REJET du pourvoi formé par :
- C...,
- la SARL " l'U... ",
contre un arrêt de la Cour d'appel de Paris, 11e Chambre, en date du 4 juillet 1985 qui, pour diffamation publique envers particulier, a condamné la première à 1 000 francs d'amende et à des réparations civiles et déclaré la seconde civilement responsable.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 32 de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs ;
" en ce que l'arrêt attaqué a, d'une part, condamné Madame C... à la peine de 1 000 francs d'amende pour diffamation publique, et, d'autre part, déclaré la société l'U... civilement responsable du fait de Madame C... ;
" aux motifs que " C... n'a pas fait d'offre de preuve, mais a excipé de sa bonne foi ; qu'elle précise, à cet égard, que la mise en cause de la partie civile était due à une erreur du journaliste tenant à une confusion entre A... et L... et une autre association " (cf. arrêt attaqué, p. 4, 3e considérant) ; " que c'est en vain que la prévenue invoque cette erreur comme fait justificatif de sa bonne foi ; que le devoir du journaliste consiste à ne publier que des informations dont il a vérifié l'exactitude afin de garantir un juste équilibre entre le respect dû à autrui et le droit légitime d'information du public ; que c'est donc à juste titre que le tribunal a écarté l'excuse de la bonne foi soulevée par la prévenue " (cf. arrêt attaqué, p. 4, 4e considérant) ;
" alors que le journaliste qui porte atteinte à la considération d'autrui non pas parce qu'il a omis de procéder aux vérifications nécessaires, mais parce qu'il a été la victime d'une erreur involontaire, doit être considéré comme de bonne foi ; qu'en se contentant de rappeler que le journaliste doit procéder aux vérifications nécessaires, sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions d'appel de la prévenue, si celle-ci n'avait pas été victime d'une erreur involontaire, la Cour d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement dont il adopte les motifs que C..., prise en la qualité de directeur de publication du périodique " l'U... " a été citée à la requête de l'association " A... et L... " devant le Tribunal correctionnel pour diffamation à raison de la parution dans le numéro 2805 daté du 20 mai 1983 dudit journal de deux articles désignant la partie civile comme une filiale française de la Ligue anticommuniste mondiale (WACL), organisation internationale constituée de fascistes asiatiques et d'opposants au régime des pays de l'Est au passé pro-nazi " ayant trempé notamment dans l'assassinat de M. A..., président du parti socialiste japonais en 1960 " ; que, pour exciper de sa bonne foi, la prévenue, seule poursuivie, a fait valoir que l'auteur de l'article mettant en cause A... et L... utilisant mal ses sources de renseignement, aurait commis une confusion entre deux associations n'ayant rien à voir l'une avec l'autre ; qu'après avoir relevé le caractère diffamatoire des passages incriminés et constaté que l'association plaignante était citée " parmi la fine fleur du mouvement associatif de droite et d'extrême droite ", et que " le rapport entre l'appartenance de A... et L... avec la WACL et les renseignements fournis sur ce groupement de fascistes et de pro-nazis assassins était évident ", les juges énoncent, pour rejeter l'exception de bonne foi, que le devoir du journaliste consiste à ne publier que des informations dont il a vérifié l'exactitude, afin de garantir un juste équilibre entre le respect dû à autrui et le devoir légitime d'information du public ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel n'a pas encouru le grief articulé au moyen ; que les imputations diffamatoires impliquent l'intention de nuire à la personne qu'elles atteignent dans son honneur ou sa considération ; que cette intention n'est susceptible de disparaître que si l'auteur de l'écrit diffamatoire à qui seul en incombe la charge, parvient à prouver l'existence de faits justificatifs de nature à faire admettre sa bonne foi ; que dès lors les juges n'ont pas à se substituer à lui pour rechercher si la personne visée a été atteinte par erreur, laquelle à elle seule serait exclusive de toute bonne foi ; que, de surcroît, le directeur de publication d'un journal dont le devoir est de surveiller et de vérifier tout ce qui y est inséré, est de droit responsable en cette qualité comme auteur principal de tout article publié par la voie de ce journal et dont le caractère diffamatoire est démontré ;
Que le moyen n'est dès lors pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.