., il s'est prononcé sur l'indemnisation des dommages aux biens subis par ce dernier, et pour qu'il soit à nouveau statué conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la Cour d'appel de Saint-Denis-de-la-Réunion autrement composée.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 85-92271
Date de la décision : 17/06/1986
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° JUGEMENTS ET ARRETS - Conclusions - Défaut de réponse - Partie intervenante - Conclusions tendant à établir la faute de la partie civile - Circulation routière - Eclairage.

CIRCULATION ROUTIERE - Véhicule à traction animale - Véhicule circulant de nuit - Eclairage - Eclairage régulier - Recherches nécessaires * CIRCULATION ROUTIERE - Eclairage - Véhicule à traction animale - Véhicule circulant de nuit.

1° Encourt la censure l'arrêt qui s'abstient de répondre aux conclusions du Fonds de garantie automobile alléguant que le véhicule à traction animale heurté de nuit par une automobile n'était pas régulièrement éclairé et que cette faute a concouru à la production du dommage.

2° ACTION CIVILE - Préjudice - Réparation - Pluralité d'auteurs - Réparation intégrale - Victime d'un accident de la circulation - Victime autre que le conducteur - Passager.

2° Voir le sommaire suivant.

3° ACTION CIVILE - Préjudice - Réparation - Victime d'un accident de la circulation - Victime autre que le conducteur - Conducteur d'un véhicule à traction animale - Atteinte à la personne - Indemnisation.

LOIS ET REGLEMENTS - Application dans le temps - Loi relative à l'indemnisation des victimes d'accidents de la circulation - Loi du 5 juillet 1985 - Articles 1 à 6 - Application immédiate - Application aux procédures en cours devant la Cour de Cassation.

3° Toutefois la cassation doit être limitée à la partie de la décision concernant la réparation des dommages aux biens du conducteur dudit attelage ; en effet, d'une part, les ayants droit du passager mortellement blessé dans l'accident ne peuvent se voir opposer la faute d'un tiers par le conducteur de l'automobile reconnu coupable d'homicide et blessures involontaires, et, d'autre part, le blessé, conducteur du véhicule à traction animale ne peut, pour la réparation des atteintes à sa personne, se voir opposer sa propre faute dès lors qu'elle n'a pas été la cause exclusive de l'accident.


Références :

Code de la route R214
Code de procédure pénale 3, 485, 512

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 11 avril 1985


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 jui. 1986, pourvoi n°85-92271, Bull. crim. criminel 1986 N° 211 p. 539
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1986 N° 211 p. 539

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Bruneau, Conseiller le plus ancien faisant fonctions
Avocat général : Avocat général : M. Clerget
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Leydet
Avocat(s) : Avocat : M. Coutard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1986:85.92271
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